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ZUKHOVSKI

 

ZUKHOVSKI

Vo. Жуковский

 

Année : 1950
Pays : URSS
Genre : biographie
Durée : 1 h 30 min.
Couleur

Réalisateurs : Vsevolod PUDOVKIN, Dmitri VASILYEV
Scénario : Anatoli GRANBERG

Acteurs principaux :
Yuri YUROVSKY (Zukhovski), Ilya SUDAKOV (Mendeleyev), Vladimir BELOKUROV (Chaplygin), Vladimir DRUZHNIKOV (Nesterov), Sofiya GIATSINTOVA (la mère de Zukovski), Galina FROLOVA (la sœur de Zukhovski).

Musique : Vissarion SHEBALIN
Photographie : Anatoli GOLOVNYA, Tamara LOBOVA
Compagnie productrice : Mosfilm

Avions :

  • -Blériot XI , réplique
  • -Farman, réplique
  • -Ilya Mourometz, maquette
  • -Ilyushin Il-12B, document. 
  • -Lavochkin La-15, document
  • -Mozhaiski, réplique
  • -Nieuport IVG, réplique
  • -Tupolev Tu-4, document.
  • -Yak-15, document.

 

Notre avis :

Ce film est une biographie du savant russe Nikolaï Zukhovski (1847-1921), un des fondateurs de l'aérodynamique moderne, surnommé par Lénine le "père de l'aviation russe"...Vsevolod Pudovkin reçut pour cet œuvre, en 1950, le prix du meilleur réalisateur au 5ème Festival Cinématographique de Karlovy Vary, et, en 1951, le prix Staline. C'est dire que "Zukhovski" était dans la "droite ligne" du Parti. Glorifiant les accomplissements de l'URSS en matière d'aéronautique, cette biographie, revue et corrigée, était à l'évidence un outil de propagande. Au début des années 50, Staline s'intéressait de près au monde culturel et scientifique. Il faisait réécrire l'histoire à son avantage, mais aussi pour attribuer à des Soviétiques nombre d 'inventions contemporaines.

Le récit commence en 1886, alors que Nicolas Zukhovski était déjà un enseignant respecté et un érudit dans le domaine des mathématiques. A Saint-Pétersbourg, c'est en écoutant une conférence du physicien et chimiste, Dmitri Mendeleyev, qu'il a l'idée d'étudier le processus du vol. Mendeleyev lui raconte qu'un soldat aurait vu personnellement l'essai réussi d'une machine volante construite par un certain Mozhaiski, en 1884. Mais, la Russie tsariste a refusé d'étudier des machines volantes plus lourdes que l'air, en raison du conservatisme des fonctionnaires et de sa complète dépendance des recherches effectuées à l'étranger. Ses premières études concernent l'effet Magnus, produit par des cylindres en rotation. En 1902, il construit la première soufflerie, après avoir observer l'écoulement de l'eau autour d'une brique jetée dans un caniveau... Il fonde en 1904 près de Moscou, le premier institut de recherche aérodynamique en Europe, devenu le célèbre TsAGI en décembre 1918, par décret du gouvernement soviétique. Il y travaille avec son élève Sergueï Chaplyguine sur le phénomène de la portance et sur le profil des ailes. Alors que très souvent, les tentatives de vol se terminent par un désastre, Zukhovski trouve un courageux pilote militaire, Petr Nesterov, pour essayer les premiers planeurs mettant en application les résultats de ses études. En 1912, il réalise le premier looping, pour montrer qu'un avion peut être porté dans l'air, quelle que soit sa position. Il est quelques temps mis aux arrêts pour avoir pris de trop grands risques. Vers la fin de sa vie, Zukhovski et son œuvre sont salués à l'Académie des Sciences de l'URSS par une assemblée unanime. Le film se termine sur le traditionnel défilé aérien d'avions de tous types.

On remarquera l'image négative qui a été attribuée à  l'aérodynamicien D. P. Riabouchinski, élève de Zukhovski, décrit comme un bourgeois égoïste et condescendant, plus homme d'affaires que scientifique. Reconnu par la communauté scientifique mondiale et membre correspondant de l'Académie des Sciences de Paris, Riabouchinski avait le défaut, pour le régime soviétique, d'être très riche, et, surtout, d'avoir émigré en France en 1919... Le vaste laboratoire de recherches, montrée dans le film, était installé dans sa propriété familiale de Koutchino. La soufflerie, imaginée par Zukhovski, qui y était installée n'était pas la première au monde. Cette invention date de 1871 et revient à l'ingénieur anglais Francis Wenham et à son collègue John Browning.

Les "historiens" officiels de l'URSS ont fait du vol d'Alexander F. Mozhaiski en 1884, la première tentative de vol d'un plus lourd que l'air, avec pilote, ce qui est faux. Il semble bien que cet honneur revienne au Français Félix du Temple, en 1874. A cette date, comme en 1884, il ne s'agissait pas de vol réel, mais plutôt de saut, les moteurs employés étant plus lourds que puissants… En outre, le film fait de Mozhaiski un marin "prolétaire", alors que c'était un officier de la Marine Impériale. Par contre, c'est bien Nesterov qui exécuta pour la première fois un looping, et non, comme on le mentionne souvent, Adolphe Pégoud qui exécuta cette figure douze jours après le Russe…

Si l'importance du rôle des ingénieurs et chercheurs soviétiques dans le domaine de l'aérodynamique et de l'aviation, est indéniable, ils n'étaient pas les seuls, et, au début du XX° siècle, tout se passait à l'Ouest, principalement en France, en Angleterre et aux USA. L'URSS était consciente de son retard en matière aéronautique et fit de gros efforts pour accaparer la technologie occidentale. Dans les années 30, les usines américaines accueillaient de nombreux ingénieurs soviétiques en "formation", au point que le gouvernement fédéral s'en émut. Bien des moteurs, des systèmes, des équipements américains furent construits en URSS, avec ou sans licence... Mais les usines soviétiques eurent toujours du mal à égaler la rigueur et la qualité des procédés de fabrication occidentaux. Cela continua bien après la guerre (Cf. l'expérience malheureuse du Tu-144..) et les avions soviétiques ne purent déboucher sur le marché occidental, leurs équipements ou leurs standards d'usinage, ne correspondant pas aux normes internationales. Les avions montrés dans ce film illustrent d'ailleurs fort bien, sans le faire exprès, cette réalité.

 

Les avions du film :

Le tournage du film utilise un grand nombre de maquettes d'échelle diverses. Parmi celles ci plusieurs maquettes grandeur réelle. La première est un reconstitution de l'appareil de Alexander F. Mozhaiski, qui, en 1884, à Krasnoye Selo, fit un bond d'une trentaine de mètres, .Comme la machine du Français Félix du Temple en 1874, celle de Mozhaiski était propulsée par un moteur à vapeur et décolla, si on peut dire, sur un plan incliné.

Les autres maquettes représentent les principaux appareils qui ont marqué l'histoire de l'aviation : le Wright "Flyer", le Farman (une très belle réplique propulsée que l'on voit rouler), le Blériot XI, tous modèles qui furent copiés un peu partout dans le monde avec quelques variantes. On voit également une maquette de l'énorme quadrimoteur Ilya Mourometz (1914). C'était un avion incontournable que le film ne pouvait ignorer, bien qu'il fusse construit par Igor Sikorski, qui s'exila aux USA en 1919. Ce fut le seul avion russe que des pays occidentaux demandèrent à construire, les pourparlers étant interrompus par la révolution de 1917. On voit également une maquette d'Antoinette et une autre de l'avion canard "14bis" de Santos Dumont, brièvement aperçues. Tout aussi rapide est l'apparition d'un avion beaucoup plus rare, le Kudashev 3, mû par un moteur italien Anzani et qui vola en décembre 1910. Cet avion était très "inspiré" du monoplan anglais à aile haute, le Batchelor, construit en juillet 1910 et qui ne vola pas. Alexander Sergeivich Kudashev construisit également en 1911, un Kudashev 4, qui était une copie de Blériot XI, avec un train d'atterrissage simplifié.

Nesterov pilote un avion français, un Nieuport IVG, avec lequel il exécute un looping. On en fabriqua une réplique assez fidèle pour le film. Cet avion connut un grand succès auprès de l'armée impériale, dont il fut l'un des principaux appareils. Il était construit sous licence en Russie par DUX.

A la fin du film, des extraits de documentaires montrent fièrement les dernières productions soviétiques. Les chasseurs sont représentés par des Yak-15 (code OTAN "Feather") un des tout premiers jets construit par l'URSS, en 1946. Ceux du film, peints en rouge avec le dessous gris, appartiennent à une patrouille acrobatique. Puis, on voit son successeur, produit à partir de 1949, le Lavochkin La-15 (code OTAN "Fantail"), dont le n° 108 au décollage, ainsi que plusieurs exemplaires alignés sur un parking. Enfin, un Mikoyan Gurevitch MiG-15 (n°148), en vol, représente la dernière génération de chasseurs qui venait juste d'entrer en service. Ces deux derniers avions, issus directement des recherches allemandes pendant la guerre (chez Focke-Wulf notamment..), étaient propulsés par des réacteurs Derwent anglais.

Côté bombardiers, c'est moins brillant, le seul avion soviétique montré étant le Tupolev Tu-4, autrement dit la copie fidèle (du moins en apparence..) du Boeing B-29, un avion dont Tupolev et l'industrie aéronautique soviétique n'eurent pas à s'enorgueillir, les bureaux d'études s'étant contenté de décortiquer trois B-29 saisis après leur atterrissage sur le sol soviétique; près de mille dessinateurs furent mobilisés pour copier les composants de l'avion ! Cela en dit long sur ce que les Soviétiques, eux-mêmes, pensaient de leur technologie. On voit une rangée de Tupolev Tu-4/B-29 au sol, dont les numéros 21 et 66 (s/n 220501) et deux en vol, sans doute, les premiers appareils de série (847 de produits).

Enfin, l'aviation de transport est représentée par une trentaine d'Ilyushin Il-12B alignés sur un parking, avec leurs équipages et des parachutistes devant, lors d'une revue.

 

Christian Santoir

 *Film disponible surYouTube

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