MENACE SUR BERLIN
Vo. Frühling in Berlin
Année : 1957
Pays : Allemagne de l'Ouest
Genre : comédie
Durée : 1 h 41 min.
Couleur
Réalisateur : Arthur Maria RABENALT
Scénario : Curt J. BRAUN
Acteurs principaux :
Sonja ZIEMANN (Nicoline), Gerhard RIEDMANN (Ferry Meister),
Gardy GRANASS (Heide Wolters), Iván PETROVICH (Michael Markoff), Hans LEIBELT
(Barna), Dietmar SCHÖNHERR (Hannes Delk).
Musique : Hans CARSTE
Photographie : Georg BRUCKBAUER
Producteur : Kurt ULRICH
Compagnie productrice : Berolina
Avions :
- -Douglas DC-6B, N6529C, document.
- -Douglas C-54A, N88934
- -Douglas C-54E, N90902, en arriére plan
- -Douglas C-54E, N90905
- -Douglas C-47B, G-AMYJ, en arrière plan
Notre avis :
Le titre français de ce film n'a strictement rien à voir avec le scénario qui est plutôt en forme de comédie et n'a pas pour sujet un incident de la guerre froide, ou quelque chose de ce genre, au point qu'on est amené à se demander si ceux qui ont trouvé ce titre ont réellement vu le film ! Le titre allemand (Printemps à Berlin) colle mieux à l'histoire. Le film nous montre un Berlin en grande partie reconstruit, huit ans après la fin de la seconde guerre mondiale, alors que cette ville avait été pratiquement rasée par la RAF, l'USAAF et l'Armée rouge. En 1957, on y voit encore quelques ruines et des façades couvertes d'échafaudages, comme la porte de Brandebourg.
Les mauvaises conditions météorologiques au-dessus du Danemark forcent un avion, qui a écollé de Vienne, à se dérouter sur Berlin. Aucun des passagers n'en est heureux, et encore moins, deux braqueurs de banque recherchés. A leur arrivée, ils sont déjà attendus par la police, mais, ils parviennent à s'échapper. Nicoline Peterson, l'épouse d'un photographe de presse suédois, est fâchée parce que son séjour involontaire à Berlin retarde son divorce tant attendu. Même la diva d'opéra Verena Illing n'apprécie guère cette ville, car il y a de nombreuses années, elle a dû y faire face à une amère déception : son professeur de musique Markoff, dont elle était tombée amoureuse, l'avait évincée. Un passager grec est en colère parce qu'il ne peut pas assister à la naissance de son premier enfant. Ferry, qui veut émigrer au Canada, se souvient de son premier grand amour, Heidi, qu'il avait trouvé à Berlin, et auquel il avait renoncé parce qu'il ne voulait pas s'opposer à sa carrière de danseuse. Dès que les passagers sont entrés dans Berlin, ils ne peuvent échapper à son charme. Ils apprécient la vie quotidienne des Berlinois et leurs manières. Nicoline est persuadée par son mari, de l'aider à faire un reportage photo sur la ville et ses environs. Elle tombe à nouveau amoureuse de lui ! La diva doit réaliser que le mépris de son professeur de chant n'était que le résultat d'un malentendu. Ferry retrouve son amie d'enfance, Heidi, et découvre qu'elle n'est pas devenue danseuse de ballet, mais serveuse au café Kranzler ! Après deux jours, le séjour forcé à Berlin est terminé. Lorsque les passagers arrivent de nouveau à l'aéroport de Berlin-Tempelhof, tout le monde a été transformé par l'ambiance optimiste de la ville. Seuls les deux voleurs sont absents; ils ont été capturés dans le secteur est de la ville, par la police, et sont maintenant sous les verrous. Quant à Ferry, il décide, au dernier moment, de rester à Berlin, avec Heidi.
Ce film aurait pu être sponsorisé par l'Office du Tourisme berlinois. Il nous montre un Berlin où les traces de la guerre ont été presque totalement effacées et où il fait bon vivre. A travers de petites histoires individuelles, on visite les principaux sites de la ville : le Kurfürstendamm, la Funkturm, le circuit AVUS, le stade olympique, le zoo, le lac Wannsee et même le château de Sans-Souci, à Postdam. On visite également Berlin-Est et la Stalinallee. Les deux jours d'escale des passagers ont été bien remplis. On remarque également qu'en 1957, il était facile de se rendre à Berlin-Est, notamment par le métro. Le film laisse également penser qu'il existait une bonne collaboration entre la police des deux parties de la ville. Quatre ans plus tard, en 1961, cette collaboration cessera, quand le rideau de fer tombera au milieu de la ville, sous la forme du "mur de Berlin" ou "mur de la honte", les Berlinois de l'Est ayant trop tendance à partir vers Berlin-Ouest... Le film se termine avec Freddy et Heidi devant le monument célébrant le pont aérien de Berlin, en 1948-1949 (Cf. "La ville écartelée"-1950), érigé en 1951, à Tempelhof...
Ce film fait aussi de la publicité à la compagnie américaine Pan American World Airways. En 1957, la compagnie allemande de l'ouest, Lufthansa, n'était pas autorisée à desservir Berlin (il y avait aussi une Lufthansa est-allemande qui cessera ses activités, en 1963). Après avoir absorbé la compagnie American Overseas Airlines (AOA), en 1950 (date à laquelle AOA, exploitait une ligne Berlin-Francfort), la présence de PAA s'accrut à Berlin-Tempelhof. En plus des vols (à plusieurs escales) entre les USA et Berlin, PAA avait établi des liaisons régulières entre Berlin, Francfort, Munich et Düseldorf, entre 1955 et 1959.
Il n'y avait pas de liaison aérienne directe entre Vienne et Copenhague, en 1957. Berlin, à l'époque, n'était pas d'accès facile, le survol de la RDA étant interdit, en dehors de trois couloirs aériens orientés vers l'ouest, imposés par l'URSS, et reliant Berlin à Hambourg, Hanovre et Francfort. Rappelons qu'il y eut plusieurs incidents où des avions civils occidentaux (dont un avion d'Air France), furent attaqués par des chasseurs soviétiques.
Les avions du film :
Le film ouvre sur un Douglas DC-6B de PAA (Pan American World Airways) en plein vol. Cette image d'archives montre le "Clipper Fidelity" dont l'immatriculation "N6529C", peut être déchiffrée sur l'aile droite (après avoir travaillé l'image...). Cet avion (c/n 43529) fut pris en charge par la PAA en 1952 et resta dans la compagnie jusqu'en 1961, date de sa vente à la compagnie portugaise Transportes Aereos de India Portuguesa (CR-IAH) de Goa. Il fut mis sur la ligne Goa-Lisbonne, Goa-Karachi, Goa Lourenco-Marques (Maputo). Mais deux mois plus tard, Goa passant sous contrôle indien, il fut affecté à la FAP (Força Aérea Portuguesa, n° de série 6710) et servit au sein de l' Agrupamento de Transporte AB 1. En juin 1976, il fut loué ) la compagnie SATA Internacional (CS-TAM), avant de retourner, en juin 1977, à la FAP. Il fut réformé à Alverca (Portugal). En 1980, il repassa sur le continent américain, immatriculé "YV-297C", au nom de la compagnie vénézuélienne Aero B. En 1984, il fut acquis par la société sud-africaine Atlas Aircraft Corp. mais immatriculé aux USA (N873TA). En 1986, il rejoignit la flotte de la compagnie dominicaine Transporte Aereo Dominicano (HI-474, puis HI-474CT, en 1989). Il fut retiré du service en 1991 et ferraillé en 1994, sur le Las Américas International Airport, situé à Punta Caucedo. Il ne subsiste de lui que la partie avant, les ailes, des sièges, un moteur, décorant un night-club, le "Disco DC6", de l'hôtel Iberostar Dominicana de Punta Cana...
Mais le DC-6 n'était employé par la PAA que pour les vols transatlantiques. On traversait l'Atlantique en Super DC-6 Clipper, mais aussi en Super 7 Clipper (DC-7C) et même en Boeing 377 Stratocruiser, offrant le service de première classe, "The President Special", avec couchettes. On n'atterrissait pas à Berlin, mais d'abord à Londres, puis Düsseldorf et enfin, Berlin. Les vols intérieurs étaient assurés par des DC-4 / C-57 non pressurisés de 60 places. Ce type d'avion était largement disponible dans les années 50, vu le grand nombre de Douglas C-54 Skymaster, déclarés surplus de guerre et mis sur le marché.
Le film se poursuit dans la cabine d'un DC-4/C-54 (hublots ronds), reconstituée en studio. Par contre, les quelques vues du cockpit semblent bien être vraies, filmées ) partir de la porte, située à droite.
A Berlin-Tempelhof, les passagers débarquent du Douglas C-54A-15-DC Skymaster "Clipper Berlin" (N88934, c/n 10366). Livré en 1944 à l'USAAF (s/ 42-72261), il fut affecté à l'US Navy, comme Douglas R5D-1 (BuNo 50844). En juin 1947, il fut vendu à PAA et d'abord baptisé "Clipper Pride of America". Il resta en service jusqu'en décembre 1961. C'est Charlotte Aircraft Sales qui le vendit à la Fuerza Aerea Espanola, en 1962. Il reçut le serial "T.4-10", au sein du Grupo 90 avec le code "90-10". Il portait sur le nez la mention "Grupo E.M." (Grupo del Estado-Mayor). Depuis 1976, il est préservé au musée de l'air de Cuatro-Vientos, à Madrid, avec le code "911-10" et la mention "Grupo 91".
Quand ils descendent de l'avion, les passagers passent dessous une pancarte mentionnant que PAA a effectué, ce jour, sa 65.204ème traversée de l'Atlantique. Rappelons que PAA inaugura sa première ligne transatlantique (en direction de Marseille), le 28 juin 1939, avec un hydravion Boeing 314.
Derrière le "Clipper Berlin", il y a un autre DC-4 de PAA, le Douglas C-54E (N90902, c/n 27338) "Clipper Köln-Bonn". Pris en charge en 1945 par l'USAAF (s/n 44-9112), il fut rapidement vendu par la Reconstruction Finance Corp. à la compagnie American Overseas Airlines qui fut absorbée en 1950, par la PAA qui le baptisa d'abord "Clipper Roland", puis "Clipper Köln-Bonn" et "Clipper Frankfurt". Resté en service jusqu'en 1961, il fut cédé à la compagnie libanaise Trans Mediterranean Airways (OD-ADV). Il sera ferraillé à la fin des années 60 sur l'aéroport de Beyrouth-Bir Hassein.
Les passagers rembarquent dans un DC-4 de PAA différent (N90905). Il s'agit du C-54E "Clipper Frankfurt". Livré à l'USAAF en 1945 (s/n 44-9118, c/n 27344), il fut vendu la même année, en novembre, à AOA, avec le nom "Flagship Glasgow", puis "Flagship Berlin". En septembre 1950, passé chez PAA, il fut rebaptisé "Clipper Munich", puis "Clipper Frankfurt" et après, "Clipper Mermaid". En décembre 1961, la société Charlotte Aircraft Engineering l'acquit pour le revendre à la force aérienne espagnole. Il reçut le serial "T.4-11" et les codes successifs "353-24" et "352-11", des escuadrones 353 et 352. En 1969, il fut un temps affecté à la Direccion General de Aviacion Civil (EC-BQL). Il fut rendu à l'armée en 1972. Le 9 ao^ùt 1976, il se crasha, près de Vejer de la Frontera.
En arrière plan, on aperçoit d'autres C-54 et des C-47, sur le tarmac, dont un C-54 d'Air France. Un C-54 de la compagnie anglaise Air Charter Ltd., pointe son nez (avec une décoration proche de celle d'un avion de PAA, mais avec des rayures rouges) à la porte d'un hangar. Air Charter était la première compagnie fondée par le fameux Freddy Laker. Cette compagnie posséda trois C-54/DC-4, entre 1955 et 1960. De leurs bases de Stansted et Southen, ils effectuaient des vols passagers, mais aussi du transport de troupe, pour l'armée anglaise.
Au début du film, les deux voleurs passent derrière un Douglas C-47, dont on ne voit que l'arrière du fuselage. Son matricule anglais "G-AMYJ" permet de l'identifier comme un C-47B (c/n 15968/32716) de la compagnie charter Transair qui l'avait acheté en 1953, à la RAF. Pris en charge par l'USAAF (s/n 44-76384), ce C-47B fut rapidement transféré en février 1945, à la RAF, à Montréal (serial KN353). En mars 1945, ce Dakota IV fut affecté au 300 Group en Australie, et de mai à décembre 1946, il servit à Ceylan au sein de l'ACSEA (Air Command, South East Asia), puis jusqu'en 1947, au Moyen-Orient. Il fut accidenté en Libye et, en février 1953, il fut cédé à Transair. Il effectua des transports de troupes avec le serial "XF747". En 1959, il fut enregistré au nom d'Alares Development Co. de Jersey, et exploité sous le nom de Jersey Airlines. En 1965, Morton Airways l'acheta. Il fut exploité sous le nom de British United, un groupe de compagnies dont faisaient partie Morton et Transair. En 1969, il fut loué à South West Aviation, puis à Intra Airways de Jersey, entre 1972 et 1976. En juillet 1976, il fut loué à la compagnie égyptienne Nile Delta Air Service (SU-AZF). Acheté par Transair, il fut revendu en 1978, à Lease Air, exploité sous le nom d'Eastern Airlines, en décembre 1981, puis connut d'autres propriétaires : Air Atlantique en octobre 1981, Aces High en janvier et février 1982, Harvest Air en mars 1982, qui l'utilisa pour des pulvérisations agricoles. En 1988, c'est la compagnie de transport de fret Janes Aviation qui l'acquit, et, en 1990, Atlantic Air Transport qui l'employa pour effectuer des contrôles de pollution, demandés par le Département des Transports britannique. Il participa également au tournage de la série TV "Band of Brothers" (2001). En 2001, retiré du service, il fut donné au Yorkshire Air Museum qui entreprit sa restauration compè¨te et le changement des moteurs. Il est actuellement préservé en état de vol, avec son ancienne décoration de Dakota IV (s/n KN353) et il apparaît dans plusieurs meetings aériens.
Christian Santoir
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