(Vol Alpha 1)
Année : 1971
Pays : Allemagne de l'est
Durée : 1 h 34 min.
Genre : Drame
Couleur
Réalisateur: János VEICZI
Scénario : János VEICZI, Wolfgang HELD
Acteurs principaux :
Alfred MÜLLER (Major Milan), Stefan LISEWSKI (capitaine Wendland),
Klaus-Peter THIELE (Lieutenant Lenz), Ingolf GORGES (Sous-lieutenant Kullas),
Peter AUST (lieutenant Herzog), Regina BEYER (Anka), Horst SCHÖN (Général
Brembach), Michail ULJANOW (Général Arkatow).
Musique : Günter HAUK
Photographie : Eberhard BORKMANN, Günter HEIMANN, Peter SÜRING
Compagnie productrice : Deutsche Film (DEFA)
Avions :
Notre avis :
La sortie d'"Anflug Alpha 1" coïncide avec la fin du "règne" du président est-allemand, Walter Ulbricht, l'édificateur du mur de Berlin, mais aussi avec le début de l'Ostpolitik du chancelier Willy Brandt qui conduira à la reconnaissance des états d'Europe de l'est par la RFA. Le 21 décembre 1972, le Traité Fondamental (Grundlagenvertrag), signé à Berlin-Est, régularisera les relations entre les deux états allemands, même si la RDA restera un allié très fidèle de l'URSS, jusque dans les années 80.
Ce film est intéressant pour l'aérocinéphile, car il fut tourné avec la participation du Jagd Geswhwader JG-9 "Heinrich Rau" (du nom d'un homme d'état est-allemand, ancien officier des Brigades Internationales, en Espagne, en 1937). Le JG-9 fut l'une des plus importantes formations aériennes est-allemandes. Il appartenait à la 3 Luftverteidigungsdivision (division de défense aérienne), dont le quartier-général était situé à Trollenhagen. Cette division avait pour mission d'assurer la défense aérienne du nord du territoire de la RDA. Fondé au printemps 1961, le JG-9 fut déployé sur l'île de Peenemünde (l'ancienne base d'essais, berceau des V-1, durant la Seconde Guerre Mondiale,). Il accueillit fréquemment des unités de l'armée de l'air tchécoslovaque et surtout polonaise, et fut jumelé au 733° IAP (régiment de chasse) des VVS soviétiques.
Jour après jour, le groupe de chasse "Heinrich Rau" s'entraîne pour protéger la paix. Sa mission, au sein des forces aériennes de la NVA (Nationale Volksarmee), est de défendre et protéger la république. Le film met en lumière les conflits survenant entre les nécessités du service et la vie privée des aviateurs dune unité basée dans le nord de l'Allemagne. Le scénario se focalise ainsi sur cinq pilotes. Le premier est le lieutenant Dieter Lenz qui a des problèmes de désorientation, alors qu'il essaie d'intercepter un jet étranger qui a pénétré dans l'espace aérien est-allemand. Il doit s'éjecter, mais il se blesse gravement en tombant dans un lac peu profond et son diagnostic est réservé. Il essaie de ne pas trop s'attacher à sa petite amie, l'étudiante Anka, qui lui reste néanmoins fidèle. Puis, il y a le sous lieutenant Jochen Kullas, qui est comme un frère pour Lenz. Il doit maintenant faire ses preuves, étant sorti quatrième de sa promotion, à l'école d'officiers. Mais depuis l'accident de Dieter, il a peur en l'air, et il doit réprimer son appréhension, craignant d'être interdit de vol. Le troisième pilote, est un chef de section, le major Thomas Milan, qui doit se résigner à rester au sol, sa visite médicale annuelle ayant révélé un problème de vue. C'est un coup dur pour lui, mais il doit occuper un poste de responsabilité, au sol. Vient ensuite, le lieutenant Roland Herzog qui est tombé amoureux d'une jeune veuve, Sigrid, qu'il demande en mariage. Mais, après la mort tragique de son mari, qui était artificier, deux ans auparavant, elle hésite à se remarier avec un autre "héros" potentiel. Pour Herzog, il est hors de question d'abandonner l'aviation. Il y a enfin, le capitaine Helmut Wendland qui est pilote dans l'escadron de Milan, mais aussi le commissaire politique de l'escadrille, un rôle qu'il prend très au sérieux. Pour lui, ses camarades ne font que leur devoir et ils doivent entièrement s'y soumettre. Ce point de vue est un fréquent sujet de discussion avec son frère. Toutes ces petites intrigues personnelles se déroulent sur fond de manœuvres interalliées (RDA, URSS, Pologne, Tchécoslovaquie), supervisées par un général soviétique, un as aux échecs. Lenz finira par marcher et sa guérison sera joyeusement fêtée par ses collègues. Quant à Herzog, il ne perdra pas espoir d'être heureux, un jour, avec Sigrid et son fils, qu'il retrouve sur une plage de la Baltique, à la fin du film.
"Anflug Alpha 1" constitue une sorte de documentaire sur la formation des pilotes est-allemands, dont on ne nous épargne aucun détail : tests médicaux, tests en centrifugeuse, exercices physiques, cours théoriques, simulateurs de vol…C'est aussi une sorte de vitrine montrant le matériel livré à la NVA par le grand frère soviétique : appareil pour s'entraîner à la manœuvre du siège éjectable, tour de contrôle mobile SKP-11 sur véhicule ZIL-130, fusées SA-2, canon de DCA automoteurs ZSU-57-2, radar P-35M, RSP-7 "Two Spot" PAR, P-12 "Spoon Rest"…
Sinon, il s'agit d'un film d'aviation classique faisant de la publicité à l'aviation militaire, comme il en fut torné plusieurs de la même veine, à l'Est, en URSS ("Menya jdut na zemle" 1976), en Tchécoslovaquie ("Pod nohama nebe" 1983) ou en Pologne ("Na niebie i na ziemi" 1974). "Anflug Alpha 1" donne un aperçu de la vie quotidienne des soldats de la NVA, lors de leur service ou dans leur cadre familial. On remarquera, au passage, la faible circulation automobile dans les rues, les privilégiés roulant en Trabant nationale, au bruit inimitable. Le film met en exergue le haut degré de préparation et l'état d'alerte permanent de la force aérienne du seul pays communiste allemand. Lors d'une visite aux Monuments aux Morts de Berlin-est (sur l'avenue Unter den Linden), on voit une citation de Lénine : "Une révolution n'est valable que si elle sait se défendre"…
Le film souligne également la collaboration avec les autres pays "frères" (Pologne, Tchécoslovaquie, URSS), pour défendre les acquis du socialisme et maintenir la paix européenne, menacée quotidiennement par les pays impérialistes, esclaves du grand Capital…On connaît ce discours, répété à longueur de films, à l'Est, durant le guerre froide.
Les avions du film :
Le principal avion du film est le MiG-21PFM qui équipait, en 1971, le JG-9. On en voit des très nombreux exemplaires au sol et quelques-uns filmés en vol, parfois avec des caméras embarquées, fixées sous le fuselage. Ces avions furent en service dans la NVA, entre 1964 et 1989. On voit ainsi les numéros : 9671, 9891, 9680, 4298, 4311, 4299… Mais ces codes sont faux, les avions militaires est-allemands ne portant que des codes à trois chiffres ! Ainsi, il semblerait que le premier chiffre (9 ou 4) ait été rajouté (pour tromper le spectateur capitaliste ?).
Lors des manœuvres, on constate que les MiG-21 ouvrent leurs parachutes freins cruciformes dès que les roues touchent le sol; on voit même un MiG-21, ouvrir son parachute alors qu'il est encore à plusieurs mètres au-dessus du sol, avec pour conséquence, un atterrissage plutôt dur, que seul le train du MiG pouvait encaisser ! Il s'agissait en fait d'une manœuvre normale destinée à réduire la distance d'atterrissage…
Les pilotes des MiG-21 portent deux types de tenues, une combinaison à pression partielle (VKK-6M) avec un casque intégral GSh-6A, pour haute altitude, et une autre, plus simple, (VK-3M) et casques ZSH-3, avec masque à oxygène, pour les altitudes jusqu'à 6000 mètres.
On a quelques vues rapides de la vraie planche de bord du chasseur, mais dans certaines scènes, notamment celle où Lenz poursuit un Lockheed Starfighter US (une maquette avec un camouflage improbable..), on nous montre (secret défense oblige) un collimateur genre PBP-1A, digne d'un Yak-1, en 1940. Le MiG-21 était équipé d'un PKI (Pritsel Kollimator Istrebiteli) plus perfectionné, avec Head Up Display.
On aperçoit également, alignés sur le tarmac, des MiG-21 dont la dérive porte les cocardes tchécoslovaques et polonaises (peut être peintes exprès pour le film), les appareils polonais portant des codes corrects à quatre chiffres (dont le "2406").
Un pilote effectue un contrôle de PSV, dans un MiG-21 biplace, un MiG-21US, avec le vrai faux numéro "(2)281".
Lors de l'exercice commun avec l'URSS, on peut observer d'autres avions allemands et soviétiques. Des parachutistes montent à bord d'Ilyushin Il-14P est-allemands, portant de vrais numéros, dont les "444" et "488". Le "444" (s/n 14 803 032), mis en service en 1958, sera réformé en 1979, quant au "488" (s/n 14 803 041), mis en service également en 1958, il fut ferraillé en 1981. D'autres troupes sont transportées dans des Antonov An-8 soviétiques, un bi turbopropulseur plutôt rare, qui ne fut pas utilisé par la NVA.
Un chasseur tout temps soviétique, un Yak 28P avec le numéro "26", sert de plastron lors d'un exercice d'interception de nuit.
Participent également à ces manœuvres des hélicoptères Mil Mi-8 "Hip" est-allemands qui équiperont la NVA jusqu'en 1990. Derrière un contrôleur, on aperçoit un Mil Mi-4 "Hound".
Enfin, à l'entrée de la base, un MiG 15 est exposé entre un SAM-2 et un radar (incomplet) P-35M.
Christian Santoir
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