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LE LION A DES AILES

 

LE LION A DES AILES

Vo. The lion has wings

 

Année : 1939
Pays : Grande-Bretagne
Genre : guerre
Durée : 1 h 16 min.
Noir et blanc

Réalisateurs : Adrian Brunel, Brian Desmond Hurst
Scénaristes : Adrian Brunel, Ian Dalrymple

Acteurs principaux :
Merle Oberon (Mme. Richardson), Ralph Richardson (Wing Commander Richardson), June Duprez (June), Robert Douglas (l'officier du briefing), Anthony Bushell (un pilote), Brian Worth Bobby, Austin Trevor (Schulemburg).
 

Musique : Richard Addinsell
Photographie : Osmond Borradaile, Bernard Browne, Harry Stradling Sr.
Producteur : Alexander Korda
Compagnie productrice : London Film Productions

Avions :

  • Avro Anson
  • Fairey Battle
  • Supermarine Spitfire Mk.I
  • Vickers Wellington Mk.I

 

Notre avis :

"Le lion a des ailes" fut le premier film de propagande anglais réalisé juste après le début de la guerre en Europe. Il sortit en salle, en France, le 27 décembre 1939. Il fut tourné en douze jours en faisant appel à de nombreux documents filmés, entrecoupés de scènes reconstituées dans les studios de Denham. Produit par Alexandre Korda, il fut tourné en coopération avec la Royal Air Force et le Ministère de l'Information. La moitié des bénéfices fut reversé au War Fund.

Le but principal du film était de rassurer le public anglais et de lui prouver que le pays n'allait pas être détruit en cinq minutes, la RAF étant là pour le protéger. On filma donc des unités du Bomber Command comme du Fighter Command, sur leurs bases de Hornchurch (Essex) et Mildenhall (Suffolk)

Le film commence par montrer une Grande-Bretagne paisible, où les individus s'épanouissent en liberté, alors qu'en Allemagne, les nazis enrégimentent les citoyens. Le squadron leader W.C. Richardson, son épouse et Bobby, un jeune parent venu du Canada s'engager dans la RAF, assistent au meeting d'Hendon de 1937. La paix est cependant menacée quand Hitler réoccupe la Ruhr, annexe l'Autriche et envahit la Tchécoslovaquie, puis la Pologne. Quand le premier ministre Churchill prononce son discours historique déclarant la guerre à l'Allemagne, le pays est prêt. Après avoir fait ses adieux à son épouse et à June, la petite amie de Bobby, Richardson et Bobby rejoignent leurs affectations. Les deux femmes s'engagent dans un poste de secours ouvert pendant les alertes. Sur le front, les bombardiers britanniques partent attaquer des bateaux allemands prés du canal de Kiel. Après quelques minutes angoissantes, les équipages retournent, triomphants, à leur base, les navires ayant été coulés. Good show ! Richardson qui est devenu wing commander, est officier contrôleur sur la base où Bobby est affecté. Il doit faire face à deux vagues de bombardiers allemands venus attaquer Londres, la nuit. Les chasseurs, guidés par les postes de guet, les repoussent et la deuxième vague est empêchée de bombarder par les barrages de ballons. Ils sont harcelés par les chasseurs jusqu'à la côte. Après un tour de service épuisant, Richardson retourne chez lui, où sa femme le rejoint après avoir achevé son service. Il fait beau et ils partent tous les deux dans la campagne. Ils comprennent que leur liberté devra se payer au prix fort…

Ce film de propagande comporte plusieurs erreurs sur le déroulement des faits qui menèrent à la guerre. L'occupation de la Rhénanie n'intervint pas en mars 1934, mais deux ans plus tard... Quand l'Allemagne annexe les Sudètes, on ne mentionne pas que la Hongrie envahit le sud de la Tchécoslovaquie, ni que la Pologne annexa le territoire tchèque de Cieszyn, après les accords de Munich…

En dehors de ces inexactitudes ou oublis historiques, les missions de guerre effectuées par les bombardiers sont aussi assez fantaisistes. S'il est bien vrai que la RAF attaqua la Kriegsmarine, dès le 4 septembre, la mission des Wellington sur Brunsbüttel, à l'entrée du canal de Kiel, ne se passa pas aussi simplement. Deux Wellington furent abattus et le résultats du bombardement furent plus que médiocres. Les raids diurnes sans escorte de chasse seront abandonnés en avril 1940, vu les pertes. Le plan de vol qui est exposé fournit, en outre, des caps bizarres : 110° (ESE), puis 145° et 121° (SE). Cela aurait dû normalement les emmener en Suisse, à moins qu'ils aient décollé d'une base en Ecosse !

Le raid allemand sur Londres n'est pas moins fantaisiste. Le bombardement de Londres ne commença qu'en septembre 1940, seuls les terrains d'aviation et les stations radar étant attaqués jusque là. Les avions allemands sont repérés par des observateurs (spotters) armés de jumelles et de théodolites et suivis par des projecteurs. On fait également usage d'appareils de repérage par le son. Aucune mention n'est faite du radar, encore ultra secret, mais dont les antennes étaient pourtant bien visibles. Les barrages de ballons sont présentés comme une nouvelle parade jamais utilisée pour protéger une ville. Ils dissuadent les avions allemands de poursuivre leur raid ! Finalement aucune bombe ne tombe sur Londres. C'était vraiment prendre ses désirs pour la réalité. Quant à intercepter des avions, la nuit, la RAF en était pratiquement incapable en janvier 1940. Le blitz rendra ces scènes parfaitement ridicules !

La salle d'opération qui ressemble à peu près aux vraies, n'est occupée que par des hommes qui allaient bientôt recevoir d'autres affectations plus exposées… On remarquera Richardson suivant les combats aériens à la radio, un artifice cinématographique qui allait être souvent employé dans les films d'aviation, pendant la guerre, et qui est très économique...

Le passage, au début du film, où Richardson affirme à sa femme inquiète, que l'Angleterre n'a jamais été aussi bien préparée (après le "peace in our time !" de Chamberlain en 1938, on aurait pu en douter…) provoquait des remous parmi le spectateurs ! Les scènes tournées en studio montrent des pilotes à la mise soignée, issus des classes aisées de la population. Les commandants des bombardiers s'adressent aux officiers par leur prénom, mais, aux sous officiers, par leur nom. Les Allemands apparaissent comme des brutes épaisses, portant parfois des moustaches. !

Bref, avec le recul, "Le lion a des ailes" semble incroyablement naïf. Néanmoins, il fut bien accueilli quand il sortit fin octobre 1939, par les spectateurs mais aussi par le roi George VI qui assista à une projection publique. Conscients que c'était une oeuvre de propagande, spectateurs et critiques approuvaient ce film patriotique. Ce furent les scènes qui montraient des bombardiers et des chasseurs à l'oeuvre qui remportèrent le plus grand succès, la reconstitution de la mission sur Kiel apparaissant d'un réalisme saisissant ! On comprend, qu'à l'époque, le public anglais était peu averti des choses de l'aviation…En tout, le film rapporta plus de 50.000 livres de bénéfices.

 

Les avions du film :

Les cellules d'un Vickers Wellington et d'un Spitfire furent fournies par la RAF pour les tournages en studio.

Les images du dernier "RAF day" d'Hendon qui se tint le 26 juin 1937, prises au sol comme dans les airs, montrent une grande quantité d'avions, mais principalement des biplans, déjà obsolètes en 1939 : Bristol Bulldog, Hawker Fury I (dont le K2053). On notera les très belles évolutions des quatre Fury de la patrouille acrobatique du Squadron 1, dirigée par le flight lieutenant E.M. Donaldson.

Ceux qui ont l'œil, ou un bon ralenti sur image, pourront voir plusieurs prototypes exposés dans un coin : le chasseur monoplan Gloster F.5/34, les bombardier léger Fairey P.4/34 et Hawker Henley (avec le numéro 6), le Fairey Fulmar, et un biplan cible radiocommandé (n°4) , l'Airspeed Q.32/35, qui ne s'appelait pas encore Queen Wasp. Un peu plus loin, on voit l'avion de transport quadrimoteur De Havilland DH.91 Albatros qui venait de faire ses premiers vols quelques semaines auparavant. Tous ces avions, ne furent guère des réussites. Ces vues du meeting d'Hendon de 1937 avaient été prises pour le film "Shadow of the wings" de la MGM, qui ne fut pas réalisé.

Plus tard, on voit les Vickers Wellington du 149 Squadron (code "OJ") de la base fictive de "Great Milton" (en réalité Milden hall dans le Suffolk), partir attaquer les bateaux de guerre allemands à Kiel. On voit également des Wellington Mk.I du Squadron 99 (code d'avant guerre VF) dispersés dans les vergers. Les images sont intéressantes, car elles montent les premiers Wellington Mk. I (dont le L4346), équipés de tourelles Vickers (où seule, l'arme était mobile) situées aux extrémités du fuselage. On voit aussi un Mk.IC avec les nouvelles tourelles Frazer-Nash, au roulage. On assiste au montage des bombardiers. dans l'usine de Weybridge, le commentateur précisant que "le Wellington transporte une charge énorme de bombes, à très grande distance et à grande vitesse" ! Traduisons : 2 tonnes de bombes à 2 900 km, à la vitesse de 350 km/h…

Le film fournit de très bonnes vues de l'intérieur du Wellington et des postes des six membres d'équipage, dont celui du bombardier avec son viseur CSBS Mk.IX. On remarque que le commandant de bord ne rejoint son poste (la place du pilote) qu'à l'approche de la côte ennemie. L'avion leader donne le signal d'attaque aux autres avions, avec une fusée Very.

Un cockpit de Wellington sert aussi pour figurer les cockpits des bombardiers allemands. Les Wellington sont attaqués par des Spitfire et des Fairey Battle qui jouent les chasseurs allemands.

Les Spitfire des squadrons fictifs "299 et 301" de la non moins fictive base de "Brackstead", sont des Mk.I du Squadron 74 (code "ZP") basé à Hornchurch (Essex) où on voit aussi une rangée de Fairey Battle. On remarque que leur pare brise n'est pas blindé. L'autre chasseur anglais qui s'illustrera lors de la Bataille d'Angleterre, le Hawker Hurricane, n'est montré que sur les chaînes d'assemblage, alors qu'il équipait la RAF depuis la fin 1937.

Les avions allemands sont issus de documentaires montrant un Heinkel He-111, un quadrimoteur Focke Wulf Fw.200 Condor de la Lufthansa, des chasseurs Heinkel He–51 et un Junkers Ju-52. Le raid contre Londres est composé principalement de Ju-52 qui apparaissent aussi sous forme de maquettes…

Enfin, une formation d'Avro Anson clôt le film.

 

Christian Santoir

* Film disponible  sur amazon.fr

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