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MAUDITE SOIT LA GUERRE

 

 

MAUDITE SOIT LA GUERRE

 

Année : 1914
Pays : Belgique
Durée : 0h 45 min.
Genre : guerre
Noir et blanc, colorié à la main.

Réalisateur : Alfred Machin
Scénario : Alfred Machin

Acteurs principaux :
Baert (Adolphe Hardeff), Suzanne Berni (Liza Modzel), Fernand Crommelynck. (Monsieur Modzel), Nadia D'Angely (Madame Modzel),Henri Goidsen (Lieutenant Maxime), Albert Hendrickx (Sigismond Modzel)

Photographie : Jacques Bizeul, Paul Flon
Compagnie productrice : Belge Cinéma Film

Avions :

  • -Déperdussin TT 
  • -Farman III
  • -Farman HF.20
  • -Santos Dumont 20 Demoiselle 

 

Notre avis :

"Maudite soit la guerre ! ". Cette sentence est inscrite dans le marbre de plusieurs monuments aux morts de la guerre de 14-18, érigés dans nos villes et nos villages. Qui ne serait d'accord ? Mais la première guerre mondiale qui devait être la "Der des der", ne fut que l'"Avant der des der'", du moins, jusqu'a preuve du contraire…Vingt et un ans après, on remettait ça, avec les mêmes alliés, et les mêmes ennemis, les Japonais en plus, en guise de prime !

Ce film réalisé par un français, Alfred Machin, est un film singulier, sorti à Bruxelles le 1° mai 1914, trois mois avant le début des hostilités. C'est un film pacifiste, et il fallait avoir un certain courage pour faire un tel film, en 1914, alors qu'en France, on préparait depuis quarante ans les esprits à la revanche contre le "boche" qui nous avait pris l'Alsace-Lorraine ! Si le film fut tourné en Belgique, ce n'est sans doute pas par hasard. Pour les raisons que l’on imagine, il ne resta pas longtemps à l’affiche, et reparaîtra un peu plus tard, sous un titre plus patriotique, et politiquement correct, "Mourir pour la patrie". Alfred Machin n'évitera pas la guerre et y prendra part en contribuant à la création du Service Cinématographique des Armées (on lui doit, entre autres, les images de la bataille de Verdun). En plus de son courage intellectuel, ce film se distingue aussi, pour nous aérocinéphiles, par son anticipation des combats aériens qui firent la guerre moderne, et allaient faire l'objet, jusqu'à nos jours, de très nombreux films.

Ce film bénéficia d'une grande mise en scène, pour l'époque, avec d'énormes moyens matériels et financiers. La production reçut également le concours de l’armée belge qui mit à sa disposition deux bataillons de fantassins (avec des uniformes de fantaisie), de l'artillerie, des ballons d'observation, des avions…

Deux familles de pays différents, les Modzel et les Hardeff, sont amies. Le fils Hardeff, Adolf, est aviateur militaire; il est accueilli chez les Modzel, dont le fils est également aviateur dans l'armée. Il vient visiter une exposition d'aéroplanes. Les Modzel ont aussi une fille, Liza, dont le charme séduit aussitôt Adolf. De tendres sentiments naissent entre les deux jeunes gens, mais un télégramme annonce que les deux pays viennent de se déclarer la guerre ! Adolf et Liza se font des adieux déchirants; il lui donne sa photo dédicacée, et elle lui confie une médaille, en souvenir. Adolf, dans son unité, pense constamment à Liza. Lors d'une mission, il doit bombarder les lignes ennemies, ainsi que des ballons d'observation fortement défendus. Son avion est touché par les tirs venus du sol, et il doit se poser dans les lignes ennemies. Il se réfugie dans un moulin à vent. Cerné, il se défend comme il peut à coups de pistolet. Il tue un officier qui n'est autre que son ami Modzel, qu'il n'a pas reconnu ! Pour en finir plus vite, un lieutenant ennemi donne l'ordre de dynamiter le moulin. On amène la dépouille d'Adolf, et l'officier prend la médaille de Liza qu'il avait sur lui. Après la guerre, le même officier se rend chez les Modzel pour leur raconter la fin de leur fils, qui était aussi son ami. Il décide en outre de revoir la belle Liza…Les deux jeunes gens finissent par sympathiser, jusqu"au jour où, se promenant avec lui dans les bois, Liza remarque sur sa tunique la médaille qu'elle avait donnée à Adolf. Il lui raconte alors comment il l'a prise sur le cadavre d'un ennemi. Liza comprend que c'est lui qui a tué Adolf, et que c'est Adolf qui a tué son frère ! Folle de douleur, elle se réfugie dans un couvent, avec la photo de son cher Adolf sur le coeur..

Cette fin rappelle un peu celle du film "The white sister"(1933) tourné par Victor Fleming avec Clark Gable, sauf qu'ici, le fiancé est vraiment mort. Au début du XX° siècle, comme au XVIII° siècle, les jeunes filles de la bonne société, avaient parfois l'habitude de résoudre leurs problèmes sentimentaux en entrant au couvent…Comme dans le film de 1933, Liza préfère se réfugier dans la religion. Mais Dieu n'était-il pas parti prenante dans cet affrontement ? Les Allemands étaient, en tout cas, sûrs de l'avoir de leur côté ("Gott mit uns"), et les Anglais aussi ("Dieu et mon droit"). Dieu est toujours resté muet sur la question…

Le film essaie d'exprimer toute l’horreur de cette boucherie insensée, du sacrifice inutile de jeunes vies fauchées sur le champ d'"honneur". On remarquera la différence entre l'accablement des personnages du film, civils et militaires, au moment de la déclaration de la guerre, et l'ambiance festive des actualités de l'époque (ou reconstituées après guerre), montrant des foules en liesse, des soldats s'embarquant joyeusement dans les trains, la fleur au canon. Aux "A Berlin !", répondaient les "Nach Paris !"…

 

Les avions du film :

Lors de ce qui ressemble à un salon aéronautique, sur un terrain non identifié, on observe plusieurs avions de l'époque. Il y a ainsi un monoplan Déperdussin TT (dont on ne voit que la partie avant). La Belgique en avait acheté deux qui furent rapidement cloués au sol, faute de pièces de rechange. Plus loin, on voit un Santos Dumont 20 Demoiselle, gréé d'un moteur bicylindre à plat (Darrack ?). Cet avion civil est à coté de ce qui semble être un monoplan Blackburn, surplombé par un Farman III, un modèle qui commençait déjà à être dépassé. On peut également observer un engin mystérieux, sorte d'hybride d'avion et d'hélicoptère. Il s'agit d'un aéronef à structure tubulaire muni de deux ailes en mouettes, d'un moteur rotatif à axe vertical (!), muni d'une hélice d'avion standard, situé sur le fuselage entre les ailes, et d'un poste de pilotage avancé, muni d'un manche coulissant verticalement ! On doute que cette "chose" puisse être un hélicoptère, peut-être un simulateur pour l'entraînement ?

Le principal avion du film est le Farman HF.20, en service dans quatre escadrilles de l'armée belge en 1914. Ces HF.20 sont sans marque de nationalité et apparaissent sans armement, si ce n'est des bombes (en fait des cylindres), embarquées dans le cockpit et lancées à la main ! Le HF.20 était avant tout un avion d'observation.

On voit également au sol un Farman III avec ses deux sièges en tandem, celui de l'observateur étant situé plus haut que celui du pilote, assis à l'avant. Faut-il préciser que cette sympathique trapanelle ne fut pas utilisée comme bombardier, même au tout début de la guerre de 14-18. Le réalisateur a utilisé ce qu'on lui prêtait.

 

Christian Santoir

* Film disponible sur Amazon.com

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