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CAPELIS XC-12

 Le CAPELIS XC-12

Un Grec à Hollywood

 

Cet avion est le curieux fruit d’une initiative privée de Socrates H. Capelis, un habitant d’origine grecque d’El Cerrito (CA) où sa famille tenait une ferme d’élevage. El Cerrito comptait déjà parmi ses habitants un autre passionné d’aviation, Pierre Allinio, qui au début des années vingt avait construit un Bristol Fighter muni d’une cabine. Capelis qui n’était pas ingénieur en aéronautique s’intéressait au concept de « l’avion de sécurité ». En 1926, le milliardaire Guggenheim avait lancé la « Safe Aeroplane Competition » dont l’objectif était de construire un avion qui pourrait voler à faible vitesse sans décrocher. Ce prix de 100 000 $ dollars fut gagné en octobre 1929 par le Curtiss Tanager. Le 6 février 1928, Capelis avait déposé un brevet (enregistré en février 1930 sous le N° 1745600) pour un avion tout à fait spécial. Il s’agissait d’un monoplan munit de cinq hélices : deux hélices propulsives à l’avant du fuselage installées l’une au dessus de l’autre, une hélice à axe vertical située derrière le cockpit, une autre située à l’opposé, au dessous du fuselage, et enfin à l’arrière, sous le gouvernail, une hélice marine pour faire évoluer l’avion sur l’eau. En plus d’un train rétractable, ce monstre avait une aile épaisse à section en forme de losange dont on peut douter des qualités aérodynamiques. Cet avion tenait donc à la fois de l’hydravion et de l’hélicoptère ! En 1929, le fils de Pierre Allinio construisit deux maquettes de cette curieuse machine que S. Capelis utilisa pour trouver des sponsors.

En mai 1930, Capelis fonda la « Capelis Safety Airplane Corporation Limited » qui obtint une licence pour organiser un service de transport aérien entre Berkeley et San Francisco. La compagnie devait également construire un appareil pouvant transporter un grand nombre de passagers. La société Capelis était composée essentiellement d’hommes d’affaires d’El Cerrito, Richmond et Oakland, dont un certain nombre de restaurateurs grecs. Un certain Dr. John E. Younger diplômé en mécanique aéronautique de l’université de Berkeley fut chargé de construire le prototype avec l’aide des étudiants de l’université. Ses principaux travaux portaient sur les trains d’atterrissage et les roulettes de queue rétractables, l’aile tout métal et un dispositif anti-flutter. De 1938 à 1958, il sera professeur, puis président du département de mécanique de l’université du Maryland. Au lieu de construire l’avion selon le modèle de Capelis, il construisit un bimoteur plus classique (on peut le comprendre). Cet avion (envergure : 15,24 m, longueur 12,80) était équipé de deux moteurs Wright Cyclone de 525 chevaux et pouvait recevoir douze passagers. Le longeron principal était boulonné, comme une grande partie de la structure, au lieu d’être riveté. L’empennage était biplan avec trois dérives (comme certains Vickers) ce qui lui donnaient un air désuet. Le poste de pilotage disposait d’une large verrière à pente inversée pour améliorer l’habitabilité et la visibilité, comme sur les premiers Boeing 247 ou le Stinson A trimoteur. Il était équipé de réservoirs largables. Le train était partiellement rétractable dans les fuseaux moteurs (comme le DC-2 et le Boeing 247) et sortait automatiquement quand on fermait les gaz, une bonne précaution à une époque où les pilotes étaient habitués aux trains fixes…

 

 
Fig.1. Le Capelis prototype "X-12762" © Aerofiles.com

Le Capelis XC-12 immatriculé NX12762, fit son premier vol à l’aéroport d’Oakland en 1933, avec des performances tout à fait honorables (vitesse de croisière de 322 km/h). Le gros problème était que sous l’effet des vibrations, et malgré les joints élastiques placés entre les ailes et le fuselage, les vis avaient tendance à se desserrer, ce qui obligeait à les resserrer ou à les remplacer à chaque vol ! En outre, l’avion était lourd et incapable de transporter une charge payante suffisante. Cet avion avait aussi deux redoutables concurrents qui volèrent presque au même moment, le Boeing 247 et le Douglas DC-2, des avions plus grands et mieux construits. Les tournées de promotion durent être bientôt abandonnées et la société de S. Capelis fit faillite. Le Capelis XC-12 fut acheminé en vol de Oakland au Grand Central Air Terminal de Glendale, via Fresno où il fit un atterrissage sur le ventre ; les dégâts ayant été peu importants, il put continuer sa route. Il fut alors remis au marchand d'avions Charlie Babb. Ce fut son dernier vol.

Après avoir croupi pendant quelques années dans un coin de l’aéroport de Glendale, Babb le vendit aux studios RKO en 1938 pour le film « Five came back ». La « Timm Aircraft Corporation » de Glendale modifia l’avion, notamment en changeant le vitrage du poste de pilotage et les hublots de la cabine (passés de 11 à 7, avec de petits hublots rectangulaires comme sur le Douglas DST) pour lui donner un air plus proche de ses concurrents Boeing et Douglas qu’il sera amené à doubler, au sol, dans les films.

 

 
Fig.2. Le Capelis modifié à Glendale, avec Mr Capelis devant.© Aerofiles.com

Pendant la guerre, la RKO gagna de l’argent avec cet avion bloqué au sol, les compagnies d’assurance refusant de le couvrir. Elle le loua à d’autres studios selon un tarif préétabli. Apparaissant dans plusieurs films tournés par différentes compagnies, il était loué 100 $ par jour, ou 500 $ la semaine. La maquette qui allait avec, était louée 100 $ la première semaine, 50 $ la seconde. La RKO précisait sur les feuilles de tarifs que le Capelis pouvait rouler avec ses propres moteurs, mais ne pouvait voler. Précaution utile !

 

Fig.3. Le Capelis ne se déplaçait plus qu'en camion, entre les lieux de tournage.
© Dustin Carter Coll

Fig.4. Chester Morris et Joseph Calleia s’échinant à démarrer
le moteur n°2, dans « Five came back » (1939) (Extr. de film.).
  

 
Fig.5 .Le Capelis dans « Flying Tigers » en 1942  (Extr. de film.)

En 1943, l’avion fut stocké démonté dans les locaux de la RKO  et on ne vit plus que sa maquette ou ses images sur les écrans. En 1947, il apparaît, par hasard, sans ses ailes et sans la partie arrière de son fuselage, dans un hangar, dans le film de la RKO "Dick Tracy's Dilemma". Son épave fut finalement ferraillée, vers 1950.

 

Filmographie :

  • Five Came Back (RKO) 1939 (avion et maquette)
  • Flying Blind (Paramount) 1941 (maquette)
  • King of the Zombies (Monogram) 1941 (maquette)
  • Flying Tigers (Republic) 1942 (avion et maquette)
  • The adventures of flying cadets (Universal) 1943 (maquette)
  • Invisible Agent (Universal) 1942 (avion et maquette)
  • Immortal Sergeant (20th Century Fox) 1943 (avion et maquette)
  • Adventures of the Flying Cadets (Universal) 1943 (maquette)
  • Night Plane from Chungking (Paramount) 1943 (avion)
  • The Falcon in Danger (RKO) 1943 (avion)
  • Wings Over the Pacific (Monogram) 1943 (maquette)
  • The Purple V (RKO) 1943 (avion modifié)
  • Action in Arabia (RKO) 1944 (image)
  • Passport to Destiny (RKO) 1944 (image)
  • Jungle Queen (serial) (Universal) 1945 (maquette)
  • Lost City of the Jungle série (1946) (maquette)
  • Dick Tracy's Dilemma (RKO) 1947 (avion démonté)
  • Daredevils of the Clouds (Republic) 1948 (maquette)
  • Jungle Goddess (Lippert Pictures) 1948 (maquette)
  • Tarzan's Magic Fountain (RKO) 1949 (maquette)
  • On the Isle of Samoa (Columbia) 1950 (maquette)
  • China Gate (Globe Enterprises) 1957 (maquette)

 

 Sources :

  • Farmer, James H. -1984- Broken Wings: Hollywood's Air Crashes.: Pictorial Histories Pub. Co., Missoula (MT), 112 p.
  • Farmer, James H.-1984- Celluloid Wings. The impact of movies on aviation. Tab Books Inc., Blue Ridge Summit (PA), 369 p.
  • Wynne, H. Hugh. -1987- The Motion Picture Stunt Pilots and Hollywood's Classic Aviation Movies. Pictorial Histories Publishing Co., Missoula MT), 184 p.

 

Christian Santoir

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