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ÂA DOKI NO SAKURA

ÂA DOKI NO SAKURA

Vo. あゝ同期の桜

 (Ah, la classe des Fleurs de Cerisiers)


Année : 1967
Pays : Japon
Genre : guerre
Durée : 1 h 47 min.
Noir et blanc

Réalisateur : Sadao NAKAJIMA
Scénario : Sadao NAKAJIMA, Katsuya SUSAKI   

 Acteurs principaux :

Hiroki MATSUKATA (sous-lieutenant Shiratori), Shin'ichi CHIBA (sous-lieutenant Hanzawa),   Isao NATSUYAGI (sous-lieutenant Nanjô), Keizô KANIE (sous-lieutenant Fawa),  Kunio MURAI (sous-lieutenantYui),  Keiichirô SHIMADA (sous-lieutenant Fujii),  Mamotu SAWANOBORI (sous-lieutenant Fukushima)

 Musique : Hajime KABURAGI
Phototographie : Shingeru AKATSUKA
Compagnie productrice : Toei KYOTO       

 

Avions :

  • - Nakajima B5N2 Marine Type 97 
  • - Yokosuka K5Y1 Marine Type 93, répliques

 

 Notre avis :

 Alors que de nombreux films japonais dans les années 60 mettaient l'accent sur les failles de l'armée lors de la seconde guerre mondiale, quelques films faisaient des soldats japonais de nouveau des héros. La plupart de ces films concernaient la Marine qui est toujours représentée sous un jour beaucoup plus positif que l'Armée.

 Le titre japonais "Âa doki no sakura" se réfère aux 100 000 étudiants recrutés en octobre 1943, après avoir été rapidement diplômés. Le film commence par une bande d'actualité montrant le premier cortège de 25 000 étudiants de 77 écoles de la région de Tokyo, défilant le 21 octobre 1943, devant une foule immense qui les acclame dans le stade Meiji Jingo. Ils étaient la dernière source de main-d'œuvre d'âge militaire disponible, et faire appel à eux indiquait que l'état-major japonais avait réalisé qu'il en avait désespérément besoin, car il était en train de perdre la guerre, ce qu'ignorait le peuple.

 

Ces jeunes reçurent diverses affectations; certains finirent dans l'infanterie, derrière un canon, d'autres dans la Marine, où ils furent de nouveau répartis, jusqu'à aboutir dans des écoles de pilotage, comme montré dans le film. Cependant, avant que leur formation ne soit complète, l'aviation de la Marine décida d'adopter la stratégie kamikaze et les principaux personnages du film vont tous mourir. Ces personnages sont trois élèves pilotes, Shiratori, Hanzawa et Nanjo. Contrairement aux autres films japonais, celui-ci nous expose leur vie de famille. Les parents de Shiratori lui rendent visite à son école, de même que sa sœur Reiko qu'il présente à Hanzawa, ce qui va être à l'origine d'une romance à longue distance. Nanjo est marié sans le consentement de son père; son épouse a visiblement beaucoup de difficulté à rencontrer son mari sur sa base, même pour lui présenter leur bébé, les visites étant très réglementées. Mais on ne sait rien de leur formation universitaire. On suit les trois hommes tout au long de leur entraînement, et l'on voit que la violence physique sévissait aussi bien dans la Marine aussi bien que dans l'Armée. Les sous officiers de formation portent tous des sticks et n'hésitent pas à s'en servir, ainsi que leurs poings. Gifler ou frapper les stagiaires se poursuit même après qu'ils soient devenus officiers, au début de l'école de pilotage. Mais le principal sujet du film n'est pas la formation des pilotes, mais leur transformation en kamikazes. Dans le film, les officiers supérieurs sont convaincus qu'il n'y a pas d'autre moyen à leur disposition. Couler un bateau ennemi avec un avion et son équipage paraît comme une bonne solution. Mais, comme le montre des documentaires à la fin du film, beaucoup de kamikazes étaient abattus avant d'atteindre les navires visés. En outre, ils n'atteignaient que les superstructures provoquant des incendies et de nombreuses pertes humaines, sans pour autant les couler systématiquement. Les torpilles étaient plus efficaces.

 

Le film met surtout l'accent sur le fait que les kamikazes n'étaient pas réellement des "volontaires". Ce n'étaient pas des pilotes réguliers, voire même des pilotes volontaires, c'étaient juste de jeunes étudiants sortis de leurs classes, mis dans un avion, après une formation élémentaire et dirigés vers l'ennemi, salués par ceux qui partiront pour la prochaine mission. Certes, on leur signale que l'on ne peut les obliger à être des kamikazes, mais après, aucun n'ose se dérober. Le réalisateur montre cela, en ne filmant que des bottes qui avancent, pas des visages d'hommes venant de prendre une grave décision. Notons que pas un seul officier des écoles militaires ne se porta volontaire pour être kamikaze (les officiers diplômés de l'Ecole navale ne représentèrent que 15 % des kamikazes). Ils étaient trop convaincus de l'absurdité de cette mort. Les étudiants soldats avaient choisi de s'acquitter d'une responsabilité en tant que membres de leur société, bien que cela signifiât la mort. Mais quand la mort approchait, certains commençaient à avoir des doutes et des angoisses…

 

Comme dans les autres films de guerre japonais, on sent qu'il était plus important que ces jeunes meurent, plutôt qu'ils gagnent en mourant. Quand l'avion de Nanjo est abattu avant qu'il ait pu approcher de sa cible, et qu'il revient à la base, des hommes d'un autre groupe lui demandent de se suicider dans son baraquement, plutôt que d'attendre une autre mission où il aurait pu réussir. Les principaux personnages sont tous disposés à faire leur dernier vol, mais cela est considéré davantage comme un devoir qu'ils comprennent et acceptent, plutôt que comme un désir d'aller se faire tuer. Malgré cela, Nanjo se sent tellement coupable après son retour, qu'il écrase volontairement son prochain avion au bout de la piste, pour garantir sa mort, sans même tenter un dernier vol contre les navires américains !

 

Le titre du film fait référence aux fleurs de cerisiers (Sakura) qui ont une grande importance symbolique au Japon et l'opération Tokkotai (Force d'attaque spéciale), conçue par l'amiral Takijiro Onishi, y fut étroitement associée. Les fleurs de cerisiers furent utilisées, entre autres, pour nommer différents corps d'armée, des avions, des bombes et même les pilotes kamikazes. Onishi a transformé la fleur en chute de pétales, pour en faire la métaphore du corps des kamikazes. Sur les 2 514 kamikazes de la Marine, 648 "fleurs de cerisiers" étaient des étudiants soldats qui avaient environ 20 ans (17 ans pour les plus jeunes).

 

Le film commence en octobre 1943 et se passe, comme il est inscrit sur l'écran, sur plusieurs bases de la Marine, dans l'île d'Honsho (Maizuru, Tsuchiura) et dans le sud de l'île de Kyushu qui comptait 36 bases d'attaque spéciale en août 1945. L'histoire finit en avril 1945, sur la base de Kushira (Kyushu) où étaient stationnées les unités d'entraînement de la 10ème Flotte aérienne et qui fut une des principales bases d'où partaient les attaques suicides; 363 jeunes hommes moururent après y avoir décollé, entre mars et août 1945.

 Le film a été tourné en noir et blanc pour faciliter l'inclusion d'images extraites de documents d'époque dont certaines proviennent d'archives américaines.

 

 Les avions du film :

 Les avions utilisés par la production pour des prises de vues au sol, sont des répliques grandeur réelle, dont certaines ont des hélices qui tournent. Il n'y a que deux types d'appareils.

 Le premier aperçu est un biplan Yokosuka K5Y1 Marine Type 93 (code allié : Willow), avec lequel les cadets font leurs "premiers pas" dans le ciel, alors qu'il s'agit d'un avion d'entraînement intermédiaire et non primaire (Type 3 K2Y1). En "vol", l'avion est filmé en studio devant un écran sur lequel apparaît en retro projection le paysage survolé. Il est aussi remplacé par des maquettes de petite échelle. Il a une décoration de type "O" uniforme, avec le capot moteur noir. Les pilotes le baptisèrent "Akatongbo" ou "Libellule rouge" de par sa couleur rouge orangé.

 Le Yokosuka K5Y1 fut pris en charge par la Marine en 1934 et resta en service pendant toute la guerre et fit même partie des unités d'Attaque Spéciale (Shimbu-tai). Ces avions  en bois et en toile étaient lents mais très manœuvrant. Les radars avaient en outre de la peine à les localiser. Le dépôt de l'Aéronavale de Kasumigaura (Honshu) modifia les K5Y1 en leur permettant d'emporter une bombe de 250 kg fixée ou plus exactement boulonnée, sous le cockpit. Leurs moteurs furent également modifiés pour fonctionner à l'alcool, le carburant étant devenu rare. Certains emmenaient en plus, pour leur dernière mission, un fût d'essence placé dans le cockpit arrière !

 Le 13 juin 1945, un message du Bureau de l'Aéronautique japonais aux bases de la Marine, stipulait que "vue la situation actuelle du conflit, l'avion d'entraînement primaire Yokosuka K5Y1, sera dorénavant considéré comme un des plus importants types d'appareils utilisés comme avions suicides"…Le 8 juillet 1945, six des ces biplans attaquèrent la flotte américaine et l'un d'eux coula le destroyer USS "Callaghan" (DD-792), dernier navire allié coulé par une attaque kamikaze pendant la guerre.

 On en voit plusieurs au sol sur des documents d'époque, dont l'un porte le numéro "755". Celui de Nanjo, avec lequel il va faire un atterrissage forcé, a le numéro "432" sur le fuselage et "-732" (I-432) inscrit sur la dérive (un code sans doute faux),

 Les pilotes s'entraînent au vol de groupe, au sol, sur…des bicyclettes, comme les cadets tchécoslovaques de la RAF, dans "Dark blue world" (2001).

 Le second avion est le Nakajima B5N2 Marine Type 97 (code allié Kate), un avion torpilleur embarqué dont on voit au moins trois exemplaires. Comme la plupart des avions japonais, le B5N2 effectua des attaques suicides. Les répliques sont particulièrement bien reconstituées. Elles ne portent aucune marque à part les numéros "301" et "312" inscrits sur leur gouvernail. Ils ont une décoration bicolore de type S (vert et gris clair) avec le capot moteur noir. On note que ces avions triplaces, lors de leurs attaques suicides étaient montés par deux hommes d'équipage, la place centrale étant occupée par le navigateur/bombardier.

 Un Boeing B-29 portant un "H" dans un carré sur la dérive et "C-812" sur le fuselage apparaît sur un extrait de film largement publié. Il s'agit d'un bombardier du 345th Bomb Squadron (98th BG) basé à Yokota (Japon) qui opérait au-dessus de la Corée, en 1951-1952, et pas, au-dessus du Japon pendant la seconde guerre mondiale…

 

 Christian Santoir

  *Film disponible sur YouTube

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