Kessen no ôzora e
Vo. 決戦の大空へ
Année : 1943
Pays ; Japon
Durée : 1 h 31 min.
Genre : guerre
Noir et blanc
Réalisateur : Kunio watanabe
Acteurs principaux :
Setsuko Hara (Mme. Haru Matsumara),
Kinuyo Tanaka, Hideko Takamine, Haruko Wanibuchi, Ken Uehara, Hiroshi Akutagawa,
Kurokawa Yataro
Compagnie productrice : Toho
Avions
- Mitsubishi L3Y1
- Nakajima E8N1, document
- Nihon Kogata "Tobi", Ki-24
- Yokosho K4Y1
Notre avis :
Ce film traite de façon quasi documentaire, de l’entraînement des jeunes pilotes de la Marine impériale sur la base de Tsuchiura, près de Tokyo. C’est un film de propagande pour l’enrôlement des jeunes hommes dans le programme « Yokaren » (contraction de Hiko Yoka Renshu Sei) de formation des pilotes réservistes de la Marine. Ce programme destiné aux civils fut mis en place dès 1930. Le nombre d’élèves ne cessa de croître au gré des événements (invasion de la Chine en 1937, déclaration de guerre aux Etats-Unis en 1941), et augmenta de façon significative, lors des deux dernières années de la guerre. De nombreux pilotes et membres d’équipage sortis de ces écoles, participèrent à des missions kamikazes, et tout à la fin de la guerre, les effectifs en formation étaient encore importants. En 1940, la base aérienne de Tsushiura, à 55 km au nord est de Tokyo, où fut tourné le film, devint la première base de formation du «Yokaren », mais la Marine créa plus tard, d’autres bases au Japon et outre mer, quand le nombre d’élèves s’accrut.
L’histoire commence par une séance de link-trainer à base de Tsushiura, pour apprendre aux élèves les rudiments du pilotage. Puis on passe aux premières leçons sur hydravion. Les élèves attendent assis en rang, que l’on appelle leur nom, puis ils se présentent un à un devant les officiers, assis également devant le plan d’eau, avant de monter dans l’hydravion où les attend le moniteur. Lors de leurs permissions, le dimanche, quelques cadets investissent la maison de Haru Matsumura, une veuve avec trois enfants. Sa maison, proche de la base aéronavale, est devenue pour eux une sorte de pension de famille. Madame Matsumura les traite comme ses enfants. Les jeunes gens, loin de leurs familles, apprécient l’ambiance familiale et les petits plats préparés à la maison. Ils racontent leur vie à la caserne avec ses moments drôles et moins drôles. Les filles de la maison, Sugi et Shigeko, adorent regarder les avions voler, alors que leur jeune cousin Katsuhiko, un être maladif, rêve de devenir pilote. Les cadets le pressent de s’enrôler et l’aident, à préparer ses examens. Sa soeur aînée, Haru, va se dévouer entièrement pour lui insuffler la force de surmonter sa maladie, pour devenir un digne pilote de la Marine. A l’école, la journée commence à 5 h 15 (en été) au son de la trompette avec le démontage des hamacs, dans lesquels dorment les cadets, et se termine à 21 h 15. Les journées sont bien remplies, et le film ne nous épargne aucun domaine du cursus : gymnastique, nage, plongeon, lutte, art martiaux (judo, kendo), courses d’endurance, exercice de Morse (dont les élèves chantent en coeur les lettres !), de télégraphie, cours de sémaphore, entrecoupés de cours magistraux, exercice de navigation à voile, mais aussi cours de mécanique avion. Les repas sont pris dans les chambrées : les temps de repos apparaissent rares et mis à profit pour des travaux de couture.. A 18h50, c’est l’appel, puis la descente des hamacs et leur fixation aux poutres du dortoir. La nuit, les gradés veillent, assis sous les hamacs ! Le jeune Katsuhiko, après avoir été malade, réussit à passer les épreuves d’incorporation, dont une visite médicale très complète. Il troque son uniforme de collégien contre la tunique à sept boutons de cuivre et la casquette du Yokaren ; il se conduit déjà en vrai petit soldat. Les cadets peaufinent leur formation en partant en mer sur un croiseur, qui se livre à des exercices de tir après avoir catapulter un hydravion éclaireur. A la caserne, comme chez Mme Matsumura, les cadets écoutent à la radio les exploits de leur aînés dans le Pacifique, contre les Anglais et les Américains. Quand passe le chant du yokaren, ils l’entonnent tous en coeur avec la famille. A l’école, une nouvelle promotion va bientôt sortir. Les jeunes partent en camions vers leur affectation, salués par la population. Le visage de Mme Matsumura rayonne de joie en voyant passer « ses » cadets. Haut dans le ciel, défilent des formations d’avions, comme de grands vols d’oiseaux migrateurs..
On a l’impression que toutes ces femmes (car il n’y pratiquement pas d’hommes en civil dans le film) n’ont aucune idée de ce qui attend les jeunes, et n’ont pas l’air de comprendre que tout çà va mal finir ! Pourtant les paroles du chant des yokaren, entonné aussi par les femmes Matsumura, sont assez claires:
« Le ciel de la dernière bataille est rouge de sang.
Attaquez les ! Descendez les ! Mais leur nombre augmente,
C’est l’heure de faire appel à l’esprit de Tsushiura ! »
Alors que l’accent est mis sur les aviateurs, le rôle important de Mme Matsumura et de ses filles , en encourageant leurs progrès et en leur fournissant une aide sociale et affective, est capital. Le rôle de la mère, ou de la soeur aînée "militariste", qui, non seulement donne son fils ou frère à la nation, mais l'encourage en plus, à faire le sacrifice de sa vie, est un personnage standard du film de guerre japonais. Un thème important ici, comme dans d’autres films japonais, est le caractère paternaliste de la préparation militaire. Miamura, l’instructeur, prend soin des ses élèves et les traite comme de jeunes frères, même quand il les pousse à se surpasser. Il est vrai que le recrutement semble se faire à un âge tendre…Comme dans les autres films japonais, le père est généralement absent ou mort (Mme Matsumura est veuve), et son influence est par conséquent remplacée par celle de l'instructeur. Les garçons que l’on voit passer les épreuves de sélection physique n’ont guère plus de quinze ans. C’est assez différent du système nazi qui sort très tôt l’enfant de sa famille pour mieux l’endoctriner dans des camps et l’amalgamer dans un groupe. Dans l’Allemagne de l’époque, les valeurs familiales en matière d’éducation étaient fortement contestées et même considérées comme rétrogrades par les nazis. Mais à la caserne, méthode japonaise et allemande se rejoignent, et les jeunes endurent un vrai drill à la prussienne : commandements et réponses aboyés, discipline de fer, ordre parfait, obéissance immédiate...Vers la fin du film, un documentaire montre les cadets défiler devant le sanctuaire shinto de Yasukuni qui rendait hommage à tous les soldats japonais morts pour la patrie, mais aussi un lieu où les Japonais venaient rencontrer les âmes de leurs défunts.
Ce film où l’élément féminin joue un rôle important, eut surtout du succès auprès des hommes, les femmes ne constituant qu’environ un quart des spectateurs. Elles avaient sans doute compris que cette belle propagande transpirait le sang; 80% des diplômés des yokaren moururent au combat.
Les avions du film :
On remarquera tout d’abord qu’avant de monter dans un avion, les élèves font du link-trainer sans capote, pour permettre de déterminer les aptitudes au pilotage des élèves. Dans les écoles occidentales, le link-trainer intervenait plutôt à la fin de la formation, et était réservé à l’apprentissage du pilotage sans visibilité. L’entraînement de base se fait sur l’hydravion à flotteurs Yokosho K4Y1 (Type 90), l’instructeur s’installant à l’avant au début. Les cadets pratiquent aussi le vol à voile sur un planeur Nihon Kogata "Tobi", Ki-24.
Lors d’un exercice en mer, une des deux catapultes du croiseur lourd « Ashigara » lance un hydravion Nakajima E8N1 (type 95) dont la dérive porte le nom du navire en caractère kana. Au sol, sur la base de Tsushiura, on aperçoit en premier plan, un Mitsubishi L3Y1, la version transport de passagers du bombardier G3M2, que l’on voit plus tard sur des films d’actualité.
Quand la radio relate les combats en cours, le film montre un Mitsubishi A6M2 Zéro combattant des Grumman Wildcat (en maquettes), et très furtivement un B-24 Liberator.
* Film en vente sur YesAsia.com
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