NEBO MOSKVY
(Ciel de Moscou)
Année : 1944
Pays : URSS
Durée : 1 h 21 min.
Genre : guerre
Noir et blanc
Réalisation : Youli RAIZMAN
Scénario : Mikhaïl BLEIMAN, Manuel BOLCHINTSOV
Acteurs principaux :
Piotr ALEINIKOV (Lieutenant Ilya Streltsov), Nikolaï
BOGOLIOUBOV (Lieutenant Colonel Balashev), Ivan KOUZNETSOV (Lieutenant
Cherbina), Nina MAZAEVA (Zoya), Nikolaï CHAMIN, Piotr SOBOLEVSKI (Capitaine Goncharov), Evgueni NEMTCHENKO
Photographie : Evgueni ANDRIKANIS
Compagnie productrice : Mosfilm-Artkino
Avions :
- -MiG-3
- -Polikarpov I-153
- -Polikarpov I-16, en arrière-plan
- -Yak-1
Notre avis :
A la fin octobre 1941, Adolf Hitler décide d'attaquer
Moscou, avec l'intention déclarée de raser la ville ! Ce sera l'opération
"Typhon". L’offensive hitlérienne sera stoppée à 30 kilomètres de
Moscou seulement, en décembre, grâce à la résistance de l'Armée rouge qui avait
reçu le renfort des troupes sibériennes, mais aussi, à un hiver très rigoureux
auquel les Allemands n'étaient nullement préparés. Le 22 janvier, la bataille
de Moscou est gagnée par Joukov et le général Guderian est contraint à une
retraite précipitée. Ce film de Yulia Raizman, sorti après les évènements, en
1944, traite plus particulièrement de la défense aérienne de Moscou.
En septembre 1941, à Moscou, le lieutenant Ilya Streltsov,
qui vient de terminer sa formation dans une école de pilotage, va saluer sa
famille avant de partir pour le front. Il rejoint son unité, une escadrille de
chasse chargée de la protection de la capitale. Il doit d'abord se faire
accepter par les anciens. Le commandant du groupe, le lieutenant colonel
Balashev, veut savoir ce qu'il sait faire et lui assigne un chasseur biplan
démodé. Alors qu'il se livre à une séance de voltige, Ilya surprend un avion d'observation allemand et
l'abat. Son examen d'entrée est réussi et ses camardes lui donnent le surnom de
"chanceux". Il retrouve par hasard une ancienne amie d'enfance, Zoya,
qui est infirmière au petit hôpital de campagne installé sur la base. Ilya et
Zoya s'aimaient autrefois et il se montre jaloux, quand il voit que les anciens
de l'escadrille lui font la cour. Au sol, il est mal à l'aise, timide, et ne retrouve tous ses moyens qu'en l'air où
il se révèle être un chasseur hors pair. Arrive enfin le jour où on lui affecte
un avion moderne. Les alertes se succèdent et il enregistre une autre victoire.
A court de munitions, il abat un autre bombardier, en détruisant sa dérive avec
son hélice ! Quand les avions retournent à leur terrain, Ilya est porté
manquant, au grand désespoir de Zoé qui l'aime toujours. Ilya a pu se
parachuter, mais il est tombé dans un vrai champ de bataille jonché de morts et
de blindés incendiés. Il retrouve le bombardier qu'il a descendu avec les
cadavres de son équipage. Après avoir erré pendant plusieurs heures dans ce paysage
dévasté, il s'effondre. Il est recueilli par des fantassins soviétiques et il
se réveille chez lui, à Moscou, entouré par les siens. Zoya vient lui rendre
visite lors d'une permission. Un journaliste veut aussi l'interviewer, mais il
est rappelé par son unité qui a besoin de tous ses hommes. Il descend un autre
ennemi, mais quand il atterrit, la base est bombardée. Avant de repartir, il
s'assure que Zoya est indemne. Il est de nouveau abattu et peut sauter à la
verticale du terrain. Aucun autre chasseur n'étant disponible, il s'envole dans
son vieux biplan. Il abat un allemand, mais il est de nouveau touché et doit
faire un atterrissage d'urgence. Gravement blessé, il est ramené à son unité et
évacué sur un hôpital de Moscou. Lors de sa convalescence, il a le plaisir de
pouvoir faire de longues promenades dans la ville, avec Zoya. Après avoir été
décoré de l'étoile d'or des Héros de l'Union soviétique et nommé capitaine, il
revient dans son unité comme chef d'escadrille. C'est à lui d'accueillir les nouveaux.
Lors d'une nouvelle alerte, les pilotes se précipitent vers leurs appareils,
salués par Zoya qui souhaite bonne chance à Ilya. Le combat n'est pas terminé,
et dans le ciel, des nuées de chasseurs partent à l'attaque.
Ce film fait partie des films soviétiques sur la Grande
Guerre patriotique vue sous un angle dramatique, avec très peu d'éléments
comiques (la petite sœur d'Ilya, certaines scènes dans le mess..). Ici pas de
chants, de danses, mais des combats aériens de nuit avec balles traçantes et
projecteurs. Quand Ilya sort de la gare de Kazan, la caméra montre la place
Rouge, le bâtiment de la Douma, puis plus tard, le grand hôtel
"Moscou", le Bolchoï, les bords de la Moskova, bref, un échantillon
de ce qu'il faut protéger contre la barbarie nazie. Le film donne aussi un
aperçu des défenses de Moscou, transformé en place forte : mitrailleuses,
canons de 30 mm sur les toits, barrages de ballons, obstacles anti chars,
blockhaus...On remarque des soldats promenant d'énormes vessies oblongues contenant
de l'hydrogène destiné au gonflage des ballons des barrages. Pour la détection
des raids aériens, le film ne montre qu'un appareil de repérage par le son. En
réalité, dès 1940, les Soviétiques construisaient des radars fixes (RUS 1) et
mobiles (RUS 2), mais ils étaient peu performants et peu nombreux. L'URSS se
fournira par la suite auprès des Anglais et des Américains...
On voit donc que les "nazis" étaient attendus et
que Moscou aurait pu être un autre Stalingrad ou Leningrad. Il est vrai que la
Wehrmacht avait tout fait pour provoquer la résistance désespérée des
Soviétiques, en maltraitant, voire éliminant les prisonniers, en procédant à
des exécutions massives de civils (pas seulement juifs) et en considérant tout
slave comme un Untermensch.... Le dos au mur, les Russes n'avaient rien à
perdre.
Le héros passe peu de temps dans sa famille qui est
remplacée par ses camarades de combat et par le "père" de
l'escadrille, le colonel Balashev. En cinq combats aériens, le héros est abattu
trois fois, mais à chaque fois, il repart à l'attaque avec la même
fougue...Comme tout héros soviétique, on notera qu'Ilya a recours au taran, en
précipitant son avion sur la dérive de l'avion allemand; cet tactique
(suicidaire dans son application, mais pas dans son esprit) fut effectivement
assez souvent pratiquée par les pilotes russes au début du conflit, ce qui
montre l'âpreté de la lutte.
Ce film fut un des rares films soviétiques à être projeté au
États-Unis, en janvier 1945. La critique
d'outre-Atlantique trouva que c'était un film d'action au rythme rapide,
mais qui ne constituait pas un divertissement, à proprement parler; son scénario
jugé simpliste n'était destiné qu'à vanter la détermination du pilote
soviétique au combat.
Les avions du film :
Tous les combats aériens sont reconstitués en studio avec
des maquettes de MiG-3, d'I-153, de Junkers Ju-88 ou de Dornier Do.217 (le premier
avion abattu par Ilya).
Le principal avion du film est le MiG-3 dont on voit de
nombreux exemplaires (dont les n° 08, 18, 40, 41, 60, 88, 141.. à camouflage
trois tons) dont certains (n° 18, 08) participèrent au tournage de scènes au
sol. Ces avions sont aussi filmés au décollage ou lors d'atterrissages de nuit.
On peut ainsi admirer les superbes lignes de cet appareil, dignes d'un avion de
course. En juin 1941, le MiG-3 était surtout destiné à la Défense Aérienne
(PVO, ProtivoVozdushnogo Oborona) et ne composait que 33% des chasseurs
soviétiques. En décembre 1941, sa production fut arrêtée, Staline ayant décidé
que son moteur devait être attribué en priorité à l'Ilyshun Il-2 Sturmovik !
Le colonel a raison de ne pas confier un MiG-3 au jeune
Ilya, car c'était un avion à ne pas mettre en toutes les mains : mauvaise
visibilité au sol, stabilité en lacet marginale, vrille dangereuse, commandes
lourdes à faible vitesse...Il a donc fait ses preuves sur un biplan Polikarpov
I-153 qui était, lors de l'offensive allemande, toujours en dotation dans les
escadrilles et qui constituait avec les Polikarpov I-16 et même le vieux I-5,
l'essentiel du matériel de la chasse soviétique en 1941. Les camionnettes de
démarrage que l'on voit sont destinées à ces modèles équipés de moteurs en
étoile. Le MiG-3 avait un démarreur autonome ce qui permettait des décollages
plus rapides, en cas d'alerte.
Une partie du tournage eut lieu en extérieur, sur un terrain
où était basée une escadrille de MiG-3. On y voit les avions parqués à
découvert, dans une vaste plaine dénudée, ayant pour seul abri des filets de camouflage. Poste de commandement,
mess, hôpital, sont logés dans des baraques en planches, semi enterrées. En
arrière plan, on voit des Polikarpov I-16, un ou deux Yak-1, un avion avec
lequel Ilya décolle, à la fin du film.
La carcasse du Ju-88 que Ilya vient de descendre est tout à
fait authentique. Il est vrai qu'en 1944, il y en avait pléthore en URSS...On
peut voir aussi un Heinkel He-111, en train de brûler au sol.
On voit également plusieurs Tupolev TB-3, des bombardiers
utilisés uniquement la nuit.
Christian Santoir
*Film disponible sur https://ok.ru/video/
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