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Ziel in den Wolken

 

ZIEL IN DEN WOLKEN

(Le but dans les nuages)

 

Année : 1939
Pays : Allemagne
Genre :drame
Durée : 1 h 39 min.
Noir et blanc

Réalisateur : Wolfgang Liebeneiner
Scénario : Philipp Lothar Mayring, Eberhard Frowein, d'après le roman de Hanz Rabl.

Acteurs principaux :

Albert Matterstock (Walter von Suhr), Leny Marenbach (Tilde von Gräwenitz), Brigitte Horney (Margot Boje), Werner Fuetterer (Dieter von Kamphausen), Volker von Collande (Ewald Menzel), Christian Kayßler (Krasselt), Willi Rose (Lehmann), Margarete Kupfer (Frau Menzel)

Producteur :  Alfred Greven
Musique : Wolfgang Zeller
Photographie : Hans Schneeberger, Eberhard von der Heyden
Compagnie productrice : Terra-Filmkunst GmbH.

Avions :

  • -Blériot XI, réplique
  • -Farman IV, réplique
  • -Grade Libelle
  • -Wright B

 

Notre avis :

 "Ziel in den Wolken" est le troisième film de l'acteur Wolfgang Liebeneiner, en tant que réalisateur. Il sera un des metteurs en scène favoris de Goebbels, et deviendra en 1943, directeur artistique de l'UFA. Ce film est à la gloire des pionniers de l'aviation allemande, dont Hans Grade, de Magdebourg, qui fut conseiller technique du film. Il pilote devant la caméra l'avion avec lequel il remporta en octobre 1909, le prix Lanzer de 40.000 marks, après avoir effectué un huit autour de deux pylônes distants d'un kilomètre, dans un appareil allemand, propulsé par un moteur allemand. Le film célèbre également la création de l'aviation militaire allemande, en racontant l'histoire d'un jeune officier de cavalerie (comme un certain von Richthofen..) qui veut doter son pays de la nouvelle arme aérienne, face à la domination des aviateurs français et anglais, au début du siècle. Ce film se caractérise cependant par un ton très différent des films d'aviation de l'époque, comme "Pour le Mérite" de Karl Ritter. Liebeneiner était un specialiste des comédies un peu lourdes... Mais ce n'est pas non plus, une version allemande de "Ces merveilleux fous volants sur leurs drôles des machines"; la propagande est toujours sous-jacente, même si elle n'est pas tapageuse. Bien que servi par des acteurs de qualité (dont la charmante Leny Marenbach et la séduisante Brigitte Horney), et bénéficiant d'une bonne réalisation, ce film est passé totalement inaperçu, et il est très rarement cité dans les publications sur le cinéma allemand, durant l'époque nazie. Le Dr. Goebbels n'en parle même pas dans sa correspondance…Le film sortit à Berlin, à l'UFA Palast am Zoo, le 10 mars 1939, et fut projeté à New-York, le 26 mai de la même année.

En Allemagne, en 1909. L'avenir du lieutenant des uhlans, Walter von Suhr, s'annonce sous les meilleurs auspices. Son mariage avec Tilde von Gravenitz, la fille du gouverneur du district de Postdam, est imminent, et une brillante carrière d'officier s'ouvre devant lui. Mais le destin a prévu autre chose pour le jeune homme. Lors de la première "Semaine aéronautique internationale" de Johannisthal, où la supériorité des avions étrangers est manifeste, Walter décide, d'un coup, de devenir aviateur. Il rencontre les pilotes venus de toute l'Allemagne, mais aussi de France, d'Angleterre; tous formant une sorte de confrérie qui ignore les frontières. Il pressent que l'aviation va être l'arme du futur, et il essaie d'y intéresser ses supérieurs. Mais pour ces officiers prussiens, les aviateurs ne sont que des acrobates de cirque ! Comme son colonel lui a refusé un congé spécial, Suhr démissionne et quitte l'Armée, pour développer sa propre machine, en collaboration avec Ewald Menzel, un jeune constructeur de ses connaissances. Ses parents sont horrifiés, et ceux de Tilde ne veulent plus que leur fille épouse un "mécanicien"...Mais Tilde tient à Walter qui a le courage de ses convictions; elle sait qu'il est sur la bonne voie. Bien qu'il soit à court d'argent, il parvient à acheter un avion qui souffre de nombreux défauts. Il finit par le faire voler. Son père réalise alors que Walter a la vocation. La mort de Menzel, qui se tue lors de l'essai de son prototype, ne diminue pas sa détermination. Quand il fait son premier vol, l'Armée commence à montrer quelque intérêt à sa machine. Son ancien régiment projette de mettre sur pied une petite escadrille. Une nouvelle ère s'ouvre. S'il le veut, il pourra se rengager, et prendre la tête de cette nouvelle arme, tout en poursuivant sa carrière. Lors d'une parade, il est invité à faire une démonstration en présence d'un général et de son état-major. A ses cotés, dans l'avion, il y a Tilde qui l'a si courageusement soutenu lors des moments difficiles.

Le film insiste à juste titre, sur la supériorité des constructeurs étrangers, parmi lesquels les Français. L'avion de Grade, une machine entièrement allemande), joue le rôle d'un avion français, au début du film (il est vrai qu'il était inspiré d'un modèle du brésilien Santos-Dumont). L'avion que Walter essaie de vendre aux militaires, est une copie d'un célèbre appareil français… Cependant, en hommage à l'aviation allemande débutante, Hans Grade apparaît, en personne, dans le film (sans dire un mot), pour recevoir, comme en 1909, le "Lanz-Preiz der Lüfte" accompagné d'un gros chèque. Le scénario était assez conforme à la réalité. Les progrès des Français en matière de cellules et de moteurs légers performants, avaient retenu l'attention des services de l'armée prussienne, dès 1907. Contrairement aux Allemands, les Français n'avaient pas développé de grands dirigeables comme les Zeppelins, et leur supériorité aérienne dépendait exclusivement des avions. Rappelons qu'en 1911, suite à une campagne de presse, l'étape allemande (Berlin) du circuit européen (ou circuit des capitales) avait été supprimée, afin de ne pas divulguer les secrets des machines françaises, qui étaient néanmoins vendues outre-Rhin !

Les prouesses de Farman, de Blériot, mais aussi des frères Wright, avaient suscité un grand engouement pour l'aviation, en Allemagne. Des prix furent crées par des industriels, et on organisa des meetings à l'image de ceux tenus à Reims. Les premières firmes aéronautiques allemandes apparurent en 1908-1909 : Wright et Dorner, mais aussi Rumpler, Albatros, Euler… Néanmoins, les premiers pilotes militaires allemands s'exercèrent sur des Latham français. Au début du siècle, les avions et les pilotes français détenaient la plupart des records internationaux. Ils dominèrent les manifestations aéronautiques de 1909 : semaine aéronautique de Francfort (juillet), semaine Internationale de Johannisthal (26 septembre-3 octobre), qui fournit le cadre du film. Les Français, cette année-là, remportèrent pour 400.000 marks de prix, une somme colossale qui fit défaut aux Allemands pour développer leur propres machines.

Le film mentionne plusieurs participants au premier meeting International de Berlin-Johannisthal, dont les noms figurent sur les hangars du terrain : Farman, Wright, Dorner, Leblanc, Rougier (grand vainqueur du meeting). Il y avait également Blériot qui venait de franchir la Manche, Molon, Latham, le baron de Caters…Dans le film, seul, Alfred Leblanc, un ancien ingénieur de chez Blériot, devenu pilote de record sur le tard, est représenté. Son personnage, appelé "Fernand Leblanc", est caricatural, court sur pattes, portant béret et moustache, et ne s'exprimant qu'en argot, avec l'accent de Paname, une "cibiche" fichée aux coin des lèvres. Le film va même jusqu'à évoquer son accident (bien réel, mais au décollage, et non à l'atterrissage, comme montré) sur la machine de Blériot, le premier jour de la manifestation. Il ne sera breveté pilote que deux mois plus tard.

Le terrain historique de Berlin-Johannisthal fut reconstitué pour le tournage, sur celui de Bork, à l'ouest de Postdam, Johannisthal, appelé Adlershof, étant devenu en 1938 un aéroport très encombré. Le terrain de Bork avait été crée en août 1909, peu avant Johannisthal, et Hans Grade y fit les essais de son avion, avant d'y installer sa première usine.

 

Les avions du film :

Hans Grade pilote son "Libelle" (Libellule) avec lequel il remporta le prix Lanzer, en 1909. Cet avion propulsé par un moteur deux temps de 24 CV, était fortement inspiré de la "Demoiselle" de Santos-Dumont, mais il était de plus grandes dimensions. Au sol, on en voit une version biplace, pilote et passager étant assis en tandem dans un petit habitacle caréné. Les premiers avions allemands étaient effectivement des copies d'avions français. Le premier avion construit par Heinkel fut une réplique de Farman; Euler copiait les Voisin; Albatros, les Farman et les Sommer; Aviatik, les Farman...

Le film utilisa plusieurs répliques volantes. Walter vole sur une copie de Farman, à moteur rotatif. Le français Leblanc vole sur une réplique de Blériot XI, également équipé d'un moteur rotatif. On voit un Wright B (un modèle sorti en 1910) qui reste au sol; peut-être était-ce le modèle conservé au Deutsche Luftfahrt Sammlung de Berlin-Moabit, où était également exposé l'avion de Grade ?

L'avion bizarre dans lequel Menzel se tue devant sa pauvre maman, est un monoplan à deux paires d'ailes en tandem qui semble inspiré des Blériot VI/VII, ou du Farman monoplan (dont le prototype avait été acheté en 1909 par un officier allemand..), et plus encore, du Kapferer-Paulhan n°3, qui, lui, ne tua pas son pilote, car il ne réussit pas à décoller…C'est ce qui arriva aussi, à l'avion (fort mal conçu) de l'allemand Dorner, au meeting de Johannisthal.

A la fin du film, on revient en 1939, et le film se termine comme il se doit par un défilé aérien de bombardiers Junkers Ju-52, et de chasseurs biplans (Arado Ar.68, Heinkel 51 ?).

  

Christian Santoir

 * Film disponible sur YouTube

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