LA CHUTE DU FAUCON NOIR
Vo. Black Hawk Down
Année : 2001
Pays : Etats-Unis
Genre : guerre
Durée : 2 h 24 min.
Couleur
Réalisateur : Ridley SCOTT
Scénario : Mark BOWDEN, Ken NOLAN
Acteurs principaux :
Josh HARTNETT (Eversmann), Ewan McGREGOR (Grimes), Tom
SIZEMORE (McKnight), Eric BANA (Hoot), William FICHTNER (Sanderson), Ewen
BREMNER (Nelson), Sam SHEPARD (Garrison)
Musique : Hans ZIMMER
Photographie : Slawomir IDZIAK
Producteurs : Jerry BRUCKHEIMER, Ridley SCOTT
Compagnies productrices : Revolution Studios, Jerry
Bruckheimer Films
Aéronefs :
- -Agusta Bell AB205 Iroquois
- -Boeing 707-138, CN-ANS, en arrière-plan
- -Hughes AH-6/MH-6M Little Bird
- -Lockheed C-130H Hercules, CNA-OC, OD, OS, en arrière-plan
-
-Sikorsky MH-60L Black Hawk
Notre avis :
Ce film nous ramène en 1993, en Somalie, où la guerre fait rage et où la famine s’était installée malgré l’intervention des Nations-Unies. Le pays était « gouverné » par un certain Mohammed Farrah Aïdid, le chef des milices somaliennes qui attaquaient les militaires des Nations-Unies et mettaient la main sur le ravitaillement des populations fourni par la Croix Rouge. Les Américains décidèrent d’envoyer des troupes, ente août et octobre, notamment un détachement du 160th SOAR équipé d’hélicoptères et affecté à la Task Force Ranger, pour l’opération « Gothic Serpent ».
Le film raconte l'histoire vraie d'une unité de combat américaine qui a pénétré Mogadiscio le 3 octobre 1993, pour capturer Aïdid, le président autoproclamé du pays, et mettre fin au conflit qui fait rage. Avant, les Rangers ont capturé Osman Ali Atto, un homme d’affaires qui vend des armes aux miliciens d’Aïdid. Cependant, l'attaque se heurte à de solides défenses et à des combats de rue intenses et très mortels. Les rangers américains ne parviennent pas à trouver Aïdid, et, après de longues délibérations, ils décident d’appréhender deux conseillers de ce chef de guerre, afin de retrouver sa trace. Le 3 octobre 1993, à 14h29, commence l'attaque qui, si elle se déroulait comme prévu, ne durerait qu'une heure. Lorsque qu’un Black Hawk qui débarque des troupes est abattu, des soldats sont envoyés sur place, mais pour aggraver les choses, un deuxième Black Hawk est descendu. Ses membres d’équipage sont lynchés et un pilote est fait prisonnier. De violents combats ont lieu toute la nuit, pour essayer de récupérer les survivants et les rangers coincés en pleine ville. Mais, avec l'aide de l'armée pakistanaise et d'autres unités faisant partie des forces de l’ONU, tous les soldats et blessés sont évacués hors de la ville. Seul, un groupe de soldats américains ne trouvant pas de place dans les véhicules blindés, tous bondés, doit retourner à pied vers la base de l’ONU installée dans un stade. Cette scène est également connue sous le nom du « Mile de Mogadiscio ».
A la fin du film, on fournit le bilan des combats des 3 octobre et 4 octobre 1993 : 19 Américains et environ 1 000 Somaliens ont été tués et 73 soldats américains ont été blessés. Michael Durant, l'un des pilotes capturé, fut libéré au bout de 11 jours. Deux semaines plus tard, les unités américaines furent retirées de Somalie sur ordre du président Clinton. La 160th SOAR perdit deux hélicoptères Black Hawk et cinq de ses hommes. Trois hélicoptères Little Bird ont été gravement endommagés. Les hélicoptères ont tous été atteints par des tirs de RPG-7, des lance-grenades anti-char (russes), les hélicoptères volant très bas au-dessus de la ville.
Cette bataille qui ne fut pas une réussite pour l’armée américaine, sera particulièrement traumatisante pour l'opinion publique américaine, notamment, suite de la diffusion d'images télévisées de cadavres de soldats américains traînés par des voitures, dans les rues de la ville…Elle fit l’objet du livre « Black Hawk Down : A Story of Modern War » de Mark Bowden en 1999, dont ce film est une adaptation à l’écran. Ces pertes d'hélicoptères pendant la guerre ont été une victoire de propagande majeure pour l'Alliance nationale somalienne (SNA), le principal belligérant face aux forces des Nations Unies (ONU).
Rappelons toutefois que le 25 septembre 1993, les Somalis avaient déjà abattu un autre Black Hawk avec également un RPG-7, un incident qui est inexplicablement passé inaperçu auprès des médias. Trois membres d’équipage furent tués. Cet hélicoptère n’appartenait pas au 160th SOAR, mais à la 101st Airborne Division. L'incident aurait dû tirer la sonnette d'alarme, mais tel n'a pas été le cas, même parmi les pilotes du 160th SOAR, qui pensaient que leurs tactiques et leur entraînement supérieurs à ceux des équipages formés de manière conventionnelle leur permettraient d'échapper à un tel sort…
Même si les faits relatés ne sont pas tous très exacts et que le film comporte certaines inexactitudes (pratiquement aucun Somali aperçu, que des Noirs, comme à Mombasa !) ; on est ici à Hollywood, pas dans une documentaire en direct. Le film s’attache surtout à nous montrer l’horreur des ces combats de rue, plus mortels que les batailles en pleine nature. Il décrit les combats comme une vraie boucherie avec des gros plans sur les blessures des soldats : doigts arrachés, bras et jambes tranchés, tronc à moitie coupé en deux avec ses intestins à l’air, opération d’une jambe avec les moyens du bord et sans anesthésie, les visages ensanglantés des soldats…
Le film est très réaliste et bien réalisé avec notamment des effets spéciaux de qualité, élaborés par de nombreux (128) artistes digitaux.
Certes, les soldats sont les acteurs du film, mais les vraies stars du film sont en réalité les hélicoptères et surtout quatre d’entre eux, des Black Hawk. Ils furent un vrai problème pour le réalisateur Bruckheimer, car comment faire un film, intitulé « Black Hawk Down », sans ce genre d’hélicoptère à l’écran ? On ne pouvait les acheter, puisqu’ils appartenaient à l’USAF. Bruckheimer dut donc se rapprocher du Département de la Défense des Etats-Unis, qui, après de longues négociations, permit d’abord aux acteurs de participer à des séances d'orientation et de formation dans les bases militaires des unités qui devaient apparaître dans le film : Fort Benning (GA), pour les Rangers ; Fort Bragg (NC) pour les forces spéciales y compris la Delta Force, et Fort Campbell (KY), pour les pilotes du 160th SOAR (Special Operations Aviation Regiment). Puis, cette dernière unité fut autorisée à fournir huit hélicoptères et leurs pilotes, dont la plupart avaient participé à la bataille du 3 au 4 octobre 1993. La production embaucha néanmoins sept pilotes d’hélicoptères privés pour le filmage aérien.
Mais il fallait aussi, transporter le matériel comme les hommes, au Maroc, pays choisi pour remplacer la Somalie. Bruckheimer et l’un des producteurs, Branko Lustig, durent donc contacter le ministère des Affaires Etrangéres marocain. Le roi du Maroc et ses ministres considérèrent que le film traitait un événement historique et qu’il n’était d’aucune manière contre l’Islam ; ils donnèrent leur accord. L’armée marocaine fournit même du matériel, des véhicules blindés AM M1044 Humvee, des VAB Saviem et un hélicoptère.
Le plus important fut l’autorisation d’utiliser la base de l’armée de l’air marocaine de Kenitra, près de Rabat-Salé, où purent être envoyés, par des cargos Lockheed C-5, environ 100 Rangers, les hélicoptères et leurs pilotes, et tout le personnel d’accompagnement. Kenitra, qui fut une base de l’US Navy jusqu’en 1977, fut transformé pour ressembler à la base américaine installée sur l’aéroport de Mogadiscio en 1993, avec des décors à l'intérieur des hangars et d'autres structures.
Les « avions » du film :
L’US Army fournit quatre Hughes AH/MH-6J Little Bird et quatre Sikorsky UH-60L Black Hawk, appartenant tous au 160th SOAR (Special Operations Aviation Regiment), les Night Stalkers. Plusieurs maquettes de Black Hawks grandeur réelle furent construites, y compris les épaves des « Super Six One » et « Super Six Four » écrasés.
Les Black Hawk transportent des rangers et sont armés de deux mitrailleuses M134 minigun de chaque côté du cockpit. Chaque Black Hawk avait un nom personnel inscrit sur ses moteurs : « Nightstalker », « Black Scorpion », « Armageddon » et « Gladiator », ces deux derniers noms étant, comme par hasard, les titres des films produits par Jerry Bruckheimer et Ridley Scott, en 1998 et 2000.
Le « Super 61 » qui est abattu le premier est le UH-60L (s/n 91-26365, c/n 70-1662), la version de transport, qui fut transformé en MH-60L, spécialement construit pour le 160th SOAR. On peut apercevoir (difficilement) son nom « Armageddon », mais en réalité il aurait dû s’appeler « Black Scorpion » selon d’anciens membres du 160th SOAR…Le vrai « Super 61 » abattu le 3 octobre 1993, était baptisé « Thunderstruck » (s/n 91-26324).
L’autre Black Hawk abattu est le UH-60L, la version de transport utilitaire (s/n 91-26350 c/n 70-1651) transformé en MH-60L. Il joue le rôle du « Super 64 » qui s’appelait « Venom » (s/n 89-26188) abattu le 3 décembre 1993. Son numéro de série apparaît, comme pour le précédent, sur la dérive de la maquette de son épave.
Les deux autres Black Hawk ne sont pas identifiables. Celui portant le nom d’ « Armageddon » était le MH-60L (s/n 91-26367 c/n 70-1732) selon d’anciens membres du 160th SOAR,
Les Hughes apparaissent sous deux versions peu différentes : Les AH-6J (AH=Attack Helicopter) connus sous le nom de "Killer Egg", armés de deux mitrailleuses M134 de 7.62 mm et de deux pods de roquettes M260 FFAR, et les MH-6J (MH=Multi mission Helicopter), équipés de banquettes rabattables installées de chaque côté du fuselage pouvant accueillir chacune deux ou trois hommes, et d’un système amovible d'insertion/extraction rapide avec une corde (FRIES- Fast Rope Insertion & Extraction Systems). Ce dernier modèle est le plus vu dans le film.
Quand les Américains entrent dans Mogadiscio, les quatre Little Bird sont des MH-6J, alors qu’au début du film, c’est un AH-6J qui arrête la voiture du businessman Atto, puis, quand les combats se sont engagés, ont voit, de jour, un autre vrai AH-6J survoler la ville en compagnie de deux Sikorsky SH-60L et d’un MH-6J ; plus tard, deux AH-6J mitraillent les Somalis au sol. De nuit, deux autres AH-6j, visiblement créés en images de synthèse, sont vus du dessus. Peut-être un MH-6J pouvait-il être facilement transformé en AH-6J, ou vice-versa…
Peints de couleur très sombre leurs marques sont pratiquement invisibles, on ne peut distinguer (difficilement) que le numéro « 354 », peint sur le nez du cockpit de l’un d’entre eux qui vient récupérer un occupant du Black Hawk « Super 61 » abattu. L’hélico fut piloté dans le film par Keith Jones qui, en 1992, récupéra non pas un, mais deux membres d’équipage, avec son MH-6J « Star 41 ». Celui du film est aussi un MH-6J, d’abord construit comme AH-6J (c/n 0061F, s/n 89-25354) et qui sera transformé en MH-6M en 2015.
Les trois autres portaient les serials suivants :
-84-24319 (c/n 410937D), un Hughes AH-6C affecté en juin 1983 à la Compagnie B, du 160th SOAR. Plus tard, modifié en AH-6F et AH-6J.
-95-25371, un McDonnell Douglas AH-6J, transformé en MH-6J.
-81-23653, (c/n 876D), un MH-6J de la Compagnie A du 160th SOAR. Il fut endommagé le 20 novembre 2001, en Afghanistan, portant le code « Star 43 ».
Un autre hélicoptère a participé au tournage, et avait été fourni par l’armée de terre marocaine. Il est filmé sur le dessus, alors qu’il suit la Mercédès d’un informateur qui traque un chef des Somalis. Il s’agit d’un Agusta Bell AB205A Iroquois qui fut en service entre 1968 et 2004.
Ces hélicoptères furent filmés en vol par un Aérospatiale AS-350 "A-Star" de la société Flying Pictures.
Quant aux avions, ils ne sont vus qu’au sol et en arrière-plan. Ce sont pour la plupart des Lockheed C-130H Hercules de l’armée de l’air marocaine sur la base de Kenitra. Le Maroc reçut un total de 19 C-130H, entre 1974 et 1981, dont deux ravitailleurs affectés à l’Escadrille de transport. En 2002, certains furent équipés du MAFFS (Modular Airborne Fire Fighting System) pour combattre les feux de forêts.
On voit ainsi, les avions portant les codes :
-CNA-OC (c/n 382-4551), un C-130H reçu en 1974 et affecté à l’escadre de Transport 3. Il est toujours actif.
-CNA-OD (c/n 382-4575), un C6130H reçu en février 1975, toujours actif.
-CNA-OS (c/n 382-4909) un ravitailleur KC-130H, livré en mai 1982, toujours actif.
De loin, derrière le CNA-OS, on distingue deux CASA/IPTN CN-235M-100 et un hélicoptère Aérospatiale SA342 Gazelle qui les survole.
C’est sur la fermeture de la porte de la soute d’un C-130H emportant des cercueils, que se termine le film…
Derrière un officier américain apparaît un Boeing 707 ayant le matricule civil « CN-ANS », un appareil visiblement plus en état de vol. Son immatriculation bien visible en fait le Boeing 707-138 (c/n 18334/229) construit en juillet 1961 et acquis par la compagnie australienne Qantas Airways. Il fut immatriculé « VH-EBK » avec le nom de « City of Newcastle ». Il fut mis sur la ligne Sydney-San Francisco, puis Sydney-Londres. Endommagé lors d’un atterrissage violent pendant une pluie tropicale, à Singapour, il fut réparé et repris du service en février 1965. En 1968, il fut retiré du service et stocké sans moteur à Sydney (Kingsford Smith). En novembre 1968, il fut loué à British West Indian Airways Ltd., puis à Caribbean Aircraft (9Y-TDB). En avril 1969, il revint chez Qantas qui le vendit à British West Indian Airways en septembre 1969. En octobre 1977, il était retiré du service et stocké à Port of Spain (Trinidad). Vendu à Euro Air Financing, il fut acheminé à Bâle, en Suisse, acquis par Jet Aviation de Zurich, en mars 1978. Peu après, en avril, il fut enregistré aux Etats-Unis (N58937) au nom du Groupe TAG Aviation d'Akram Ojjeh, un homme d’affaires, multimilliardaire saoudien d’origine syrienne et qui était aussi un trafiquant d'armes au compte de l'Arabie Saoudite. L’avion fut configuré en transport VIP très luxueux, en 1979. En mai 1983, il fut cédé à la force aérienne marocaine (code CN-ANS, puis CNA-NS) pour une modique somme. L'avion a servi pendant deux ans pour le transport VIP et la formation des pilotes. Après, suite à des problèmes mécaniques très coûteux il dut être mis à la retraite et réimmatriculé au nom de TAG Group USA Corp. dans le Delaware, en mars 1985 ; il fut radié en mars 2000. Mais en 2006, comme en 2001, il était toujours parqué sur la base de Kenitra devant un hangar, puis en 2012, il fut relégué au bout d’une piste désaffectée. En 2023, il y est encore, avec une dérive en partie arrachée, le fuselage et les réacteurs brûlés, criblés de balles. Il aurait donc servi de cellule d’entraînement pour pompiers et tireurs…Il porte une livrée inconnue, avec « African Arrow » marqué au-dessus des hublots et une grande flèche tout au long du fuselage, une décoration qu’il avait déjà en 2001.
Christian Santoir
*Film disponible sur amazon.fr
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