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SEMERO SMELYKH

SEMERO SMELYKH

Vo. Семеро смелых

(Les sept braves)

 

Année : 1936
Pays : URSS
Genre : aventures
Durée : 1 h 32 min.
Noir et blanc

Réalisateur : Sergei GERASIMOV
Scénario : Yury GERMAN, S. GERASIMOV

Acteurs principaux :
Ivan KUZNETSOV (Sasha Rybnikov), Nikolay BOGOLYUBOV (Commandant Ilya Letnikov), Tamara MAKAROVA (Docteur Zenhya Ohrimenko), Ivan NOVOSELTSEV (pilote Bogun), Andrei APSOLON (le météorologue, Osya Korfunkel), Oleg ZHAKOV (le radio, Kurt Schaefer), Piotr ALEYNIKOV (le cuisinier, Petka Moliboga).

Photographie : Evgeny VELICHKO
Musique : Benoît PUSHKOV
Compagne productrice : Lenfilm studio

Avions :

-Fanera-2 c/n 1005, CCCP-L1304

 

Notre avis :

Le film "Aerograd" (1935) emmenait le spectateur dans l'est de la Sibérie, aux confins de la vaste URSS. Celui-ci propose un autre espace, le grand Nord, plus exactement l'île Hooker (80° de latitude nord), située dans l'archipel François Joseph, dans la région d'Arkhangelsk, où en 1929, fut créée la première station polaire soviétique. Ce film s'inspire donc de fait réels. Rappelons que l'état soviétique s'était donné comme objectif majeur la conquête des régions de l'Arctique, où furent conduites trois expéditions, en 1932, 1933 et 1938.

L'histoire commence en "mai 193*" (l'année n'est pas précisée) quand le capitaine Ilya Letnikov écrit une lettre ouverte au Komsomol (Union des jeunesses léninistes communistes), faisant appel à des volontaires pour établir une station de recherche sur une île, située au delà du cercle arctique et y passer un an. 409 personnes se portent volontaires, parmi lesquelles, il faudra choisir seulement cinq spécialistes, un météorologue, un pilote, un médecin, un mécanicien, un opérateur radio, en plus de Letnikov qui est lui-même géologue. Quand cette petite équipe est déposée sur l'île, elle découvre un passager clandestin, en fait, un jeune vaurien, qui servira de cuisinier et pourra ainsi se racheter et devenir un héros. Alors qu'au début, la région apparait, sous un soleil printanier, comme un espace de loisirs où on fait du ski, quand l'hiver arrive, les conditions de vie se dégradent fortement. Un jour, deux esquimaux viennent à la station demander de l'aide, un des leurs étant gravement blessé. Le médecin, la doctoresse Zenhya, se rend en avion près du patient. Elle l'opère su place. Pendant ce temps, Letnikov et le météorologue, partis faire des relevés, sont pris dans une avalanche. Zenhya et le pilote, en rentrant à la base, sont pris dans une tempête et le pilote préfère que Zenhya se parachute, l'atterrissage s"annonçant des plus risqués. Elle retrouvera avec beaucoup de chance, l'avion posé un peu plus loin,. Ils seront sauvés par la moto neige de la base. Puis, ils doivent partir à la recherche de Letnikov et de son camarade. Mais ils passent à côté d'eux sans les voir ! Letnikov devra rentrer à pied en portant son camarade qui s'est blessé en tombant dans une crevasse et qui mourra à la base. Le printemps revient, et avec lui, les oiseaux marins, ainsi que le vapeur qui vient avec le ravitaillement et des renforts en hommes. Finalement, Zenya décidera de rester avec Ilya sur l'île, pour un nouveau séjour. Ils jurent de transformer le Grand Nord en un espace de civilisation, et de s'y établir.

 Tout le film est bâti sur l'opposition entre la station, un abri confortable (avec rideaux aux fenêtres), sûr, en contact radio constant avec Moscou, et le monde extérieur, hostile, dangereux, un espace d'aventure qu'il convient de domestiquer. Les personnages du film symbolisent l'idéal stalinien (le portrait de Staline figue en bonne place dans la base), à savoir, le nouvel explorateur, combinant jeunesse, expertise scientifique et courage à toute épreuve. Tout au long du film, une chanson revient comme un leitmotiv; elle est intitulée "Chanson, envoles-toi dans les airs". Elle avait beaucoup de succès auprès des jeunes filles des komsomols (le premier couplet disait :" Ne te sens pas seule, ne pleures pas, femme / Notre pays nous envoie / Pour conquérir les mers lointaines…"). Le personnel de la station ne compte qu'une seule femme (un peu frigide, mais excusable en région polaire…), avec un rôle important. En URSS, la majorité des médecins étaient des femmes, mais il fallait y voir, moins la preuve du statut privilégié de la femme soviétique, qu'une certaine déconsidération d'un métier jugé, en URSS, pénible, peu valorisant, et dont les hommes se détournaient (une évolution que l'on constate en France, en 2014…). La doctoresse finira par embrasser Letnikov, au bout d'un an, malgré leur attrait mutuel. "Le travail d'abord, la bagatelle ensuite", telle semble être un autre message stalinien.

La première du film eut lieu, le 4 Mars 1936, et il fut projeté au dixième Congrès de l'Union de la jeunesse communiste léniniste. Il sera également projeté en juin 1936, aux USA, où l'accueil fut plutôt froid (naturellement). Pour nous, son intérêt réside surtout dans le petit avion utilisé par les pionniers, un appareil assez curieux.

 

Les avions du film :

L'avion du film est un NIAI (Naucho Issledovatel'skii AeroInstitut - Institut Aéronautique de Recherches Scientifiques) appelé Fanera-2 (c/n 1005, CCCP-L1304), puis, en 1933, LK-1 (LK pour Leningradskii Kombinat), dont la particularité est d'avoir une aile à l'emplanture épaisse, se fondant dans le fuselage, selon les théories de l'inventeur russe Nicolas Woyevodsky. Ce type d'appareil fut construit à Leningrad en 1932 par A.I. Lisichkin et V.F. Rentel, directeur de l'NIAI. Notons qu'en Angleterre, le Westland Dreadnought avait été construit sur le même principe, dès 1923. Ce ne sera qu'après la guerre, que l'on retrouvera ce dispositif, qui diminue la trainée, sur des avions comme le McDonnell XP-67 (1944), puis plus tard, sur  le Lockheed SR-71 (1966) ou le Rockwell B-1 (1974).

Le LK-1 pouvait accueillir jusqu'à cinq personnes (dont le pilote), dans une cabine où on accédait par une fenêtre coulissante (comme on le voit dans le film). Le tableau de bord (dont on a un aperçu très partiel) était situé au milieu, derrière la cloison pare feu. Il va sans dire que le pilote, installé à gauche avait une visibilité réduite, notamment vers la droite. Cet avion en contreplaqué plafonnait à 3 370 m et avait une vitesse maximum de 154 km/h, ce qui en imitait son utilisation, mais il pouvait tenir l'air pendant six heures et atterrissait sur de très courtes distances (120 m). Son moteur, dont le film nous procure des vues rapprochées, est un Shvetsov-M11 de 100 chevaux. Une dizaine seulement de LK-1 furent immatriculés et guère plus, construits; ils furent souvent affectés, comme dans le film, à des tâches de liaison, dans des régions arctiques, pour l'Aeroflot.

Le "CCCP-L1304" fut immatriculé en janvier 1935, au nom du Leningradskii Institut Inzhenerov (Institut d'Ingénierie de Leningrad). Il eut une courte carrière, puisqu'il fut rayé des registres, le 4 mai 1936, peu après la sortie du film. On remarque que l'avion est uniquement filmé au sol, parfois le moteur en marche. En "vol", il est filmé en studio. Vers la fin du film, on peut voir le "CCCP-L1304" ou peut être un autre LK-1 avec le même matricule (car le moteur est équipé de deux pipes d'échappement dirigées vers le haut, contrairement au premier), l'unique appareil équipé de flotteurs.

L'équipage du LK-1 est secouru par un Aerosani, ou motoneige à hélice, Tupolev ANT-V, propulsé par un moteur identique à celui de l'avion. De tels engins, construits en tôle ondulée, furent largement utilisés dans les régions  arctiques.

 

Christian Santoir

*Film à visionner sur YouTube.

           

 

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