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IM POKORYAYETSIA NEBO

 

IM POKORYAYETSIA NEBO

(Ils conquièrent le ciel)

 

Année : 1963
Pays : URSS
Genre: Drame
Durée: 1 h 40 min.
Noir et blanc

Réalisateur :Tatyana LIOZNOVA
Scénario par: Anatoli AGRANOVSKY, Leonid AGRANOVITCH

Acteurs principaux:
Nicholas RYBNIKOV (Alex Stepanovich Kolchin), Vladimir SEDOV (Sergei I. Sharov), Svetlana SVETLICHNAYA (Nina Kolchin), Evgeni   EVSTIGNEEV (Chef concepteur Ivan Sergueïevitch), Oleg ZHAKOV (Oleg Basargin), Georgi KULIKOV (Vitaly I.), Nicholas POGODINE (Vladimir )

Photographie : Valeri GUINZBOURG
Musique : Andreï ECHPAI
Producteur : Victor FREILICH
Compagnie productrice : Gorky Film Studios

Avions :

  • Lavochkin La-11
  • MiG-9
  • Polikarpov I-16, en arrière-plan
  • Tupolev Tu. 2M  

 

Notre avis :

La réalisatrice de ce film avait été étudiante à l'Institut Aéronautique de Moscou, alors que ses parents désiraient qu'elle devienne ingénieur. Bien qu'elle n'y soit restée qu'un seul trimestre, elle a dû s'en souvenir quand elle envisagea, bien plus tard, de faire ce film dédié à la mémoire des pilotes d'essai morts dans leurs cockpits. Ce film se propose ainsi de retracer l'histoire du premier chasseur à réaction conçu en URSS, de la planche à dessin jusqu'aux essais. Le scenario est basé sur le livre de A. Agranovsky, sur ceux qui ont dessiné, conçu et construit le premier jet de chasse soviétique, en l'occurrence, le Mig-9. Traduire à l'écran ce quasi documentaire (avec parfois, la voix off du commentateur) n'a pas été chose facile, car il n'y avait pas d'intrigue, au sens habituel du terme.

L'un des consultants du film fut le célèbre pilote d'essai, Héros de l'Union soviétique, Grigory Alexandrovich Sedov, qui fut chargé des essais des MiG-17 et MiG-19, entre autres. Il servit de modèle au  personnage principal, Alex Kolchin, un homme alliant courage et humilité.

Le film ouvre sur un meeting  auquel assistent de nombreux officiers étrangers (dont des Français) qui prennent fébrilement des notes, tout en observant un défilé aérien impressionnant. Puis, on passe aux bureaux de l'OKB-155 (Bureau d'études expérimentales 155, MiG) où des ingénieurs discutent de leur nouveau projet, un chasseur à réaction. Il leur faut d'abord définir la forme générale. Après maintes discussions, le choix se porte d'abord sur un biréacteur avec les moteurs situés sous les ailes, puis, ces moteurs sont réunis dans le fuselage afin d'obtenir une meilleure finesse, vu le peu de puissance des réacteurs disponibles. Le film nous présente ensuite le pilote d'essais, Alex Kolchin, lors d'un retour en arrière. En essayant un chasseur, il manque de se tuer et ne rétablit son appareil qu'au ras des pâquerettes, après une vrille bien longue...Un de ses camarades revient avec un bimoteur dont les gouvernes sont entièrement déformées. Ces essais sont observés par sa petite amie Nina, qui est infirmière. Elle a d'ailleurs l'occasion de le soigner, quand il est blessé lors d'un autre essai qui s'est mal terminé...Bien que Nina ait pris conscience de la dangerosité du métier d'Alex, ils se marient et ont un petite fille. Puis on revient au temps présent. Le nouveau chasseur prend forme et on assiste au premier allumage des réacteurs, ce qui ne se fait pas sans mal. Alex est  chargé de faire faire son premier vol à la machine. Celui ci se passe sans histoire et il est l'occasion d'une petite fête entre les pilotes et les ingénieurs. Les essais se poursuivent avec leurs lots d'incidents plus ou moins graves. Mais un jour, Alex n'arrive pas à maitriser son avion et il se tue. Nina, à la maison, a entendu l'explosion et a tout de suite compris...Les ingénieurs en réécoutant les enregistrements des communications d'Alex, arrivent à trouver ce qui a cloché. Un collègue d'Alex, Sergey Sharov, va reprendre les essais avec le deuxième prototype. Le problème est résolu et la production va pouvoir commencer. Le chapitre des essais du nouvel avion est clos.

Le film suit d'assez prés la réalité. La ressemblance des principaux acteurs avec leurs modèles a été poussée assez loin. On reconnaît ainsi facilement, le matheux, Mikhail Iossifovitch Guryevitch, avec son crane chauve, ses lunettes et sa règle à calcul, et l'organisateur, Artyom Ivanovitch Mikoyan, un homme très différent, prenant grand soin de sa personne (quand on demande un crayon à son sosie, dans le film, il sort un peigne de sa poche...).

Le film montre l'épure du premier projet de chasseur, le Mikoyan I-260 (Izdeliye F) datant de mai 1945 et ressemblant à un gros Me. 262, mais avec une aile droite. Le I-300 (dénomination usine du MiG-9) fut effectivement le premier jet de conception soviétique à voler (après quelques sauts de puce), le 24 avril 1946, brûlant la politesse à l'avion de Yakovlev (Yak-15) de quelques heures ! Ce fut aussi le premier jet à être construit en série, en URSS. Curieusement, à la fin du film, on voit Sharov achever d'écrire son rapport intitulé :" Rapport sur le déroulement des essais de l'avion I-267", un avion qui n'a jamais existé ! Chez MiG, on passa du I-260 au I-300.  Le sort tragique d'Alex rappelle que le premier prototype du I-300 provoqua la mort du pilote A.N. Grintchick, alors qu'il présentait l'avion à une délégation d'officiers supérieurs des forces aériennes.

Ce film est d'une grande sobriété, avec des scènes émouvantes (la scène du bain nocturne d'Alex et de Nina; la détresse de Nina, après la mort de son mari..), décrivant le travail de gens ordinaires habités par une grande force spirituel qui les conduit à se surpasser. Ils ont tous des "héros" à leur niveau. Ce que le film ne dit pas, c'est que le régime soviétique, surtout à l'époque de Staline, avait une façon très particulière d'inciter les gens au travail et à leur faire respecter les délais...Les dix premiers MiG-9 de série devaient être livrés en soixante dix jours pour la parade aérienne du 7 novembre 1949, sur la Place Rouge. Ils furent achevés en cinquante cinq jours, pratiquement à la main, l'outillage de série n'étant pas encore disponible. La fête fut annulée pour cause de mauvais temps...

"Im pokoryaetsya nebo" fut récompensé, selon certaines sources, par un prix à un festival du film d'aviation s’étant déroulé à Deauville, en 1963 (festival qui n'a laissé aucune trace...). C'est effectivement un grand film d'aviation qui n'est pas sans rappeler le film anglais "Le mur du son" (1952), qui insiste également sur le coût humain des progrès de l'aviation, à la même époque.

 

Les avions du film :

Le principal avion du film est un authentique MiG-9. Au moment du tournage, il n'en restait plus beaucoup en URSS, la production s'étant arrêtée en 1949. A la fin du film, on en voit bien six alignés sur un tarmac (portant les numéros 03, 04...), mais ils sont peut-être vus sur un film d'archive. L'appareil utilisé par le tournage était un avion de série, un I-301, "FS". Il ne différait que très peu des prototypes, si ce n'est par l'ajout d'une arête, au pied de la dérive. Il fut remis en état de vol dans les ateliers de MiG. On le voit décoller et atterrir (ou peut être, est-ce sur un documentaire ? ) et, le plus souvent, rouler au sol, ce qui devait être plus prudent. En vol, il est doublé par une maquette. Sa décoration (un éclair sur le fuselage et le numéro 01) n'est pas celle du vrai prototype  (une bande bleu courant le long du fuselage et entourant l'entrée d'air du réacteur, avec le logo de MiG, devant et une seule étoile sur la dérive). Cet avion se trouve actuellement au Musée de la Force aérienne russe de Monino, où il est exposé en plein air...

Le MiG du film était équipé de réacteurs RD-20, la copie russe du BMW 003 allemand, qui équipa les premiers prototypes. Ses réacteurs fonctionnaient et on entend, lors de la mise en route, le bruit de motocyclette caractéristique émis par le petit moteur deux temps, situé à l'intérieur du cône d'entrée du réacteur et destiné à lancer la turbine. On remarquera aussi l'armement impressionnant de cet avion : un canon de 37 NS-37 mm alimenté à 40 coups et de deux canons de 23mm NS-23 avec 80 coups chacun. Sauf que cette belle artillerie, destinée à aller à la chasse aux bombardiers, avait l'inconvénient, vu la position des bouches devant l'entrée d'air, d'étouffer les réacteurs quand elle tirait au-dessus de 7500 mètres d'altitude !

Le tournage employa d'autres vrais avions, filmés au sol, arrêtés ou roulant. Ainsi Kolchin est vu en train d'essayer un Polikarpov I-16 type 6, lors d'une vrille, moteur au ralenti. Le viseur télescopique  n'est pas conforme au type; il est de plus installé trop bas, seule la mire de visée montée au dessus étant fonctionnelle...Un des collègues de Kolchin descend d'un Lavochkin La-11 que l'on voit arriver au sol, moteur tournant. Un peu plus tôt, garé entre un Ilyushin Il-10M et un Polikarpov I-16, on entrevoit un Lavochkin La-7 avec une décoration (dérive à moitié blanche, capot moteur orné d'un triangle de couleur) très semblable au fameux "27" blanc de l'as Ivan Kodjedoub. Un pilote d'essais subit des problèmes de flutter des empennages, dans un bimoteur Tupolev Tu. 2M dont on peut voir beaucoup de détails : cockpit, soute à bombes..; on nous montre même comment monter à bord en utilisant les marchepieds escamotables situés sur le coté droit, derrière l'aile. 

Tous ces avions ont sans doute été prêtés par le musée de l'aviation militaire de Monino, créé en 1958. Entre 1958 et 1961, ce musée reçut plusieurs appareils des réserves du "Tsentralniy Dom Aviatsiya i Kosmonavtika", dont un La-11, un MiG-9 et un Il-10.

En arrière plan, on peut apercevoir d'autres avions, parqués en bord de piste, un biplan Polikarpov Po. 2, un Lisunov Li. 2 ( un Douglas DC-3 construit sous licence), un Antonov An-2 et tout à la fin du film, un Yak-18.

Les autres avions apparaissent sur des films documentaires. Il en est ainsi de l'avion fusée Bereznyak-Isayev B1-1 que l'on voit décoller sur des skis, puis faire un atterrissage acrobatique sur le nez qui se termine par un cheval de bois ! Heureusement que la piste était enneigée...

Le film commence par une véritable parade aérienne vraisemblablement filmée lors du meeting aérien de Tushino, qui chaque année montrait la force de l'aviation soviétique, ce qui permettait ainsi aux Occidentaux de constater ses progrès. Après une patrouille acrobatique composée de  quatre Mig-19S, munis de fumigènes, on voit passer des Tupolev Tu-16 (Badger), des Tupolev Tu-22 (Blinder), des MiG Ye-2, des MiG 21F, dont un fait un décollage court assisté par fusées auxiliaires. Le clou du spectacle est un quadriréacteur Myasishchyev M-52 (Bounder) escorté de deux MiG Ye-6T. Cet appareil impressionnant est filmé lors du meeting de Tushino de juillet 1961; il ne fut jamais produit en série et ne servit qu'à effrayer les "capitalistes" qui ont même cru, un moment, que c'était un appareil à propulsion nucléaire ! Autre révélation du même meeting, le Tupolev Tu-128, armé de deux missiles AA-Bisnovat R4 (en réalité, des maquettes), qui était un intercepteur lourd et qui n'eut guère plus d'avenir que le M-52.

Le film se clôture sur une patrouille de cinq MiG-17 et une de quatre MiG-19, ainsi que des Sukoi Su-9 et des MiG 21-F filmés au décollage.

 

Christian Santoir

*Film rare

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