Année : 1982
Pays: France
Genre: comédie
Durée : 1 h 50 min.
Réalisateur : Gérard OURY
Scénario : Gérard OURY, Danièle THOMPSON
Acteurs principaux :
Jean-Paul BELMONDO (Jo Cavalier), Marie-France PISIER (Gaby Delcourt), Rachid FERRACH (Simon Rosenblum), Frank HOFFMANN (Gunther von Beckman), Günter MEISNER (Adolf Hitler/Angela Hitler), Benno STERZENBACH (Major Aschbach), Yves PIGNOT (Emile).
Musique : Vladimir COSMA
Photographie : Xaver SCHWARZENBERGER
Producteur : Alain POIRÉ
Compagnie productrice : Gaumont International
- - Bücker Jungmann/ CASA 1131E, F-AZBZ
- - Fokker Dr.1, réplique
- - Noorduyn Norseman C-64A-ND, F-AZBN
- - RAF SE.5, F-AZCY et F-AZCN, répliques
Notre avis :
Certains réalisateurs français traitant de la dernière guerre mondiale ou du nazisme, estimant sans doute qu'on avait assez versé de larmes sur ces tragiques évènements, avaient pris le parti d'en rire... Il est vrai que la France n'avait guère brillé dans cette période qui compte parmi les plus sombres de son histoire. "L'as des as", comme "La grande vadrouille" ou la trilogie de "La septième compagnie", est un film comique sur fond de tragédie. Le titre rappelle le surnom que l'on donna à l'as de la Grande Guerre, René Fonck (75 victoires officielles). Sa fille Marie-Anne Fonck écrivit à Belmondo pour lui signaler qu'attribuer ce surnom à un comique, était un manque de tact...Ce fut aussi le titre d'un film de Walter Ruben ("Ace of aces") en 1933. Mais ici, l'as des as a pour seul objectif, non pas de tuer du "boche", mais de sauver une famille juive des griffes de la Gestapo, lors des Olympiades de 1936 à Berlin...
Pendant la Grande Guerre, au dessus du front, l'as français Jo Cavalier affronte un pilote allemand, Gunther von Beckman. De niveau égal, ils finissent par s'abattre mutuellement et se retrouvent en plein no man's land. Ils poursuivent leur lutte avec leurs poings ! Mais des tirs d'artillerie interrompent leur duel. Vingt ans plus tard, Jo, qui est un boxeur professionnel, est devenu l'entraîneur de l'équipe de France qui doit participer aux Jeux Olympiques de Berlin. Dans le train, qui les emmène en Allemagne, Jo rencontre un petit garçon juif, admirateur des as de la première guerre mondiale, Simon Rosenblum, et une journaliste, Gaby Delcourt. A la gare, personne n'est là pour accueillir le jeune garçon et c'est Jo qui se charge de l'emmener chez ses grand parents qui sont libraires. Arrivé sur place, il constate que la Gestapo est en train de perquisitionner la boutique ! Un peu plus tard, il retrouve la famille Rosenblum qui se cache. Il ne trouve rien de mieux que de la loger à l'hôtel où son équipe olympique est descendue. Gaby y loge également et Jo peut ainsi lui faire une cour assidue. Juste avant la cérémonie d'ouverture des jeux, il retrouve son ancien adversaire et ami, Gunther, officier dans la Lufwaffe. Il lui emprunte son automobile pour évacuer les Rosenblum vers l'Autriche. Peu avant la frontière, la famille est arrêtée (la grand mère a demandé dans un restaurant, si les saucisses étaient kasher…), seul Simon ayant pu s'échapper. Il téléphone à Gaby qui informe Jo. C'est Gunther qui va emmener Jo en avion auprès de Simon qui est en Bavière. Le lendemain, Jo et Simon sont tous les deux arrêtés à leur tour par un barrage de police et emmenés dans un commissariat où ils retrouvent les Rosenblum. Gunther intervient pour faire libérer Jo qui ne veut pas se séparer de la famille juive. En prenant Gunther comme otage (consentant), il parvient à les faire échapper en voiture. Mais suite à une erreur d'orientation, ils se retrouvent tous, par hasard, dans le nid d'aigle d'Hitler ! Les Rosenblum sont pris, par la sœur d'Hitler, Angela, pour des musiciens. Jo retrouve Gunther venu assister à une conférence d'état major et Gaby qui doit interviewer le führer. Gunther l'aide à emprunter la voiture de Hitler avec laquelle les Rosenblum et Gaby peuvent s'enfuir vers l'Autriche. Hitler et les SS partent à leur poursuite, mais leur voiture dérape sans un virage et finit dans une mare. La famille juive peut enfin entrer en Autriche.
Remarquons que les Rosenblum ne sont par sortis d'affaires, car deux ans plus tard, l'Autriche sera annexée par les nazis (mars 1938). Ce film, commencé un peu comme "Dawn Patrol" (1930), se termine en bouffonnerie. Malgré son titre, il ne comporte que onze minutes de scènes aériennes tournées à la Ferté-Alais, chez Jean Salis.
"L'as des as" remporta un immense succès auprès du public français malgré une critique des plus tièdes. Celle ci reprochait au film son coté essentiellement commercial et, encore plus, le fait qu'il renvoyait aux Français l'image qui se plaisaient à avoir d'eux mêmes. Oubliée, la passivité du gouvernement français face à la montée du nazisme, sans parler de la suite ! Le film sortit deux mois après l'attentat de la rue des Rosiers à Paris (9 août 1982) qui rappelait brutalement aux Français que l'anti-antisémitisme était toujours d'actualité. Bref, cette sorte d' « Asteryx chez les Nazis » flattait le Gaulois et cela marcha. Sinon, Belmondo y est égal à lui même dans son rôle de guignol cinématographique (ce n'est pas celui-ci que nous préférons). A voir pour la collection d'avions de Jean Salis.
Les avions du film :
Jeans Salis fut chargé de construire deux biplans, genre RAF SE.5 et un triplan, genre Fokker Dr.1. Six mois et 4000 heures de travail plus tard, les trois avions volaient. Le triplan avait la particularité de voler aussi avec deux ou une seule aile ! Dans le dogfight avec Jo Cavalier, le Fokker perd deux de ses ailes, les mats d'ailes ayant été cisaillés par les rafales bien ajustées de Jo. Mais sur le vrai Fokker Dr.1 ces mats ne tenaient pas les ailes et avaient été ajoutés pour rassurer les pilotes; le prototype n'en comportait pas et l'avion pouvait très bien voler sans...Dans le dogfight final de "La kermesse des aigles" (1975), un Dr.1 était déjà descendu de la sorte. La plupart des vues sont filmées avec un autre Fokker Dr.1 (F-AZAQ) construit par Jean Salis en 1977, pour la série télé "Les faucheurs de marguerite" ("Le temps des as", volume 2, 1978). A la place des habituels Spandau, l'appareil est armé de deux mitrailleuses bizarres avec chargeurs à "camemberts"; ce sont des armes françaises, des MAC 31 (Reibel) de tourelle (cal.7.5 mm), transformées pour les faire ressembler (vaguement) à des Spandau (alimentées par bandes) : positionnement sur le côté, suppression de la poignée revolver, ajout d'un radiateur ajouré autour du canon... Le Dr.1 apparaît ici avec une décoration assez bien reproduite le faisant ressembler à un appareil du début de 1918.
Les deux répliques de « RAF. SE.5 » (F-AZCY et F-AZCN) sont basées sur des cellules de Stampe & Vertongen SV4, équipées de moteur Lycoming avec de fausses culasses débordant du capot moteur. Un SE.5 fut aménagé en biplace; il était piloté par Jean Salis, installé devant Belmondo et caché sous les mitrailleuses ! Celles ci sont à peu près du même modèle que celle du Fokker, des MAC 31 mais avec un radiateur non ajouré, façon Lewis Mk.I, qui remplacent la Vickers de capot dont était équipé le vrai SE.5. Mais le gros problème avec cet avion, c'est que la chasse française ne fut jamais équipée de SE.5...
Les victoires peintes sur le fuselage des appareils allemand et français, sont anachroniques; ce genre d 'inscription ne sera à la mode qu'en 1940-1945.
Gunther emmène Jo dans son Bücker Jungmann décoré comme un Focke Wulf de la seconde guerre mondiale (insigne de Gruppen Komandeur, insigne du 1/JG1 sur la dérive...); cet avion fabriqué en Espagne sous licence était un CASA 1131 E (F-AZBZ) appartenant au regretté Pierre Dague. En l'air, il devient un vrai Bücker Bü.131 Jungmann (D-AZBU, en réalité F-AZBU, ex F-BOHF) acheté par Jean Salis en Suisse, en 1973 (A-70, HB-UTS). On ne comprend pas très bien pourquoi, à peine décollé, Jo se retrouve debout dans le cockpit, puis assis sur le fuselage, si ce n'est pour faire l'intéressant !
A l'aéroport de Münich/La Ferté, Gunther et Gaby descendent d'un avion canadien, un Noorduyn Norseman C-64A-ND (D-ANBZ, en réalité F-AZBN) avec l'inscription « L-H » sur la dérive (pour Luft Hansa ?), à la place de la croix gammée qui aurait dû s'y trouver. Ce Norseman (c/n 774) était un ancien appareil de l'USAAF (s/n 44-70509). Après être passé de mains en mains, en Italie (I-AIAK), en Espagne (EC-ANO) et au Maroc (CN-TEE), il fut acquis par Salis en 1981 pour la série « Les faucheurs de marguerites » (volume 4, 1982) où il conserve la même décoration (blanc avec filet rouge). En janvier 2004, il a été cédé à la fondation Noorduyn. Il est en cours de restauration à l'Aviodrome Museum de Leystad (Hollande), Noorduyn étant d'origine néerlandaise.
En arrière plan, on peut apercevoir plusieurs avions de la collection de Jean Salis, en 1982 : Bücker Jungmeister (F-BOHK), Morane Saulnier MS.505 Criquet, Morane Saulnier MS.138 (F-AZAJ), Salmson D6 T2 « Cricri », Pilatus P.2 (F-AZCE, démonté en 2006), Stearman PT-17 (F-AZXT), Dassault Flamant MD-311 (c/n 291, F-AZCB). A part le Bücker, tous ces avions avaient bien peu de chance de se trouver sur un terrain allemand en 1936 !
Christian Santoir
*Film disponible sur amazon.fr
Enregistrer un commentaire