Rechercher dans ce blog

STARFIGHTER : L'AVION MAUDIT

STARFIGHTER : L'AVION MAUDIT

Vo. Starfighter - Sie wollten den Himmel erobern

(Starfighter-Ils voulaient dominer le ciel)

 

 

Année: 2015
Pays : Allemagne
Genre : drame
Durée : 2 h 5 min.
Couleur

Réalisateur : Miguel ALEXANDRE
Scénario : Dominik FRANKOWSKI, Kit HOPKINS, Thilo RÄSCHEISEN

Acteurs principaux :
Picco Von GROOTE (Betti Schäfer), Steve WINDOLF (Harry Schäfer), Frederick LAU (Richie Weichert), Alice DWYER (Helga Waldek), Paula KALENBERG (Evi Kranz), Christoph SCHECHINGER (Werner Kranz), Peter KREMER (Le commandant Kieser ), Lenn KUDRJAWIZKI (Stevens)

Musique : Dirk LEUPOLZ
Photographie : Jörg WIDMER
Producteurs : Dominik FRANKOWSKI, Michael SOUVIGNIER
Compagnie de production : Fokus.TV,

Avions :

  • -Lockheed F-104G c/n 683D-7040, code "21+71"
  • -Lockheed F-104G c/n 683D-7029, code "21+60"

 

Notre avis :

Ce téléfilm allemand traite, un peu à  la façon d'un documentaire, de la série d'accidents dont furent victimes les Lockheed F-104 de la Luftwaffe, dans les années 1960. La façon dont le gouvernement allemand et la Bundeswehr gérèrent le problème fut jugée suspecte par les médias, d'autant que la compagnie Lockheed était impliquée dans plusieurs scandales concernant des contrats obtenus grâce à  des pots de vin ou à  des rétro-commissions...

Comme l'indique le titre français, ce film ne fait pas de la publicité au F-104 Starfighter, alors que ce même avion fut célèbré (sans talent) par le film américain "The Starfighters" (1965), et fut l'un des acteurs principaux du film espagnol "No le busques tres pies" (1968) ou la vedette du film italien "Blue Tornado" (1991).

Notons que ce téléfilm est une sorte de remake d'un autre téléfilm, américain, "Afterburn" sorti en 1992, et qui montrait également une épouse de pilote militaire se battant contre les militaires et les politiques, pour connaître la vérité sur la mort de son mari qui s'était tué, non pas sur un F-104, mais un F-16.

L'histoire commence en juin 1962, alors que la Bundeswehr s'équipe de nouveaux avions de combat supersoniques, des F-104 Starfighter américains. Harry Shepherd et son ami Richie Weichert, sont parmi les meilleurs pilotes de la Luftwaffe et sont fascinés par ce jet ultra rapide. Mais l'avion est difficile à  maîtriser et bientôt les accidents s'accumulent. Ils sont officiellement dus à  des erreurs de pilotage. Harry, qui n'arrive pas à  être nommé capitaine, suite à  son attitude peu conforme à  la discipline militaire,  plaide pour une amélioration des conditions d'entretien des Starfighter, souvent parqués à  l'extérieur et exposés aux intempéries. Sa femme Beti est enceinte; alors qu'elle apprend qu'un nouvel accident est survenu, croyant qu'il s''agit de l'avion de son mari, elle doit être hospitalisée et perd son enfant. Harry envisage de quitter l'armée, mais, alors qu'il vient d'être, enfin, nommé capitaine, il se tue, lui aussi, lors d'un dernier vol. Beti veut absolument comprendre les causes exactes de la mort de son mari, mais ses efforts sont vains, car elle se heurte à  un mur de silence. Beti, aidée par sa meilleur amie, Helga, qui est journaliste, et d'un avocat célèbre, part en guerre contre le lobby militaro-politique. Elle envisage même d'attaquer en justice le constructeur Lockheed. Dans un premier temps, le ministre de la Défense et la Bundeswehr parviennent à  empêcher ce recours, mais quand le fils du ministre, un pilote de l'armée, se tue à  son tour dans un Starfighter, sa veuve, ainsi que toutes les autres épouses des pilotes morts en service, veulent lancer une action de groupe contre Lockheed. Le constructeur américain préfèrera payer, plutôt que d'affronter un procès destructeur pour son image...

Si la première partie de ce long téléfilm se déroule parmi les pilotes de la Luftwaffe, la seconde partie est consacrée à  la lutte de la femme de Shepherd pour obtenir la vérité sur la mort de son mari, lutte qui se passe au sol, loin des avions. En fait on retrouve, ici, un thème maintes fois traité dans les films d'aviation, celui de la femme du pilote, stressée par le métier (supposé) dangereux de son mari, qu'elle passe son temps à  attendre, et qui accuse son employeur, lorsqu'il vient à mourir (Cf. "Vol de nuit"-1933).

Le film comporte des longueurs et s'attache un peu trop à  recréer l'ambiance des années 1960 (musique, voitures, bowling, drive-in...). Par ailleurs, il suit d'assez près les faits et on constate que le réalisateur et les scénaristes connaissent bien le sujet. Ainsi, il est exact que le propre fils de l'ancien ministre de la Défense (de 1963 à 1966), von Hassel, se tua avec son F-104, mais c'était le 10/03/1970, alors que son père n'était plus ministre, mais président du Bundestag. Les différents problèmes du F-104 allemand sont également correctement évoqués.

Le film commence par un accident réel qui survint le 19 juin 1962, près de Balkhausen / Kerpen, à  l'ouest de Cologne, quand une formation de quatre F-104F qui évoluaient  lors d'une cérémonie marquant l'entrée en service du chasseur, se crashèrent tous, après avoir traversé un banc de nuage ! Trois Allemands et un Américain furent tués. Le F-104 n'était vraiment pas un appareil adapté à  la voltige. Selon l'enquête, l'accident aurait été dû à  la désorientation spatiale du leader. Suite à  cet évènement, les patrouilles acrobatiques furent bannies par la Luftwaffe. Un autre accident, évoqué dans le film, avec un pilote qui s'éjecte et qui est tué par son siège qui le frappe dans sa descente, n'arriva pas en Allemagne, mais aux USA, et à  deux reprises (le 16/09/1966 et le 08/07/1969). Il s'agissait de deux pilotes allemands à  l'entraînement, au sein du CCTW (Combat Crew Training Wing) de la base de Luke Field (AZ). Autre accident réel reproduit dans le film, celui du pilote qui s'évanouit dans son avion volant sur pilote automatique. Cela arriva le 06/12/1965, à  un pilote du JaBoG 31, son avion (DA+254) s'écrasant, non pas à  Kiruna (Suède), comme mentionné dans le film, mais près de Narvik (Norvège).

Le F-104 allemand, utilisé par la Luftwaffe mais aussi la Bundesmarine, fut affublé de différents noms, comme le "faiseur de veuves" ou le "cercueil volant", comme bien d'autres avions, dans l'histoire de l'aviation (on pourrait citer le Martin B-26 Marauder...), qui, pour la plupart, étaient des avions au pilotage délicat, qui ne pardonnaient pas les erreurs. Sur les 916 F-104G allemands produits, la Luftwaffe en perdit 298 (soit 32 %), provoquant la mort de 116 pilotes (dont 8 Américains). Comparés aux 1.975.64 heures de vol enregistrées en 28 ans de service (1961-1989), ces chiffres restent dans la "norme" des standards internationaux et sont tout à fait comparables à ceux des unités de F-104 belges (41 % de pertes), canadiennes (50 %), italiennes (37.5 %), néerlandaises ( 33%) ou norvégiennes (39%).

Les accidents permirent néanmoins de détecter certains problèmes techniques concernant notamment le réacteur General Electric J79, mais aussi des failles dans la formation des pilotes. Après la guerre, beaucoup de pilotes militaires allemands avaient rejoint le secteur civil, plus attractif. Des cours de "rafraîchissement", sur des jets de première génération, au pilotage relativement aisé, ne suffisaient pas pour permettre de maîtriser parfaitement un F-104. Les équipes au sol, n'avaient pas, non plus, une grande expérience, étant majoritairement  constituées de conscrits ayant reçu une formation élémentaire.

Les F-104 allemands opéraient la plupart du temps, dans des conditions météo défavorables, le climat de l'Europe du nord n'ayant rien à  voir avec celui de l'Arizona, où furent formés les premiers pilotes allemands, sur la base de Luke Field. Le vol à  basse altitude et à grande vitesse, au dessus d'un relief varié, en pleine "crasse", n'était pas à  la portée de tous les pilotes.

Mais la première cause de ces accidents fut la décision de la Bundeswehr et du ministre de la Défense de choisir le F-104 comme chasseur-bombardier, alors qu'il avait été conçu comme un intercepteur opérant à haute altitude, et qui était une sorte de "missile avec un pilote". Pour effectuer des missions à  basse altitude, il fallut ajouter de nouveaux équipements, comme un système de navigation inertiel, qui alourdirent l'avion et affaiblirent ses capacités de vol, tout en accaparant l'attention du pilote. Le F-104G était réputé pour être surchargé de technologie, ce qui accroissait et compliquait aussi le travail des équipes au sol.

Les accidents marquèrent cependant l'état-major allemand et leur impact perdure aujourd'hui. C'est ainsi que la Luftwaffe se détourna des avions mono réacteur (comme le F-16, ou le Mirage 2000), jusqu'à  ce jour.

In 1966, le général Johannes Steinhoff, chef d'état major de la Luftwaffe, interdit de vol tous les F-104, jusqu'à  ce que les problèmes soient résolus, ou du moins, en voie de réduction. Les années suivantes, les accidents furent moins fréquents, mais on découvrit de nombreuses traces de fatigue sur la structure des ailes. Bref, le F-104 ne laissa pas un bon souvenir dans la Luftwaffe et un as de la guerre, comme Erich Hartmann, se demanda pourquoi l'Allemagne avait choisi cet avion totalement inadapté aux missions de la Luftwaffe, selon lui. Comme le disait très bien un ingénieur aéronautique anglais, un chasseur a quatre dimensions : la longueur, l'envergure, la hauteur et la Politique, mais cette dernière dimension est difficilement mesurable !

Le tournage dura 38 jours et eut lieu, entre le 23 Juin et le 17 Août 2014, à  Berlin, sur l'ancienne base de la Luftwaffe de Rheine-Hopsten (qui remplace la base de Nörvenich, en début de film), mais aussi à  Rheindahlen, Cologne, Stuttgart, Nürtingen et Schwandorf.

Ce téléfilm sur des accidents d'avions, devait être diffusé le 2 avril 2015, sur la chaîne allemande RTL, mais sa sortie fut reportée sine die, à  cause d'un autre accident d'avion, le crash du vol 9525 de Germanwings, le 24 mars 2015, mais là, l'avion n'était pas en cause...

 

Les avions du film :

Bien que les vues aériennes aient été reconstituées par une armée d'artistes digitaux, la production utilisa deux vrais Lockheed F-104G Starfighter, pour les scènes se déroulant au sol. Les images digitales permirent également de multiplier les avions sur le tarmac.

Des éléments techniques, tels que des pièces d'habitacle, des sièges éjectables, des instruments de bord, ont été fournis par le Luftfahrtmuseum de Wernigerode. Un des conseillers technique du film fut un ancien pilote de Starfighter, Juergen B. Pöppelmann, cité dans le générique de fin.

Les deux avions ont été fournis par la société néerlandaise PS Aero, de Baarlo, spécialisée dans la vente et l'achat d'avions militaires anciens, mais aussi dans la location de ces avions aux studios de cinéma.

Le premier chasseur est le Lockheed F-104G (c/n 683D-7040) portant le code "DA+217", dans le film. Il fut assemblé par les usines Messerschmitt de Manching, en juillet 1962. Modifié en chasseur-bombardier avec l'installation d'un canon Vulcan M61 de 20 mm, et de réservoirs supplémentaires, il fut d'abord affecté au JaBoG (JagdBomberGeschwader) 31 (DA+251), basè à  Nörvenich. En janvier 1967, il sera transféré au JaBoG 34 (code DD+257). En janvier 1970, il sera pêté au JaBoG 31 (code 21+71). Retiré du service le 11 juillet 1986, il servira de cellule d'entraînement pour la brigade des pompiers de la base de Fassberg. En 2004, le Néerlandais, Piet Smedts, un collectionneur d'avions et concessionnaire BMW, fondateur de PS Aero, le racheta et le stocka dans son garage de Baarlo, avec les marques du JaBoG 34. Sa restauration sera achevée en avril 2013. En 2014, il portait le code "DA+213". L'avion a été vendu à  un Allemand, en 2015.

L'autre F-104G est le F-104G (c/n 683D-7029), portant les codes "DA+227" et "DA+224", fut également assemblé à  Manching, par Messerschmitt, en  juin 1962. Ayant effectué son premier vol le 11 octobre 1962, avec le code usine "KE+340", il fut affecté en mai 1963, au JaBoG 31, de Nörvenich. Après avoir reçu le nouveau code "21+60", en 1967, il sera retiré du service en avril 1981 et stocké. Réformé en octobre 1984, sa cellule fut confiée à  l'école technique de Fassberg, en novembre 1984. En novembre 1999, Piet Smedts l'acquit et le stocka à  Baarlo. En avril 2014, il était codé "DA+225". L'appareil est toujours exposé chez PS Aero, à  Baarlo.

Tous les F-104G aperçus dans le film (vrais ou en images) portent le code du JaBoG 31 "Boelcke", basé à  Nörvenich, qui fut la première unité à  être équipée de F-104G et qui en perdit le plus (42). Son insigne apparaît sur la dérive des avions ou sur la combinaison des pilotes. Le code "DA" désigne cette unité (D pour chasseur-bombardier, et A pour le JaBoG 31). On note les codes : DA+112, 120, 211, 212, 213, 215, 217, 225, 227. En 1967 /1968, ce type de code sera remplacé par deux groupes de deux chiffres, désignant un appareil, et non une unité.

Les avions portent un camouflage conforme à  la Norm 62 (deux tons de vert au dessus, gris en dessous, bidons partiellement en orange).

Il n'y a pas d'autres types d'avions dans ce film, à  part les deux Saab 35 Draken (en images de synthèse) qui accompagnent le F-104, volant son pilote automatique branché et qui sont aperçus très furtivement.

 

Christian Santoir

 *Film disponible sur amazon.fr

                       

           

Enregistrer un commentaire

Copyright © Aeromovies. Designed by OddThemes