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Le voyage fantastique

 

LE VOYAGE FANTASTIQUE

Vo. No highway in the sky

 

Année : 1951
Pays : Grande-Bretagne
Genre: Drame
Durée : 1h 38 min.
Noir et blanc

Réalisateur : Henry Koster
Scénario : R.C. Sherriff
Histoire originale : Nevil Shute

Acteurs principaux :
James Stewart (Theodore Honey), Marlene Dietrich (Monica Teasdale), Glynis Johns (Marjorie Corder), Jack Hawkins (Dennis Scott), Janette Scott (Elspeth Honey), Elizabeth Allan (Shirley Scott), Ronald Squire (Sir John), Jill Clifford (Peggy, Stewardess)

Musique : Malcolm Arnold
Photo : Georges Périnal
Producteur : Louis D. Lighton

Compagnie productrice : 20th Century Fox

Avions :

  • Avro Lancaster B Mk.VII
  • De Havilland DH.100 Vampire, document.
  • Gloster E1/44, document.

 

Notre avis :

Si ce voyage n’est pas « fantastique », mais plutôt angoissant, il y a bien des « autoroutes » dans le ciel, baptisées « airways », même en 1951, sauf qu’à cette époque, elles n’étaient pas surchargées comme de nos jours. Mais le sujet du film n’est pas la circulation aérienne, comme le laisserait penser le titre anglo-saxon, mais un problème beaucoup plus technique, à savoir la fatigue des métaux ! Et pour traiter de cette matière ardue, la Fox fit appel à deux grandes vedettes, James Stewart (un pilote et un habitué des films d’aviation) et Marlène Dietrich. Il fallait bien çà !

La fatigue des métaux est un phénomène connue de longue date par les ingénieurs. Quand les avions n’allaient pas très vite, ni très haut, elle ne posait pas trop de problèmes aux constructeurs. Après la guerre, avec l’apparition de la pressurisation, des vitesses de plus en plus rapides, des altitudes de plus en plus élevées, des charge alaires de plus en plus fortes, la structure des avions fut soumise à très rude épreuve. De nouveaux alliages d’aluminium furent certes employés mais, les avions, très chers, devaient être utilisés plus longtemps pour être rentables. Les laboratoires aéronautiques ne disposaient alors que d’un faible équipement et les connaissances sur la fatigue des métaux restaient limitées. En 1947, Sir Alfred Pugsley, le chef du Structural and Mechanical Engineering Departement (un rôle joué par Ronald Squire dans le film) du RAE (Royal Air Establishment) de Farnborough tira la sonnette d’alarme en déclarant que la vie des avions construits jusqu’ici ne dépassait pas le temps d’utilisation commerciale nécessaire à les rentabiliser. Fin 1951, des inspections faites sur plusieurs avions révélèrent des longerons, des cadres, des lisses, endommagés, voir fendus ; plusieurs accidents dus à ce problème, eurent lieu. C’est dans ce contexte que le film fut tourné.

Lors de son premier jour au RAE, le spécialiste des métaux Dennis Scott fait la connaissance du chercheur Theodore Honey, un veuf excentrique qui vit seul avec sa fille, Elpeth. Il est intrigué par ses déclarations selon lesquelles le dernier avion de l’établissement, le « Reindeer », est condamné, car après 1 440 heures de vol, l’empennage de l’avion doit mathématiquement céder à cause des vibrations ! Mais Honey n’a fait part à personne de ses recherches et continue les tests en laboratoire pour être sûr. L’avion a été mis en service et un exemplaire vient de se crasher au Labrador ! Scott envoie Honey enquêter sur place. C’est la première fois que ce spécialiste en aéronautique prend l’avion et l’hôtesse, Marjorie Corder, s’occupe particulièrement de lui. Une fois en l’air, Honey apprend qu’il est à bord d’un Reindeer et que cet avion a déjà 1422 heures de vol ! Honey, quelque peu paniqué, veut convaincre le commandant de bord de faire aussitôt demi tour, mais il est trop tard ; la prochaine escale est Gander. Pendant ce temps, Honey explique à l’hôtesse et à une passagère, la star Monica Teasdale qui état l’idole de son épouse décédée, que le meilleur emplacement en cas de crash sont les toilettes des hommes…L’avion atterrit sans problème à Gander et le commandant fait inspecter la queue de l’appareil; il ordonne que Honey soit tenu à l’écart des passagers. Mais celui ci, voyant que l’avion va repartir décide de l’immobiliser définitivement en rentrant le train d’atterrissage. L’avion s’affaisse sur le parking ! Monica et l’hôtesse pensent que Honey doit avoir raison. De retour en Angleterre, elles s’occupent de la fille d’Honey, une fillette de 12 ans très mure pour son âge. Au RAE, le directeur et l’ingénieur Scott ne savent que faire ; laisser voler le Reindeer peut comporter un risque fatal si la théorie d’Honey est correcte, le retirer des opérations revient à faire perdre une fortune à la compagnie aérienne. Scott fait accélérer les essais sur l’empennage. Monica continue à s’occuper du ménage d’Honey alors qu’un comité doit décider si Honey est sain d’esprit ou non. Après 1522 heures d’essai, l’empennage de l’appareil tient toujours, et même Honey commence à douter de ses propres travaux. Le comité de direction décide qu’il ne peut clouer au sol le Reindeer sur les seuls hypothèses d’Honey ; celui-ci donne alors sa démission. De retour à la maison, Marjorie le félicite pour la fermeté de ses opinions, mais le réprimande sur la mauvaise tenue des ses comptes domestiques... Honey retourne à son laboratoire pour récupérer ses affaires, quand Scott et le directeur lui apprennent qu’au Labrador, l’enquête a conclu que la rupture de la queue était responsable de l‘accident. C’est à ce moment là que l’empennage du Rendeer cède avec fracas ! Honey réalise d’un coup qu’il a oublié de tenir compte d’un paramètre important dans ses calculs : la température !

Il est intéressant de noter que les angoisses du Dr Honey, sorte de professeur Tournesol avec chapeau mou et parapluie, étaient en quelque sorte prémonitoires. En mai 1953, en janvier et avril 1954, trois De Havilland Comet 1 explosèrent en plein vol. Les enquêtes et les tests effectués sur d’autres appareils, montrèrent qu’ils avaient été victimes de décompressions explosives dues à la fatigue du métal autour des hublots. Ces accidents devaient marquer le destin du Comet, même après que ce défaut fusse corrigé.

Malgré un sujet peu cinématographique, le réalisateur, dont ce fut le seul film d’aviation, a réussi à faire un bon film, très bien joué, et possédant un réel suspens. On peut considérer que « Le voyage fantastique » fait partie des premiers films catastrophes, version aviation, un genre qui allait se développer vingt ans plus tard.

 

Les avions du film :

Un De Havilland DH.100 Vampire, à l’atterrissage, survole le portail du RAE., au tout début du film.  

 Au RAE, atterrit un rare Gloster E1/44 (TX145), le second prototype qui fit son premier vol en 1948. Cet avion fut abandonné l’année suivante vu son faible potentiel de développement et ferraillé en 1951. 

Le Dr. Honey rentre en Angleterre, avec un Avro Lancaster B MkVII (NX636) débarrassé de son armement. Mais la vedette est le "Reindeer" (renne) doté d’une immatriculation fictive (G-AFOH) et qui est un pur produit des studios.

Comment faire un « Reindeer » ?  Prenez un fuselage de section ronde genre Hermes, ajoutez y des hublots carrés rapprochés, style Dewoitine 338 ou SE Languedoc, et un toit de cockpit en forme de dome, style Canberra ou De Havilland Dove, à l’intérieur duquel vous installez un tableau de bord façon loupe d’orme, comme sur une Jaguar ou une Bentley, le tout couronné par une dérive genre proue de gondole vénitienne avec un stabilo biplan comme sur certains avions allemands Fieseler et Caspar des années 30. Puis, prenez une aile large qui ne ressemble à  rien, ajoutez y des turbo propulseurs presque identiques à ceux du Republic XF-12, et un train d’atterrissage principal genre HP. Hastings. ou Halifax Cet avion aurait été, en fait, élaboré à partir d'une cellule de Handley Page H.P.70 Halifax C.VIII (c/n 1369, serial PP296 puis G-AJNW) qui fut ferraillée en décembre 1950, peu après le tournage. Mais il est impossible de retrouver les formes de l'Halifax dans le Reindeer...

Comme il se doit pour un appareil aussi original, les membres de l’équipage porteront un uniforme avec des insignes frappées d’un dix-cors qui les fera ressembler à des garde chasses ou à des agents des Eaux et Forets. On est là en plein baroque anglais, ce qui contribue au charme de ce film (doesnt it ?). Comment s’étonner après ça que le Dr. Honey se sente mal à l’aise dans un tel monstre ? Les studios étaient ainsi surs de faire un avion ne ressemblant à aucun autre, (ou à plusieurs) et de ne froisser aucune susceptibilité…Au fait, pourquoi avoir appelé cet avion du nom d’un cervidé ? Sauf erreur, il faudra attendre 1958, pour voir apparaître un autre renne, mais canadien celui là, le « Caribou », un DHC-4.

 

Christian Santoir

* Film disponible sur amazon.fr

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