QUAX IN FAHRT /
QUAX IN AFRIKA
Année : 1947
Pays : Allemagne
Durée : 1 h 28 min.
Genre : comédie
Noir et blanc
Réalisation: Helmut WEIB
Scénario : Wolf NEUMEISTER
Histoire originale : Hermann GROTE " Quax auf Abwegen"
Acteurs pirncipaux :
Musique: Werner Bochmann
Producteur: Robert Leistenschneider
Compagnie Productrice : Terra-Filmkunst GmbH
Avions :
- -De Havilland DH. 60GIII Moth Major (D-EHYS)
- -De Havilland DH. 80A Puss Moth (D-EPEK)
- -Focke Wulf Fw.44 Stieglitz
- -Klemm Kl. 25
Notre avis :
Ce film est la suite de « Quax der Bruchpilot » (1942) où Heinz Rühmann jouait le rôle d’un apprenti pilote. Cette comédie qui se passe en grande partie en Espagne et en Afrique, fut tournée alors que la Wehrmacht reculait partout et se battait dos au mur, contre les plus grandes puissances mondiales. Aux communiqués de victoires, avaient succédé l’annonce de défaites, de « replis stratégiques » de plus en plus fréquents. Le peuple allemand avait donc un grand besoin de divertissement ! A l'origine, le film devrait être tourné en Courlande (Lettonie), mais la région était devenue une zone de combat. Le tournage commença en juillet 1943, à Durach, près de Kempten en Bavière (Allgaü). Selon Rühmann, chaque nuit, ou presque, on entendait passer les bombardiers anglais en route vers Munich. Après les prises de vue de la journée, il fallait recouvrir les avions utilisés pour le tournage, afin que les fusées éclairantes lancées par les avions ennemis ne permettent de les découvrir. Les scènes africaines furent tournées dans le Brandebourg, où il y avait des endroits quasi déserts. On y avait planté quelques palmiers empruntés à un jardin botanique…
L’épouse de Rühmann, Hertha Feiler, remplace Karin Himbold, qui dans ce film n’a qu’un rôle secondaire. La réalisation est de bonne qualité. Le « racisme ordinaire » qui préside à la mise en scène des Africains, n’est guère différent de celui des productions hollywoodiennes de l’époque. Rühmann dit dans ses mémoires, qu’il ne savait pas d’où les Noirs venaient, mais qu’ils s’exprimaient tous dans un pur dialecte Saxon ! Il y avait des Noirs dans l’Allemagne nazie (entre 500 et 800, selon certaines sources), soit nés en Allemagne, soit originaires des anciennes colonies africaines (Kamerun, Tanganyka..). Tant qu’ils ne se mariaient pas avec des aryens, on les laissait tranquilles. Ils étaient acceptés dans des emplois subalternes ou en rapport avec le spectacle (cirque, music-hall, cinéma..). Quand Renate demande à Quax s’il n’a pas peur, en voyant les indigènes avancer, il lui répond : " Non, j’en ai déjà vu dans un zoo » ! ". L’Allemagne n’avait jamais perdu l’espoir de récupérer un jour ses colonies africaines, et, dans ce cas, les Noirs allemands auraient eu un rôle à jouer dans l’administration de ces territoires, sur le modèle de l'indirect rule anglais.
On retrouve l’école de pilotage de Bergried, dont Quax est devenu le meilleur moniteur. Bien qu’il soit un homme sociable, il commande ses élèves comme un dictateur, en essayant de leur imposer la plus stricte discipline. Il considère comme une atteinte au métier de pilote que les femmes puissent apprendre à piloter. C’est donc avec mauvaise humeur qu’il voit arriver à l’école deux jeunes femmes ainsi que sa propre petite amie, Marianne ! Le macho essaie alors par tous les moyens de les faire renoncer à leur projet. Mais comme deux d’entre elles, Renate et Julchen, s’accrochent, il leur permet de participer à un rallye qui doit les mener jusqu’en Afrique. Quax est à la tête d’un groupe de trois avions. Ils font escale en Espagne où Renate se met en tête de séduire le pauvre Quax qui, après quelques verres, se livre à une exhibition de danse peu compatible avec ses théories sur la discipline. Au-dessus de l’Afrique, son moteur tombe en panne et il doit se poser. Les filles se posent aussi et cassent du bois. Julchen et un pilote partent à pied chercher du secours. Le troisième équipage les a découverts et atterrit en endommageant également son appareil. Mais les aviateurs naufragés arrivent à réparer un avion pour continuer à participer à la course. C’est au moment où Quax est seul avec Renate, que des indigènes surgissent. Ils ont l’air plutôt pacifiques. Quax est accueilli comme un dieu et le chef lui donne une jeune femme en cadeau. Il se retrouve ainsi avec deux femmes qui sont aux petits soins pour lui. Cette vie de pacha ne peut cependnat s'éyerniser. Il essaie de réparer un avion, mais en l’essayant, il s’écrase dans un palmier. Le charme est rompu, et les indigènes excités par le sorcier, veulent lui faire un mauvais sort. Ils sont sauvés in extremis par l’apparition d’un avion qui dispersent les assaillants. Alors qu’ils écoutent sur une radio bricolée, l’arrivée à Bergried de leurs camarades qui ont gagné la course, Julchen et Marianne arrivent enfin, avec les secours. De retour à Bergried, Quax se marie avec Renate, alors que Marianne se marie avec le chef pilote Hansen qui s’est bien occupé d’elle pendant l’absence de Quax...Julchen aussi a trouvé l’amour. Les avions des trois couples s’envolent de la place de la mairie.
Une nouvelle fois, la morale du film est que la discipline est nécessaire pour éviter les dangers, mais que la compétence et la camaraderie sont tout aussi importantes. L’exotisme africain était très prisé en Allemagne et avait été exploité en 1939 dans « Das lied der Wüste » et « Kongo express », des films avec des avions. Remarquons qu’il y a un décalage total entre la tenue des Noirs, rappelant celle des tribus de l’Afrique équatoriale et la région désignée sur la carte par le directeur de l’école de Bergried, et qui se situe dans l’ancien Rio de Oro et les Canaries, pays arides, peuplés de populations blanches, maures et espagnoles..
Ce film est enfin assez étonnant vu le contexte raciste de l’Allemagne nazie. On y voit Rühmann tenir par l’épaule la belle noire Banani (!), son épouse africaine, après avoir participé à une fête nègre où il a dansé avec des indigènes aux seins nus. Tout cela était à la limite du mélange racial exécré par Himmler et dans tous les cas, c’était un spectacle décadent qui n’a pas dû beaucoup plaire au Dr. Goebbels, à moins que Rühmann ait essayé de faire passer cette scène pour un morceau d’ethnologie. Le tournage fut terminé en décembre 1943, et le film ne reçut son visa de censure qu’en février 1945. Il ne sortit jamais en salle... Il ne parut qu’après la guerre, sous le titre de « Quax in Afrika », en Suède, en mai 1947, et en Allemagne, en 1953.
Les avions du film :
Ce film a des scènes aériennes plus longues que le premier Quax (vingt minutes au lieu de huit) et montre plusieurs avions légers que l’on voit alignés en grand nombre sur l’aérodrome de Durach-Kempten. Le tournage utilisa pas moins d’une quinzaine d’avions. Parmi ceux-ci, le modèle le mieux représenté est le Focke Wulf Fw.44 Stieglitz (dont D-EXRN, EMIR, EIDE, EDDY, EITI, ERPL). L’autre appareil le plus fréquent est le Klemm Kl. 25, la plupart équipés d’un moteur en ligne inversé Hirth (D-ESZR, ERNA, ERNI, ELLI, ELSE). Notons que ces immatriculations sont sujettes à caution. Ainsi, le matricule D-ERNA était attribué à un Fw.44 Stieglitz dans le premier Quax (1941)..
Ces avions portent sur la dérive l’insigne de l’école (fictive) de Bergried (un oiseau) et la date « 1932 », qui situe l’action dans le temps (donc, antérieure au régime nazi). En réalité, ces avions devaient appartenir à la DVS (Deutsche Verkerhsfliegerschule) ou au NSFK (Nationalsozialistisches Fliegerkorps).
On peut également apercevoir deux avions anglais, un De Havilland DH. 60GIII Moth Major (D-EHYS) au sol, et un De Havilland DH. 80A Puss Moth (D-EPEK) piloté par une femme.
Le film utilise quelques documents filmés pour montrer le survol de Barcelone (on reconnaît le fort de Monjuic et le téléphérique qui y mène), puis celui du port de Tanger (ou Casablanca..), ce dernier étant filmé à partir d’un Junkers Ju 52 3m dont on voit l’aile droite avec le matricule (D-2525) dans un coin de l’objectif. Un autre document montre le décollage du Junkers Ju 52/3mge hydro (PP-CAY) du Syndicato Condor (Brésil), détruit à Rio en 1939, et que Quax et son équipe empruntent pour retourner au pays !
On utilisa également des maquettes de Klemm et de Stieglitz notamment lors de la scène où Quax se livre aux acrobaties les plus folles (looping autour d’un viaduc, passage dans un tunnel ferroviaire !) pour effrayer Renate.
Enfin, notons que pendant le tournage, Rühmann avait à sa disposition un Arado Ar.79 biplace qu'il pilotait et qui n’apparaît pas à l’écran.
Christian Santoir
*Film disponible sur amazon.fr
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