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DZIEWCZYNA SZUKA MILOSCI

 

DZIEWCZYNA SZUKA MILOSCI

(Une fille en quête d'amour)

 

Année : 1938
Pays : Pologne
Durée : 1 h 11 min.
Genre : mélodrame
Noir et blanc

Réalisateur : Romuald GANTKOWSKI
Scénario : Antoni CWOJDZINSKI, Ferdynand GOETEL

Acteurs principaux :
Tamara WISZNIEWSKA (Jane), Mieczyslaw CYBULSKI (George Zamiejski), Stanislaswa WYSOCKA (la mère de George), John KURNAKOWICZ (Thomas Kotlica), Maria CHMURKOWSKA (Felci), Kazimierz SCHUBERT (Wicek), Joseph ORWID (le père de George), François DOMINIAK (Korzon)

Musique : Michal KONDRACKI, Marian NEUTEICH
Photographie : Jack JONILOWICZ
Compagnie productrice : Panta Film

Avions :

  • -Drzewiecki JD.2, SP-ACA
  • -Fokker F.VII-3m, SP-AOG
  • -RWD 8
  • -RWD 10, SP-BLR
  • -RWD 11 (c/n 92, SP-ASX
  • -PZL P.11
  •  

Notre avis :

Ce film, assez curieux, met en scène un millionnaire polonais ayant fait fortune au Brésil, et qui veut créer une ligne aérienne entre Varsovie et Rio de Janeiro. Ce scénario rappelle d'abord qu'il existe une importante communauté polonaise au Brésil (états de Parana, Rio Grande do Sul), aussi importante qu'en France. Mais au début de 1938, la compagnie nationale LOT (Polskie Linie Lotnicze) ne desservait pas Rio, sa plus longue ligne aboutissant en Palestine à Lydda-Tel Aviv (environ dix pour cent de la population polonaise était alors juive). Les autres lignes ne reliaient Varsovie qu'à certaines capitales européennes (Berlin, Helsinki, Bucarest, Athènes..).

On peut, par conséquent, se demander où les scénaristes ont puisé leur inspiration. L'actualité aéronautique récente, en 1937, pouvant  intéresser les Polonais, concernait le vol effectué par Zygmunt Lewoniewski, un Russe d'origine polonaise, qui, au mois d'août 1937, avait tenté avec son équipage de six hommes, de relier Moscou à New-York, par le pôle nord. Mais les communications radio furent interrompues peu après le passage du pôle nord. Les recherches, lancées en Alaska et au Canada, ne donnèrent rien. Le déroulement de ce raid ressemble un peu au scénario du film, mais avec une fin plus heureuse.

George est un jeune mécanicien, passionné d'aviation, qui a dû abandonner ses études aéronautiques, après la mort de son père, faute d'argent. Il a construit dans son garage un petit avion de sa conception. Un jour, il rencontre, par hasard, un riche émigré polonais, Tomasz Kotlica, tout juste débarqué du Brésil, et sa fille Jane, dont George tombe aussitôt amoureux. L'essai de son avion ne se passe bien et il doit abandonner son projet. Avec l'aide de Kotlica, qui apprécie sa détermination et ses talents, tout comme sa fille, George peut s'inscrire à l'université de Technologie de Varsovie et reprendre ses études. Son diplôme en poche, il se consacre à l'étude d'un nouvel avion destiné à faire un vol à longue distance, entre Varsovie et Rio de Janeiro. Quand l'avion est prêt, George s'embarque avec deux coéquipiers, pour ce long vol. Kotlica décide alors de créer une ligne entre la Pologne et le Brésil, mais son financement dépend, bien sûr, du succès du raid. Mais alors que l'avion est au-dessus de l'Atlantique, la radio tombe en panne suite à un court-circuit qui dérègle, en outre, le compas. Les journaux annoncent que l'équipage polonais a peut être disparu dans l'océan. En Pologne, Siemiarski, le technicien qui avait vérifié le poste radio, après une soirée bien arrosée passée avec une fille, se sent responsable de cette avarie et se suicide en précipitant son avion au sol. Mais peu après, on apprend que George à atterri sans encombre au Brésil ! La ligne Pologne-Brésil, trouve aussitôt de nouveaux actionnaires. C'est une grande joie pour les parents de George, mais aussi pour Jane qui est éprise de lui. George et son équipage font un retour triomphal au pays. L'avenir s'annonce bien pour lui, d'autant que Jane est à ses côtés.

Quand, la radio du "Wola" tombe en panne, le radionavigant évoque l'aviateur polonais Stanislaw Skarzynski qui, en mai 1933, avait traversé seul l'Atlantique sud, entre Saint Louis du Sénégal et Maceio, au Brésil, à bord d'un petit avion de tourisme totalement dépourvu de radio.

Le film fut tourné sur le terrain de Bielsko-Biala. Sur la tour de contrôle, on remarque le sigle "LOPP" (Liga Obrony Powietrznej i Przeciwgazowej), qui était une organisation paramilitaire visant à favoriser le développement de l'aviation, la fourniture d'avions modernes aux aéroclubs, aussi bien que la publication d'ouvrages techniques. Ses membres participaient aussi à la construction de terrains, tout en faisant de la propagande aéronautique auprès de la jeunesse. La LOPP s'occupait aussi de la protection contre la guerre chimique.

Ce petit film, au titre anodin, n'aurait que peu d'intérêt pour nous, s'il ne se déroulait dans le milieu aéronautique. On peut y voir plusieurs appareils de l'aviation légère polonaise, à la fin  des années 30, et même un prototype rare. Il permet aussi à la LOPP de se faire un peu de publicité, à un moment où la tension en Europe commençait à monter sérieusement. Le film parut une semaine après l'Anschluss, l'annexion de l'Autriche à l'Allemagne (11-13 mars 1938), et six mois avant la désastreuse conférence de Munich (29-30 septembre 1938).

 

Les avions du film :

Le premier avion, celui de George, est un JD.2, un petit avion créé, en 1926, par un jeune étudiant de l'Université Technique de Varsovie, Jerzy Drzewiecki. le premier vol se termina mal, comme celui de George (de son vrai nom Jerzy Zamiesjski…), mais à l'atterrissage, suite à un incendie qui consuma entièrement l'avion ! L'avion du film serait le "SP-ACA" (portant le faux matricule SP-ART). Ce JD.2 (SL-6) avait été accidenté en 1929 et racheté par le célèbre pilote Zbigniew Babinski, de Varsovie. Il fut de nouveau accidenté en août 1935 et rayé des registres. En 1937, la production aurait utilisé cette épave, en la retapant. On note cependant, sur l'avion de George, des détails propres au seul JD-2bis construit (SP-ADP), l'avion d'un autre pilote très connu, Witold Rychter, qui fut, lui aussi, accidenté, mais en juin 1936. On constate ainsi que l'avion de George est propulsé par un moteur radial à cinq cylindres Armstrong Siddeley Genet de 75 cv, que l'ont voit démonté dans son garage, au début du film (au lieu d'un Anzani six cylindres pour le JD.2), que les bouts d'ailes sont profilés, et que les ailerons sont beaucoup plus longs, tout comme sur le JD.2bis. On sait que ce dernier participa également à certains tournages. On remarque l'absence de l'arceau anti retournement, monté devant le pare brise avant (ou au dessus de la place avant, sur le JD.2), ainsi que celle du deuxième mât de voilure qui a été remplacé par un câble, sans doute pour les besoins du tournage, afin de faciliter le repliage des ailes vers le haut.

Les autres avions, vus après cette scène, sont ceux de la LOPP dont on aperçoit le logo (voir ci-contre) sur la dérive d'un RWD 8 (mais aussi sur celle d'un RWD 10, démontée et posée dans un bureau). Ces avions sont des RWD 8 (des cousins polonais du Morane-Saulnier MS.340) appartenant en majorité à l'école de pilotage de Bielsko, dont le SP-AYL (c/n 128), SP-BCK "Chrobry IV" (c/n 144), SP-BKT "Huta Florian V" (c/n 199), SP-BCD "Slask I" (c/n 138) et BKP "Huta Florian" (c/n 195), ces deux derniers se refugieront en Roumanie en 1939. Il y a aussi le SP-BCC (c/n 137) "Kolejarz Warszawski V" de l'aéroclub de Varsovie et le SP-BDK (c/n 34/241) du Ministère des Télécommunications, qui partira en Roumanie en 1939.

Au milieu de la démonstration de flottes entières des RWD 8, on aperçoit un Fokker F.VII-3m (SP-AOG, c/n 7) de la LOT construit sous licence en Pologne, par Plage & Laskiewicz. Il s'agirait, en fait, de l'ancien SP-ABK "Krysia" (c/n 10), remotorisé en 1935, avec des moteurs P & W Wasp Junior TB. En septembre 1939, ce Fokker sera évacué en Roumanie. On voit cet avion de dix places, transformé en avion de largage de parachutistes.

Le raid sans escale Varsovie-Rio de Janeiro est entrepris avec un RWD 11 (c/n 92, SP-ASX), l'unique exemplaire de ce type qui fit son premier vol en février 1936. Au moment du tournage, l'avion avait sa configuration définitive avec un empennage bidérive et venait de terminer la deuxième phase d'essais pour sa certification. Mais ni le ministère des Transports ni la LOT n'en voulurent. L'avion resta donc comme avion de liaison chez DWL (Doświadczalne Warsztaty Lotnicze), l'usine qui construisait les avions conçus par le bureau d'études RWD. Il apparait dans le film avec le nom de "Wola" (un arrondissement de Varsovie, d'où est originaire Kotlica) sur le nez. Comme on peut le voir, le cockpit était aménagé pour un pilote qui disposait d'un seul volant pouvant être basculé en place droite, où prenait place le radio/mécanicien. La cabine pouvait accueillir six passagers. On a quelques aperçus du vrai tableau de bord, équipé pour le vol IFR.

Faut-il préciser que le trajet sans escale entre Varsovie et Rio de Janeiro (environ 10 400 km) était hors de portée du RWD 11, dont l'autonomie n'était que de 800 km, même avec des réservoirs supplémentaires. Sa vitesse maximum ne dépassait pas, non plus, 500 km/h, comme annoncé, mais de 300 km/h au niveau de la mer. Sur la même ligne, les avions de l'Aéropostale faisaient plusieurs escales et pas seulement pour des raisons commerciales... En septembre 1939, le RWD 11 fut abandonné sur place, suite à un problème de train, et récupéré, plus tard, par les Allemands qui le réparèrent et l'emmenèrent en Allemagne, où il servit un temps sous les couleurs de la Luftwaffe, avant de disparaitre dans la tourmente.

Wicek se tue avec un petit RWD 10 (SP-BLR), offert à la LOPP avec un lot de vingt appareils du même type, le 26 septembre 1937. On voit, marqué sur le dos du fuselage : "Polskie K.K.O. II", ce qui laisserait entendre que cet avion fut offert par les caisses d'épargne municipales (KKO : Komunalnych Kas Oszczędności).

A la film du film, on assiste à une envolée de chasseurs PZL P.11 qui vont escorter le RWD 11, de retour de son périple victorieux. On remarque, entre autres, le n° 2, portant l'insigne de la 111 Eskadra Mysliwska. Si Le P.11 était, en 1934, au moment de sa mise en service, considéré comme le chasseur le plus avancé au monde, en 1938, il était déjà totalement dépassé et ne sera pas un adversaire sérieux pour les Bf.109E de la Luftwaffe, deux ans plus tard.

 

Christian Santoir

 *Film disponible sur amazon.com

 

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