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FLYBOYS

FLYBOYS

 

Année: 2006        
Pays : USA
Durée: 2h 19 min
Genre : guerre
Couleur

Réalisateur : Tony BILL

Scénario : Phil SEARS, Blake T. EVANS, David S. WARD

Principaux acteurs : 

James Franco (Blaine Rawlings), Jean Reno (Capitaine Thenault)  Jennifer DECKER (Lucienne), Martin HENDERSON (Red Cassidy), Augustin Legrand (Lieutenant Giroux), Philip Winchester (William Jensen), Todd Boyce (Mr. Jensen) Michael Jibson (Lyle Porter), Ruth Bradley (Laura), Abdul Salis (Eugene Skinner),  Tyler Labine (Briggs Lowry), David Ellison (Eddie Beagle).

Photo: Henry BRAHAM
Musique : Trevor RABIN
Coordinateur des scènes aériennes : Ray HANNA
Producteurs: Dean DEVLIN, Marc FRYDMAN

Avions :

  • - Blériot XI
  • - Fokker Dr1, répliques
  • - Nieuport 17, répliques
  • - Sopwith 1 1/2 Strutter, réplique 

 

Notre avis :

Malgré un titre anodin, Flyboys  est un film sur la première escadrille constituée de pilotes américains ayant combattu lors de la première guerre mondiale, sous les couleurs françaises. Ce n’est pas le premier film à traiter de ce sujet et on se rappelle du film de William Wellman « Lafayette escadrille » sorti en 1958 ; ce film qui devait, au départ, montrer le sacrifice des jeunes pilotes américains, fut transformé par la Warner en une histoire d’amour sur fond de guerre, au grand dam du réalisateur ! Il faut remonter avant la seconde guerre mondiale pour trouver des films sur les pilotes américains en France, sous l’uniforme français dans « Hell in the heavens » (1934), ou sous l’uniforme américain dans « Wings » du même Wellman (1930), et « Ace of aces » (1933) de Walter Ruben. Suite au fiasco de « Lafayette escadrille », on attendait un film susceptible de remettre les pendules à l’heure et de traiter réellement le problème de ces jeunes gens venus de leur plein gré d’un pays neutre et riche, combattre aux cotés des Alliés dans une guerre particulièrement horrible, même d’après nos critères actuels.

L’histoire commence au début de 1916. De jeunes américains d’horizons sociaux divers (un fils de famille, un homme ruiné, un boxeur, un homme recherché par la police…) débarquent en France pour se retrouver dans le camp d’instruction de Verdun, sous un uniforme d’aviateur. Après avoir été accueillis par le capitaine Thénault, ils commencent leur instruction. Une fois "lâchés", il s’entraînent au tir et reçoivent des cours de tactique. Ils finissent par partir pour leur première mission sous le commandement d’un ancien, Red Cassidy, un homme usé par la guerre. Une idylle se noue entre Rawlings et une jeune française, Lucienne. Les jeunes pilotes doivent affronter des allemands particulièrement dangereux dont certains peuvent se montrer chevaleresques à l’occasion. Premières victoires, premières pertes. Les missions se succèdent dans leur diversité : chasse libre, escorte de bombardiers, attaque d’un Zeppelin. Cassidy finit par se faire descendre, et c’est le jeune Rawlings dont les qualités se sont révélées, qui devient le leader de l’escadrille à la tête de chef sioux.

Le film s’attache donc à décrire quatre ou cinq personnages censés constituer un échantillon représentatif des volontaires américains ; un riche, un pauvre, un croyant, un noir, un poltron, un guerrier, individus dont ne connaît pas toujours les motivations profondes. En fait la plupart sont plus ou moins rejetés par leur pays ou leur famille et sont venus en France se refaire une « santé », sans imaginer dans quelle aventure mortelle ils se sont engagés.Du moins telle est l’approche du film qui a essayé d’amalgamer un grand nombre de faits et de personnages pour traiter d’un coup toute l’histoire d’une escadrille, de sa création (18 avril 1916) jusqu’à l’entrée en guerre des Etats-Unis (avril 1917) ou peu après.

Rappelons tout d’abord que l’escadrille La Fayette ne s’est appelée ainsi que le 2 décembre 1916. Elle a commencé par s’appeler « l’escadrille américaine N124 », puis suite aux protestations de l’Allemagne, « l’escadrille des volontaires N124 ». Son insigne fut d’abord la tête de chef séminole dessiné par un mécanicien français, puis une tête de Sioux dessinée par un pilote américain, en février 1917. Avant la création de cette escadrille, il y avait déjà des pilotes américains dans les escadrilles françaises, et notamment, les trois fondateurs de l’escadrille : Norman Prince, William Thaw et Elliott Cowdin. On se reportera au livre de Carroll D. Winslow « With the french flying corps » (1917), pour un témoignage de première main sur ces premiers pilotes américains incorporés dans les unités françaises. Au début, l’escadrille compta trente huit pilotes américains et cinq officiers français, dont Nungesser (juillet 1916) qu’on devait retrouver après la guerre aux USA où il tourna un film.

Après une traversée en bateau (mais pas avec l’"Aquitania" qui cessa son service de passagers dès août 1914), et une fois arrivée à Paris, la nouvelle recrue était prise en charge par les services du Dr. Gros, le directeur de l’hôpital américain de Neuilly qui s’occupait également de tous les volontaires américains, regroupés dans le Lafayette Flying Corps, mais dispersés entre différentes escadrilles françaises, dont l’escadrille La Fayette. S’il était physiquement apte, le futur pilote allait au Centre de Recrutement signer un engagement dans la Légion étrangère et de là, il était acheminé au dépôt de Dijon pour recevoir son équipement et une affectation vers une école de pilotage. Cette dernière n’était pas située au front comme dans le film, mais à l’arrière, près de Paris (Buc) et surtout dans le Berry, à Avord (Bourges), Issoudun ou Châteauroux. Puis venait le perfectionnement à Pau et à Cazaux (tir) et enfin l’affectation au G.D.E. (Groupe des Divisons d’Entraînement) du Plessis Belleville. De là, il était affecté au front, dans la chasse, l’observation ou le bombardement. Tout cela est assez bien raconté dans le film de W. Wellman.

Pendant la période du film (avril 1916-avril 1917), l’escadrille La Fayette occupa plusieurs aérodromes (et non un seul, et jamais à Verdun) Luxeuil (dans le secteur des Vosges), Bar le Duc (secteur de Verdun), Cachy, St Juste en Chaussée et Ham (dans la Somme). Le village de Jametz (confondu sur la carte avec la ville de Metz) est cité à plusieurs reprises dans le film ; en mars 1916, c’était le terrain d’un certain Oswald Boelcke, le père de l’aviation de chasse.

Si le recrutement était varié, la majorité des pilotes venaient de l’est des Etats-Unis et la majorité provenait de familles aisées, voire très riches, et sortait des meilleurs universités (Yale, Princeton, Darmouth ). L’escadrille passait d’ailleurs pour un club de millionnaires issus de lignées de banquiers et de gros industriels, comme Thaw, Prince, Cowdin, Drexel, Turnure; à ces hommes riches, s’ajoutaient des pilotes professionnels, des sportifs de haut niveau, des hommes d’affaires. Les mécaniciens, les chauffeurs, les ouvriers, les aventuriers étaient minoritaires, bien qu’on les remarquât en premier. L’échantillon social du film n’est donc pas correct. Mais Ils avaient tous un point commun : la boisson. On buvait sec à l’escadrille et le capitaine Thénaut avait interdit aux pilotes de voler le jour de leur retour de permission pour éviter les incidents de vol liés à l’alcool...

Dans le film, on a l’impression que la capitaine Thénaut (incarné par un Jean Réno très mal dirigé) et son adjoint (dans la réalité le lieutenant Alfred de Laage de Meux qui parlait parfaitement l’Anglais) pilotaient des bureaux, alors que tous les deux participaient aux combats. Le personnage de Cassidy est directement inspiré de l’as de l’escadrille, le Franco- américain Gervais Raoul Lufbery, né à Clermont-Ferrand, d’une mère française. Un homme secret, qui vivait pour combattre et de préférence, en solitaire. Avec Thaw, il fut le seul américain a être nommé officier par les Français. Le lion Whiskey n’était pas sa mascotte personnelle mais celle de l’escadrille, de même que la lionne Soda qui arriva plus tard, en mars 1917. Il y eut également des chiens.

L’histoire d’amour qui occupe une bonne partie du film fait naturellement penser à celle du film de Wellman, et n’apporte pas beaucoup à l’histoire d’ensemble. Tout au plus, permet-elle un coup d’oeil sur la condition des populations du Nord de la France, à proximité du front. Mais un film comme « Lilac time » (1934) en faisait autant. Le plus étonnant est de voir Rawlings utiliser un avion pour évacuer sa copine et ses neveux, et encore plus, de voir le capitaine Thenault passer l’ éponge ! Un tel fait n’a jamais eu lieu, mais il est vrai que l’indiscipline était, avec la boisson, le gros problème de l’escadrille. L’indiscipline régnait dans les airs (le film n’en parle pas) comme au sol. Le capitaine Thénault décrira l’attitude suffisante de ses hommes en les imitant : « Nous sommes là, nous sommes des têtes brûlées et nous n’avons pas besoin de la discipline des Français ! ». Face à ce comportement, les Français laissaient faire tant que cela ne dépassait pas certaines bornes. Les Américains étaient des volontaires venant d’un pays ami avec lequel, la France ne voulait pas se fâcher, et dont elle attendait même beaucoup. Aussi les pilotes en profitaient-ils. Touchant des soldes bien supérieures à celles de leurs camarades français, et des primes à chaque décoration reçue (3300 euros pour la Légion d’Honneur) ou avion abattu (2200 euros), grâce aux largesses de messieurs William K. Vanderbilt et Pierpont Morgan, ils faisaient figure d’enfants gâtés. Mais L’escadrille n’avait pas ses quartiers dans un château, tout au plus une villa, comme à Luxeuil. Le plus souvent, il s’agissait de baraques Adrian et de tentes. Dés sa création, l’escadrille américaine fut la coqueluche du tout Paris et de nombreux articles de journaux furent écrits à leur sujet. Une équipe de cinéma tourna même un bref documentaire sur ces pilotes qui étaient enviés par beaucoup. Un des fondateurs de l’unité, Cowdin faillit être accusé de désertion suite à des absences prolongées non autorisées. Le capitaine Thénaut préféra le libérer pour « raison de santé », un prétexte commode ; il quitta l’escadrille en octobre 1916.

Le personnage du pilote noir est authentique bien qu’il ne caractérise vraiment pas l’escadrille. Il a été placé là, peut être pour réparer l’injustice dont il fut la victime. Ce pilote qui fut un des premiers noirs à piloter et le premier à être pilote de chasse, est Eugène Bullard. Il y avait d’autres noirs dans les escadrilles françaises, mais comme observateurs ou mitrailleurs. Ainsi en 1915, Norman Prince avait un mitrailleur noir quand il était à la VB 113. Bullard était effectivement un boxeur professionnel venu en France comme bien d’autres noirs américains fuyant le racisme pesant de leur pays. Au début de la guerre, il s’engagea dans la Légion étrangère avec d’autres noirs américains. Il y rencontra Edmond Genet, un futur pilote de l’escadrille La Fayette, avec lequel il se lia d’amitié. Blessé en mars 1916, il reçut la Croix de guerre. Comme ses blessures le gênaient pour marcher, il postula pour l’aviation et fut accepté. Après son instruction où il eut de bons résultats, il obtint son brevet d’aviateur militaire en août 1917. Il servit dans la SPA 93 et la SPA 85, entre août et novembre 1917. Bullard ne fit donc jamais parti de l’escadrille La Fayette et ne servit qu’avec les Français. En novembre 1917, le caporal Bullard se disputa avec un officier et ils en virent aux mains. En temps de guerre, frapper un officier est considéré comme un acte grave. Il fut menacé d’emprisonnement, mais finit la guerre dans l’infanterie. Le Dr Gros, le directeur du Lafayette Flying corps, prit prétexte de ce fait pour se débarrasser de ce « nuage noir », comme il l’appelait, et l’exclure de l’armée américaine. Notons que Lufbery lui-même, fit dix jours de prison ferme pour avoir frapper un contrôleur dans un train et qu’il ne fut pas exclu... Après la guerre, Bullard ne rentra pas aux Etats-Unis, mais resta à Paris, où il repris son métier de boxeur ; il fut aussi musicien et patron d’un night-club. Il se maria à une Française dont il eut trois enfants. En 1939, il se rengagea dans l’armée française mais partit aux USA lors de l’invasion de la France. Là bas, il végéta et finit comme liftier au Rockefeller center. La France lui décerna la Légion d’Honneur en 1959. Il mourut à New-York en 1967.

Certains détails ont été empruntés à des films antérieurs. Les avions allemands tout rouge font inévitablement penser au « cirque » de von Richthofen et à son chef, le célèbre baron, un ennemi chevaleresque, comme dans le film « Von Richthofen and Brown ». Par contre, le méchant, le tueur, pilote un avion noir comme von Bruen dans « Hell’s angels ». Les pilotes, à chaque victoire, boivent à la « bouteille de la mort » comme dans « Hell in the heavens ». Cette bouteille de vieux bourbon avait été offerte par le frère de Kiffin Rockwell qui remporta la première victoire de l’escadrille. Lufbery en but au moins la moitié ! La jeune française apprenant l’anglais toute seule, est la sœur campagnarde de la citadine Renée de « Lafayette escadrille ». Le pilote allemand qui mitraille au sol l’américain descendu est tout droit sorti de « Wings » (1927). Quant au Zeppelin, c’est le L32, comme dans « Hell’ angels » et comme dans ce film, il finit percuté par un avion. La scène ou Rawlings vient à l’aide de son équipier qui s’est posé dans no man’s land rappelle inévitablement « Dawn patrol ». Le jeu de cache cache au ras des arbres n’est qu’un remake en images 3D de la même scène de « The Blue Max », cette dernière étant faite avec de vrais avions…

En définitive, « Flyboys » traite le problème des premiers pilotes de chasse américains de façon très superficielle, et le jeune cow boy Rawlings ressemble fort à Thad Walker de « Lafayette escadrille ». On n’apprend rien de la véritable escadrille La Fayette, de l’ambiance qui y régnait, des dissensions très fortes en son sein qui se poursuivirent même après la guerre. Tout est « clean » et politiquement correct. Pourtant, ce groupe de trente huit hommes ne manquaient pas de personnalités pittoresques, de héros et aussi de bons à rien, ou de couards (au moins 5 ou six sur 38) cherchant à tout prix à éviter le combat. En outre, Il n’y a aucune intensité dramatique dans ce film, ni à terre, ni dans les combats. Côté avion, ce n’est guère mieux.

 

Les avions du film:

Flyboys a principalement été tourné aux Studios Elstree Film and Television de Borehamwood dans le Hertfordshire en Angleterre. Les prises de vue extérieures ont, quant à elles, été réalisées sur la base de la Royal Air Force à Halton et sur le terrain de manœuvre de l’armée britannique de Stanford (East Anglia).

L’escadrille 124 fut équipée de plusieurs types de Nieuport : 11, 12, 16, 17, 23, 27 et 28. En juin 1917, elle reçut ses premiers SPAD VII et devint la SPA 124. Dans le film on ne voit que des Nieuport 17. Le film utilisa au moins six répliques. 

Un de ces avions, vint de la collection de Kermit Weeks en Floride. Il fut restauré et remit en condition de vol. Un autre appartenait à John Day. Quatre autres répliques furent construites par Robert Baslee, de Holden, (Missouri) qui construit des répliques d’avions anciens, en utilisant la technique des ULM. Ces avions très légers, munis de moteurs de Wolkswagen, furent construits en cinquante deux jours. Ils faillirent être soufflés au décollage, par l’hélicoptère filmant la scène ! Ces Nieuport ULM furent finalement interdits de vol. Six autres Nieuport 17 furent construits en République tchèque pour les vues au sol. Ils étaient équipés de moteurs électriques faisant tourner les hélices, et d’échappements crachant de la fumée pour compléter l’illusion. Seul problème non résolu, le moteur rotatif qui ne tourne pas, les cylindres restant immobiles. On remarque que le pare-brise des Nieuport est mal reproduit ; il n’était pas fixé sur les montants en V inversé de la cabane.

La décoration de ces avions est à peu près correcte, si ce n’est que les marques individuelles (qui étaient le plus souvent des initiales : RL pour Lufbery, et non une tête d’aigle) correspondent parfois à des marques d’escadrille. On remarque ainsi la guêpe de la SPA 89 que l’on retrouve d’ailleurs dans « Dawn patrol », et le casque de chevalier de l’escadrille 15.

Autre avion français vu au milieu des Nieuport au sol, un Blériot XI qui était un avion d’école à l’époque et qui provient de la Shuttleworth collection. Il en est de même du magnifique Bristol F2, vu au sol au début du film où on aperçoit également, très furtivement, une réplique de SE5. Ces deux appareils ne furent mis en service, en France, qu’à la fin ou après la période couverte par le film, soit respectivement en mars 1916, et en juin 1917. Le seul avion anglais qui vole est une réplique de Sopwith 1 1/2 Strutter appartenant à Ken Kellett qui travaille pour Kermit Weeks. Encore cet avion ne vole–t-il pas très haut. Construit en 1992, il était en vente au Ryder’s Replica Fighter Museum de Guntersville, (AL). Il n’avait jamais volé. Le tournage utilisa également une autre réplique de Strutter pour les vues au sol. Si cet appareil est contemporain de la création de l’escadrille américaine, et arriva dans les unités du front au premier trimestre 1917, on ne voit pas pourquoi les élèves sont lâchés sur un avion portant les cocardes anglaises ! De plus, bien que construit en France à 4 200 exemplaires, cet avion ne servit jamais pour l’entraînement, mais pour l’observation et le bombardement léger.

Mais le plus gros anachronisme concerne le Fokker Dr1, mis en service à la fin de 1917. Le tournage utilisa trois répliques dont une en état de vol. A part l’avion en noir qui porte (pour une fois dans un film !) des croix latines postérieures à avril 1918  à la place des croix de fer, tous les Fokker sont en rouge ce qui est totalement inexact. Seul celui du Baron fut peint de cette façon et avec des surfaces inférieures bleu pâle. On notera que les balles (7,92 mm) des leurs mitrailleuses Maxims 08/15 font des trous gros comme des soucoupes dans la toile des Nieuport, ce qui est exagéré. Les aviateurs de l’escadrille La Fayette combattirent en 1917, des Fokker EIII, des Albatros, des LVG, des Rumpler, des Halberstadt. Mais le tournage utilisa un vrai avion allemand, un Bücker Jungmann destiné aux prises de vue des acteurs, en l’air, dans le cockpit arrière.

En plus des Nieuport et des Fokker, d’autres aéronefs ont été reconstitués en image de synthèse : un Gotha IV très réussi, (lui aussi avec des croix d’après avril 1918 !) plusieurs Handley Page 0/100 et un Zeppelin. A Luxeuil, le terrain de la N 124 était également utilisé par des bombardiers français et anglais (septembre-octobre 1916) que la 124 était chargée d’escorter. Mais il ne s’agissait pas d’Handley-Page qui ne firent leurs premières mission de bombardement qu’à partir du printemps 1917. Quant au Zeppelin, rappelons tout d’abord, que ces dirigeables ne bombardaient que de nuit pour des raisons de sécurité évidente. En outre, ils n’étaient pas accompagnés de chasseurs, plus rapides. Le film nous montre plutôt une attaque de B-17, genre Memphis Belle ! Un bon point pour le poste de tir supérieur dont le L 32 était équipé, mais un mauvais pour l’homme qui court sur le dos du dirigeable, le vent relatif (au moins 110 km /heure), aurait eu toutes les chances de le faire tomber dans le vide. Le L 32 était un dirigeable de la Marine qui fut abattu par un chasseur anglais alors qu’il bombardait Londres avec deux autres Zeppelins, dans la nuit du 23 septembre 1916. Le film aurait pu nous montrer une attaque avec des fusées Leprieur dont étaient équipés les Nieuport de la N124 à Verdun, pour abattre les Drachen, les ballons d’observation allemands. Les traînée des fusées auraient pourtant fait de belles images !

Au départ, tout avait été fait pour nous montrer des répliques volantes devant reconstituer les combats aériens de la première guerre mondiale. Seules, certaines scènes (comme les crashs, les explosions) devaient être reconstituées en images. Finalement, dès qu’un avion quitte le sol c’est de l’image de synthèse. Le tournage employa plus de cent techniciens spécialistes de l’imagerie sur ordinateur, contre…six cascadeurs. Or l’image de synthèse a encore du progrès à faire ; ses contours sont flous, les mouvements des avions trop lents ou trop rapides, et les couleurs un peu trop contrastées. Qu’on compare, dans le même film, les vols du Strutter avec ceux des Nieuport. C’est le jour et la nuit ! En outre, il aurait fallu que les concepteurs passent leur qualification sur Nieuport et Fokker. Les avions de la grande guerre explosaient rarement en vol quand ils étaient touchés. Ils ne pouvaient se permettre certaines manoeuvres vues dans le film, sans perdre leurs ailes, désentoiler leurs plans ou décrocher et partir dans une vrille irrécupérable. Dans les virages à grande inclinaison, on voit les gouvernails tournés dans le sens du virage, alors que cela devrait être l’inverse, le gouvernail devenant la gouverne de profondeur, et vice versa.

La réalisateur annonça que l’imagerie ne serait utilisée qu’en dernière extrémité et qu’on ne ferait pas la différence entre image et réalité. En fait, tout cela est faux. Si dans les dogfights et la scène de l’attaque du Gotha, l’image fait parfois illusion, et si certains détails (les balles traçantes) sont bien rendus, la scène du Zeppelin, ne trompe personne. En outre, l’image est envahissante (25% de la durée du film). La gare bombardée à la fin du film est entièrement réalisée en images de synthèse et ça se voit beaucoup ! Les jeunes spectateurs habitués à tout voir à travers l’écran de leur ordinateur seront satisfaits, mais pas ceux qui ont vu autre chose. Car enfin la question est posée : quand s’arrête le film et où commence le dessin animé ? Avec un budget de soixante millions de dollars la production pouvait nous fournir quelque chose de moins virtuel. De nombreux avions de la première guerre mondiale (des copies) volent en Angleterre et à Old Rhinebeck, aux USA, mais on les voit rarement dans les films. Or on peut faire un très bon film avec peu d’avions, à condition que ce soit des vrais. Méfions nous des contrefaçons !

 

Christian Santoir

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