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Les diables de Guadalcanal

LES DIABLES DE GUADALCANAL

Vo. FLYING LEATHERNECKS

 

Année : 1952
Pays : Etats-Unis
Durée : 1 h 42 min.
Genre : guerre
Couleur

Réalisateur : Nicholas Ray
Scénario : James Edward Grant, Kenneth Gamet

Principaux acteurs :
John Wayne (Major Daniel Xavier Kirby), Robert Ryan (Capitaine Carl 'Griff' Griffin), Don Taylor (Lieutenant Vern 'Cowboy' Blithe), Janis Carter (Joan Kirby), Jay C. Flippen (master sergent Clancy), William Harrigan (Docteur Joe Curran), James Bell (Colonel), Barry Kelley (Brigadier Général), Maurice Jara (Shorty Vegay), Adam Williams (Lieutenant Bert Malotke), James Dobson (Lieutenant Pudge McCabe)

Musique : Roy Webb
Photographie : William E. Snyder
Prise de vues aériennes : Paul Mantz, Cliff Shirpser
Producteur : Edmund Grainger
Compagnie productrice : RKO Radio Pictures

Avions :

  • -Consolidated Catalina PBY-6A
  • -Douglas R6D  
  • -Douglas R5D  
  • -Grumman F6F-5
  • -North American SNJ
  • -Vought F4U-4 Corsair 

 

Notre avis :

L’éclatement du conflit coréen influença les films de guerre tournés par Hollywood. Les réalisateurs se crurent obligés de brandir la bannière étoilée et leurs productions rappellent, par bien des côtés, les films patriotiques sortis entre 1939 et 1945. Caractéristique de cette tendance, « Flying leathernecks » de la RKO, avec John Wayne en tête d’affiche, traite de la guerre du Pacifique et plus particulièrement des aviateurs du corps des Marines, surnommés « Leathernecks », les « cous de cuir », par référence au col de cuir de leurs uniformes, lors de la guerre d’Indépendance.

La production, comme mentionné au début du générique, est attribuée à Howard Hughes qui était devenu en 1948 le principal actionnaire de la RKO. Hughes voulant exploiter le succès récent de John Wayne dans « Sands of Iwo Jima », décida de le faire jouer de nouveau dans un film de guerre. Utilisant leurs relations parmi les militaires de Washington, Howard Hughes et le producteur Edmund Grainger, s’arrangèrent pour tourner sur la base des Marines de Pendleton (CA), où les troupes et l’équipement nécessaires étaient disponibles pour les scènes d’action. Le tournage commença à la fin novembre 1950 sur la partie nord de la base qui fut transformée en une base de temps de guerre. La piste goudronnée fut recouverte de sable et de coquillage concassé ; on planta des centaines de palmiers, on établit des fortification avec des sacs de sable, on érigea tout un village de tentes. Paul Mantz (qui n’apparaît pas dans le générique) s’occupa de toutes les prises de vues aériennes avec son North American TB-25H (N1203) transformé en avion caméra. En février 1951, les extérieurs étaient terminés et le tournage se poursuivit dans les studios de la RKO, à Culver City.

Tout commence à la base des marines d’Ewa à Hawaï, en 1942. Le major Dan Kirby arrive à l’escadrille de chasse des Marines VMF-247, en tant que nouveau commandant, alors que tout le monde dans l’unité attendait à ce que ce soit le capitaine Carl « Grif » Griffin ! Kirby est à cheval sur le règlement et le fait comprendre dès le premier jour. Affecté à « Cactus air field » à Guadalcanal, Kirby a peu d’avions, le terrain étant constamment attaqué par les Japonais. Ses pilotes sont jeunes et se conduisent parfois comme des enfants, en désobéissant aux ordres et en risquant follement leur vie et de précieux appareils. Kirby demande un effort maximum, mais son adjoint Griffin ne lui apparaît pas à la hauteur. Il est trop proche des hommes et a tendance à tout leur pardonner. L’un d’entre eux est son propre beau frère, Vern « Cow boy » Blithe. Kirby, au fond de lui même, n’aime pas son rôle et sait très bien qu’il envoie ses pilotes à la mort, mais la réussite des missions est la seule chose qui compte pour lui. Les dures conditions du combat le forcent à rester inflexible avec ses pilotes épuisés. Il refuse même un repos à l’un d’entre eux qui souffre de la malaria et qui sera abattu. La tension entre Kirby et Griffin devient extrême et les deux hommes ont une explication mouvementée. Kirby est favorable aux missions d’appui-feu demandées par les Marines. Le quartier général est indécis à ce sujet, mais l’infanterie piétinent devant les Japonais. Kirby ajuste sa tactique au prix de lourdes pertes, pour prouver qu’il a raison. A la tête de son escadrille, il détruit un convoi de ravitaillement japonais (« Tokyo express »). On le rappelle aux Etats-Unis où il peut exposer sa tactique d’appui rapproché aux troupes. Après une courte permission dans sa famille, Kirby, promu lieutenant-colonel, se voit confier le commandement d’une escadrille équipée du nouveau Corsair. Griffin est toujours à ses cotés. Alors qu’ils attaquent des kamikazes, à Okinawa, Griffin refuse que l’on porte assistance à son beau frère en difficulté pour éviter de disperser la formation ; son beau frère est tué. Kirby à court de munitions se jette sur un bombardier japonais ; blessé, il peut sauter en parachute à temps et il est repêché par la Navy. Il doit quitter l’escadrille, et cette fois, il désigne Griffin pour le remplacer, car il le sait maintenant capable de faire passer son devoir avant ses états d’âme. Ils se séparent en amis. Kirby  admet qu’ à chaque fois qu’il doit prendre une décision c’est pour lui un cauchemar, mais il revient au chef de maintenir la discipline et la cohésion du groupe, garantes de sa survie, même aux prix de décisions impopulaires..

Tant que le film reste en l’air et se concentre sur le développement de la puissance aérienne des Marines dans le Pacifique, c’est un film intéressant. Les Marines utilisaient le CAS (Close Air Support) en coordination avec, ou en remplacement de l’artillerie navale ou terrestre. Les Corsair des Marines utilisaient toutes sortes de munitions : bombes conventionnelles, napalm, roquettes, pour déloger les troupes japonaises retranchées dans des grottes, vers la fin du conflit. Mais ce n’était pas une tactique récente. Elle datait de la première guerre mondiale, et fut utilisée dans des conflits limités, comme le Nicaragua (Cf. « Flight » 1929). Malheureusement une grande partie de l’histoire des « Flying leathernecks » se passe au sol, en utilisant le thème passablement éculé de « The dawn patrol »(1930-1938) ou de « Twelve o’clock high »(1949), films dont « Flying leathernecks » apparaît comme une pale imitation.

On utilise dans ce film un grand nombre de films en couleur provenant de ciné-mitrailleuses ou de correspondants de guerre, qui ne collent ni au lieu, ni à l’époque. Il s’agit de films tournés à Iwo Jima (assaut contre le mont Suribachi), à Okinawa, lors des attaques kamikazes, ou lors du « tir au pigeon » des Mariannes. Le film comporte de nombreuses erreurs faites au montage et des problèmes de continuité. Pendant la campagne de Guadalcanal, des chasseurs Hellcat deviennent des bombardiers Helldivers (qui ne participèrent d’ailleurs pas à cette campagne). Quand les Hellcat attaquent des bateaux, on passe du jour à la nuit, et vice versa. Une formation de six appareils perd un avion, mais quelques instants après, elle est toujours au complet, etc…

Les « Diables de Guadalcanal » fut pourtant réalisé avec un certain souci d’exactitude. Ainsi, on remarque la « pagode » d’Henderson Field (« Cactus field », « cactus » étant le nom de code de l’île de Guadalcanal..), le centre des opérations américaines. Elle fut par la suite détruite, car constituant un repère trop facile pour les artilleurs des navires japonais, dont on évoque les bombardements d’octobre 1942. Le rôle du major Kirby est inspiré d’un personnage réel, le major John L. Smith, en poste à Guadalcanal en 1942. Ses faits d’armes étaient bien connus au moment du tournage. Smith reçut la Médaille d’Honneur du Congrès en 1943 et fut plus tard promu colonel, comme Kirby dans le film. Il y aussi une certaine ressemblance physique entre Wayne et Smith. L’escadrille de Smith était la VMF-223 (Bulldogs), alors que celle du film est la fictive VMF-247 (Wildcats). Parmi les pilotes du major Kirby, on compte un pilote d’origine indienne qui rappelle « Indian » Joe Bauer commandant la VMF 212, aux Nouvelles Hébrides, et qui fut tué le 14 novembre 1942.

Enfin, les aérocinéphiles remarqueront que pendant tout le film John Wayne pilote avec la main gauche, un micro dans la main droite; comment fait-il pour contrôler son moteur ?  Il semblerait qu’Hollywood, ou John Wayne, soit contre les laryngophones (avec contact sur la manette des gaz), pourtant introduits sur les chasseurs dès le début de la guerre. On retrouve cette bizarrerie dans plusieurs autres films comme « Flying Tigers » (1942).

La première du film eut lieu le 3 octobre 1951 à Hollywood. Les critiques furent partagées, notamment à cause de la prestation de John Wayne jugée par certains, moins bonne que dans « Sands of Iwo Jima ». En définitive, « Flying leathernecks » n’est sans doute pas le meilleur film d’aviation sur la seconde guerre mondiale, mais il reste un classique, sans doute à cause de la présence de John Wayne et de Robert Ryan, mais aussi à cause du Hellcat et du Corsair, mis ici en vedette.

 

Les avions du film :

Les Marines de la base de El Toro à Santa Anna (CA) fournirent quarante cinq avions issus, de l’escadrille d’entraînement VMT-2 et de l’escadrille de chasseurs bombardiers VMF-232 (Red Devils). Cette unité avait participé à la bataille de Guadalcanal en tant que VMSB-232 (Marine Scout Bomber) équipée de Douglas Dauntless. Avec l’ouverture des hostilités en Corée, la VMF 232 avait été placée en état d’alerte. Elle ne fut pas déployée en Corée mais servit comme unité d’entraînement aux pilotes qui devaient y être envoyés. Ces avions étaient composés principalement de Grumman F6F-5, de Vought F4U-4 Corsair et de quelques North American SNJ.

Six ans après la fin de la guerre du Pacifique, il n’y avait plus de F4F Wildcat, qui était la vraie monture des Marines à Guadalcanal, en août 1942. Le Hellcat participa à la conquête des Salomons du Nord, mais pas à celle de Guadalcanal. La décoration des avions du film ne correspond pas non plus à l’époque ; le bleu des surfaces supérieures était moins soutenu et l’étoile de l’insigne nationale était inscrite dans un cercle sans ailes (et ce, jusqu’en juin 1943). Les Hellcat portent un "L" gris sur la dérive. Certains avions sont équipés de roquettes et d’une bombe de 450 kg. Un film montre des Hellcat décollant du pont de l’USS « Bennington » (CV20).

Dans le film, la VMF 247 passe directement des Hellcat aux Corsair. En fait, les Marines ne mirent en oeuvre pendant la bataille de Guadalcanal que des Wildcat, des Dauntless, des Avenger et des Grumman Duck. Les premiers Corsair (des F4U-1 de la VMF 124) n’arrivèrent que le 12 février 1943, trois jours après la fin de la bataille. Un document inséré dans le film montre des Corsair de la VF-84 décollant du porte avions USS « Bunker Hill » (CV17), dont certains sont catapultés. Les documents filmés montrent d’autres appareils américains comme des Grumman TBM Avenger et des Curtiss SB2C Helldiver.

Les avions japonais sont représentés par les habituels North American SNJ Texan, ou des Hellcat (moins ressemblants), de couleur claire, gris ou vert jaunâtre (comme de juste..). D’autres avions japonais apparaissent dans les images de ciné-mitrailleuses prises pendant la bataille des Mariannes (juin 1944). On reconnaît des Mitsubishi Zéro, des Nakajima Hayabusa, des bombardiers, dont un Mitsubishi G4M2 portant un petit avion à fusée Yokosuka Ohka, lors d’une mission kamikaze.

En plus des Hellcat et des Corsair, le tournage utilisa un Consolidated Catalina PBY-6A qui est détruit au sol. Le Catalina fut le tout premier appareil à atterrir à Henderson field, le 12 août 1942, quatre jours après que les Japonais en aient été chassés. Il se permit même de couler un bateau japonais à cette occasion. Au bord du terrain, gît une épave de Douglas A-20 ou P 70. Les incursions nocturnes d’avions japonais avaient effectivement nécessité l’intervention de Douglas P-70, la version chasseur de nuit du Boston. Mais leur radar à courte portée, leur faible autonomie, ne leur permirent pas d’enregistrer beaucoup de victoires.

Le major Kirby rentre aux USA à bord d’un Douglas R6D (C-54).). A la fin du film, le Douglas R5D (C-47) dans lequel il s’apprête à embarquer, se transforme, par la magie du cinéma, en R6D, quand il emprunte l’échelle d’accès !

 

Christian Santoir

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