LE CIEL SUR LA TÊTE
Année : 1965Pays : France Genre : science-fiction Durée : 1 h 47 min. Couleur |
Réalisateur : Yves Ciampi
Scénario : Jean Chapot,Yves Ciampi
Acteurs principaux :
André Smagghe (Gaillac), Marcel Bozzuffi (le Capitaine), Henri Piégay (Majo), Bernard Fresson (Laurent), Jacques Monod (le Commandant Ravesne), Yves Brainville (Bricourt), Guy Tréjan (Le ministre), Jean Dasté (M. Bazin), Beatrice Cenci (L'amie de Majo), Yvonne Monlaur (Françoise), Roger Van Mullem (L'amiral), Wladimir Bellin (Le commandant du sous-marin), Jacques Santi (Jolivet).
Musique : Jacques LoussierPhotographie : Edmond Séchan,Guy Tabary
Producteur : Irénée Leriche
Compagnie productrice : Gaumont International
Aéronefs :
- -Breguet 1050 Alizé
- -Dassault Etendard IVM
- -Sud-Aviation SA 316B Alouette III
Notre avis :
Le titre du film est tiré de l'adage bien connu, rappelé au début du film, qui stipule que les Gaulois n'ont peur que d'une chose, c'est que le ciel leur tombe sur la tête…En 1964, le Service d'Information et de Relations Publiques de la Marine décida de faire réaliser un film pour promouvoir l'Aéronautique Navale, avec le nouveau porte-avions "Clemenceau" comme vedette. Ce bâtiment (R98) avait été mis en service trois ans plus tôt. La Marine accepta donc de mettre gratuitement le porte-avions à la disposition des cinéastes, à condition, bien sûr, de pouvoir exercer un contrôle strict sur la production.
Le tournage débuta le 1° juillet 1964 à quai, à Toulon, alors qu'une partie de l'équipage était en permission. Puis, il se poursuivit au large de la Provence. La Marine n'avait accordé que quatre semaines à Yves Ciampi pour les prises de vues, encore les séances de tournage devaient-elles permettre l'entraînement simultané des flottilles embarquées. Une exigence qui devra être rapidement abandonnée...Le "Clem" appareilla le 29 juillet et récupéra des Breguet Alizé de la 9F, et des Etendard IV de la 11F. Faute d'avoir l'autorisation d'embarquer une femme à bord, Ciampi dut remplacer la script girl habituelle par un homme ! Revenus à Toulon le 19 août, les marins virent partir avec un certain soulagement, l'équipe des cinéastes devenue, peu à peu, plutôt encombrante.
A coté d'acteurs confirmés, comme Jacques Monod, dans le rôle du pacha, Guy Tréjan, en ministre, il y en avait de plus jeunes promis à un bel avenir, comme Marcel Bozuffi ou Bernard Fresson. Il y avait également un débutant, Jacques Santi, qui allait passer deux ans plus tard, dans l'Armée de l'Air, pour y jouer le rôle de Tanguy, dans la fameuse série télévisée "Tanguy et Laverdure".
Un premier scénario s'intitulait "La peau des autres "et fut jugé mauvais. Un second fut donc écrit avec l'introduction d'extra-terrestres, seule solution trouvée pour créer une certaine intensité dramatique, tout en évitant d'envisager un conflit avec une nation étrangère, alors qu'on était en pleine guerre froide…
L'histoire commence quand, après une croisière de trois mois au large des côtes d'Afrique, le Clemenceau retourne vers Brest. Les pilotes envisagent avec une joie non contenue leur permission à terre. Peu après le départ des avions vers leur base, le pacha est averti que les stations spatiales françaises et étrangères ont repéré un objet inconnu à très haute altitude, dont le comportement est étrange. S'agit-il d'un nouveau satellite soviétique ? Quoiqu'il en soit l'alerte générale est déclenchée, et le Clemenceau rappelle ses avions, au grand dam des équipages. Les Etendard sont armés de leur bombe atomique. Quand un écho radar non identifié apparaît sur les écrans, on envoie un Etendard pour l'intercepter. Le pilote est ébloui par une immense lueur, et le système électrique de l'avion tombe en panne. Tout rentre dans l'ordre quand il s'éloigne. Sur le porte-avions, le récit du pilote ne rencontre que du scepticisme, mais quand on s'aperçoit que son appareil est radioactif, l'inquiétude s'installe. Les Russes déclarent n'avoir lancé aucun vaisseau spatial. Puis la station française de Plemeur Bodou annonce que l'engin mystérieux s'est dédoublé et qu'un objet plus petit se dirige vers l'ouest. Alors qu'il se rapproche de la Terre, les Soviétiques le détruisent. Les avions du Clemenceau reçoivent l'ordre de décoller. De nouveau, les instruments de bord sont sujets à des pannes. Un Etendard est désemparé, et son pilote s'éjecte. La radioactivité augmente fortement au dessus du porte-avions qui est obligé de passer au "stade zéro" qui implique la fermeture de toutes les issues, et l'arrosage des superstructures pour éliminer les retombées radioactives. Le vaisseau principal descend à la verticale du navire qui est baigné par des lueurs étranges et d'intenses vibrations. Puis, au bout de quelque temps, l'engin inconnu repart à grande vitesse vers la haute atmosphère, tout en esquivant les missiles que lui envoient les Américains et les Russes. Il disparaît enfin des écrans radar. Le pilote qui s'était éjecté a été recueilli par sous-marin russe qui rodait dans les parages. Sur le Clemenceau, c'est la fin de l'alerte et du cauchemar. L'équipage est heureux de retrouver l'air du large après avoir été confiné pendant des heures dans des locaux étanches surchauffés.
La scène où le porte avions passe en "stade zéro", fut tournée en fait sur le Foch (R99). L'aspersion des superstructures et des antennes radar par de l'eau de mer n'étant guère recommandée, on préféra la faire subir à un bâtiment qui allait entrer en période d'indisponibilité. Au début du film, l'atterrissage des Etendard fut filmé sur la BAN d'Hyères Le Palyvestre, où la 11F, comme les Alizé de la 9F, étaient alors basés. Les maisons bretonnes vues lors de l'approche ne correspondent guère aux reliefs entourant la base de "Brest/Hyères"… On remarquera les scènes d'appontage, les pilotes étant guidés par le "miroir" (des projecteurs de couleurs) situé à bâbord, mais aussi par l'officier d'appontage qui leur donne des indications par radio, ses deux assistants vérifiant que l'avion se présente tout sorti (train, volets, crosse). Quand les systèmes du porte-avions sont perturbés par l'engin spatial, on revient aux bonnes vieilles méthodes et l'officier d'appontage reprend ses raquettes, comme à l'époque des hélices.
Si la réalisation technique du film est irréprochable, on ne peut s'empêcher de trouver que le "Clem" est bien seul sur la grande bleue, alors qu'un tel bâtiment ne se déplace pas sans une escorte de plusieurs unités chargés de sa protection, surtout en cas d'alerte.
En plus de nous fournir de très belles scènes aériennes filmées par Guy Tabary, ce film constitue un véritable document sur le "Clemenceau", avec des nombreuses vues du pont comme de l'intérieur ( passerelle, salle d'alerte, PC Ops., bar-fumoir, mess des officiers, mess des marins, coursives, hangars, chambre d'officier..). On assiste aussi à de nombreux appontages et catapultages (avec une grande débauche d'élingues tombant à la mer). C'est avec émotion que l'on voit ce superbe bâtiment en pleine jeunesse, avant qu'il ne devienne un bateau fantôme traqué sur les mers par des hordes d'écologistes en tout genre, dont l'acharnement laisse songeur…
Le sous-marin soviétique "Kockmok" (Cosmos), n'était autre que "La Galatée" (S646), un sous-marin d'attaque de huit cent soixante neuf tonnes du type "Daphné", portant l'étoile rouge. On notera que le film s'attache à montrer des marins soviétiques très compréhensifs (alors qu'un Etendard n'a pas hésité à leur envoyer des coups de semonce), pleins d'égards pour leurs ennemis potentiels, les capitalistes français. Le pilote de l'hélicoptère du "Clem" va même jusqu'à protester quand on soupçonne l'engin non identifié d'être soviétique…
La première du film eut lieu le 20 janvier 1965, à Toulon, au cinéma Gaumont. Ce film ne remporta aucun succès en France, pays cartésien où les histoires de soucoupes volantes et d'extra terrestres ne deviendront à la mode que trente ans plus tard ! La réalisation souffrait à l'évidence du contrôle trop étroit exercé par l'Etat-Major de la Marine. Enfin, le coté un peu trop technique du film dépassait la compréhension du spectateur non averti.Le film fut retiré de l'affiche au bout d'une semaine d'exploitation. Par contre, il fut apprécié ailleurs, en Italie, en Espagne, au Japon (le pays de l'épouse de Ciampi), en URSS.
En guise de remerciement pour son gracieux concours, la Marine reçut de Gaumont un copie du film, destinée à être projetée dans les unités, ou lors d'opérations de relations publiques. Il aurait été de bon ton d'en éditer des copies destinées au grand public, lors du désarmement du "Clem" en 1997…"Le Ciel sur la Tête" fut diffusé plusieurs fois à la télévision française (il y a très longtemps…), où il reçut un meilleur accueil que dans les salles obscures. Mais depuis, les chaînes télé préfèrent nous passer chaque année "Nimitz retour vers l'enfer" (1980) dont les scénaristes se sont très certainement inspiré du film de Ciampi.
Les avions du film :
La flottille fictive 13F du film n'est équipée que deux types d'appareils : des Breguet 1050 Alizé (lutte anti sous-marine) de la flottille 9F, et des Dassault Etendard IVM (chasse/bombardement) de la flottille 11F. On peut apercevoir leurs insignes sur les gros plans. Les Etendard sont munis de deux bidons de 625 litres sous les ailes, dont l'un peint en rouge figure une bombe atomique (une bombe "bidon" en somme..). Rappelons que l'Etendard IV n'avait pas de capacité nucléaire. On le voit aussi équipé de missiles air-air américains AIM-9B Sidewinder. L'Aéronavale ne recevra ses premiers Vought F8E (FN) Crusader qu'en avril 1965, l'Etendard assurant la couverture du porte-avions en attendant. Les Alizé sont armés de roquettes.
L'hélicoptère de secours ("pedro") est un SA 316B Alouette III. Ses pilotes portent un casque Socapex 403 H4, une copie sous licence du Gentex H4 de l'US Navy, alors que les pilotes d'Alizé et d'Etendard, portent un casque Gueneau type 313 M1.
Lors de la mobilisation internationale, des documentaires montrent le décollage d'un Boeing B-52, puis toute une panoplie de missiles américains; missiles sol-air Boeing CIM-10B Bomarc, MIM-14 Nike Hercules; ICBM : LGM-30 Minuteman, Thor, SM-68 Titan…
Enfin, les avions du "Clem" interceptent un Boeing 707 d'Air France, vu de loin.
Christian Santoir
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