Rechercher dans ce blog

LES ANGES DE L’ENFER


LES ANGES DE L'ENFER

Vo. Hell’s angels

 

Année : 1930
Pays; USA
Genre : guerre
Durée: 2 h 09 min.
Noir et blanc

Réalisateur; Howard HUGHES
Scénario : Harry BEHN, Howard ESTABROOK, Joseph Moncure March, Marshall Neilan
Histoire originale : Marshall NEILAN, Joseph Moncure March

Acteurs principaux :
Ben Lyon (Monty Rutledge), James Hall, (Roy Rutledge), Jean Harlow (Helen), John Darrow; (Karl Armstedt), Roy Wilson; (Baldy); Frank Clarke (Von Bruen); Lucien PRIVAL (Baron von Kranz)

Photo; Tony Gaudio, Harry ZECH, Dewey WRIGLEY
Prises de vues aériennes: Elmer DYER, Harry Perry, E. Burton Steene.

Musique; Hugo Riesenfield
Producteur; Howard Hughes
Compagnie distributrice: United Artists-Hughes

Avions :

  • -Avro 504K
  • -Curtiss Jenny
  • -Fokker D.VII
  • -RAF SE.5
  • -Sikorsky S-29A
  • -Sopwith Snipe
  • -Travel Air 2000/4000

 

Notre avis :

Howard Hughes avait été introduit à Hollywood par son oncle Rupert Hughes qui écrivait des scenarii depuis le début des années vingt. Ayant constaté le bon rendement financier de l’industrie du cinéma, il se mit alors à produire des films avec sa société Caddo Productions. Après avoir vu plusieurs fois le film « Wings », il décida de faire un film sur le même thème. Il recruta Harry Perry comme chef opérateur. Celui ci avait déjà travaillé pour « Wings », dont le succès lui devait beaucoup. Il prit également des leçons de pilotage auprès de la compagnie de J.B. Alexander qu’il nomma coordinateur pour la partie aéronautique du film. Ce dernier fit appel à Franck Tomick qui avait tourné dans « Wings ». Un autre collaborateur du même film, Ted Parsons, fut aussi conseiller. Le tournage des scènes d’intérieur commença sous la direction de Luther Reed en octobre 1927, aux Metropolitan studios. Quand on commença à filmer les scènes aériennes Hughes remercia Reed et pris sa place. Hughes loua les services de tous les pilotes cascadeurs et casse cous de la Californie, à l’exception de Dick Grace sous contrat dans « Lilac Time ». Parmi les quatre vingt pilotes qui tournèrent à un moment ou un autre dans le film, il y avait beaucoup de pilotes expérimentés comme Frank Clarke, Leo Nomis, Al Wilson, Roscoe Turner...

L’histoire commence à Munich, où deux frères étudiants à Oxford, Monty et Roy, passent leurs vacances avec un ami allemand Karl. Monty est provoqué en duel par un officier prussien dont il a compromis la femme. De retour en Angleterre, la mobilisation est déclarée. Les deux frères s‘engagent dans le Royal Flying Corps et l’allemand rejoint son pays. Monty a une aventure avec la petite amie de son frère, Helen. Il essaie de prévenir son frère qui ne veut rien savoir. Karl se retrouve dans un Zeppelin qui a pour mission de bombarder le centre de Londres. Partagé entre son devoir et l’ignominie de sa tâche, largué dans une nacelle d’observation sous la couche nuageuse, il dirige le bombardement dans un lac ! Mais le dirigeable est attaqué par des avions anglais et il doit fuir en altitude ; pour cela le commandant sacrifie tout à bord : les équipements non indispensables, puis les hommes, l’étudiant étant le premier.. Mais un avion finit par abattre le dirigeable, en le percutant. Les deux frères sont dans une escadrille en France. Monty est accusé de couardise. Quand on demande des volontaires pour bombarder un dépôt de munition avec un avion allemand capturé, Monty s’avance et son frère le suit. Le soir, ils rencontrent la volage Helen en bonne compagnie avec un artilleur. Les deux frères réussissent à bombarder le dépôt mais sont attaqués par Von Richthofen qui abat leur bombardier. Ils réussissent à s’en sortir mais sont faits prisonniers et sont interrogés par l’officier dont Monty avait courtisé l’épouse !. Ils auront la vie sauve s’ils révèlent les plans de la grande offensive alliée en préparation. Monty est sur le point de tout avouer pour échapper au peloton d’exécution. Son frère s’arrange avec l’officier allemand; il parlera s’il obtient un pistolet chargé d’une balle pour tuer son compagnon qu’il hait, et pour ne pas qu’il puisse révéler sa propre trahison. Monty ne pouvant se taire, Roy l’abat, puis est exécuté sans avoir parlé. Peu après, la grande offensive est déclenchée !

A son premier visionnage, le film reçut un accueil plutôt tiède. Son principal défaut était  d’être muet. Hughes décida donc de le transformer en film parlant. Les acteurs furent rappelés pour retourner les scènes en studios. Une dizaine de pilotes reprirent l’air pour enregistrer le bruit des avions, seul ou en formation. L’aviatrice Pancho Barnes passa une journée dans son Travel Air R à voler autour d’un micro suspendu à un ballon, pour enregistrer le son de son moteur à tous les régimes. Greta Nissen handicapée par un accent norvégien séant mal à une anglaise, fut remplacée par Harleen Carpenter, alias Jean Harlow, une jeune actrice dont on avait pu apprécier la plastique dans « Son altesse royale »(1929), quand Stan Laurel coinçait sa robe dans la portière d’une voiture qui la laissait dévêtue sur le trottoir ! Dans « Hell’s angels » elle réapparaît guère plus vêtue, après avoir demandé au pauvre Monty : « Verriez vous quelque inconvénient à ce que je passe quelque chose de plus confortable ?.. ». Tous les films de Hughes comportent au moins une scène à connotation sexuelle plus ou moins explicite!.

Le film connut un grand nombre d’accidents. Ross Cooke accidenta un SE.5A en percutant une barrière. Al Johnson se tua en heurtant des câbles à haute tension. Al Wilson dut quitter son Fokker DVII par temps de brouillard, au-dessus d’Hollywood. Phil Phillips détruit son SE.5, quand, à court de carburant, il essaya de se poser dans un champ. Trois autres Fokker furent également détruits lors d’atterrissages forcés. Stuart Murphy heurta en vol le Travel Air d’Ira Reed. Murphy put se parachuter alors que Reed réussissait à atterrir. Un autre accident survint avec le bimoteur Sikorsky qui devait effectuer une vrille très dangereuse. Plusieurs pilotes dont Dick Grace, refusèrent de faire cette cascade aérienne, malgré une prime alléchante. Finalement, Al Wilson accepta ainsi qu’un mécanicien qui devait, de l’intérieur du fuselage, allumer les pots à fumée. Mais Wilson fut incapable de sortir de la vrille et dut évacuer l’appareil ; le mécanicien resta à bord n’ayant pas entendu l’ordre de sauter !

Quant tout fut terminé, le film avait coûté environ quatre millions de dollars et trois vies humaines. Le tournage des scènes aériennes avaient duré deux ans. Certains Fokker volèrent pendant quatre cent heures ; celui de Frank Clarke usa cinq moteurs Hispano Suiza. La première eut lieu le 27 mai 1930 au Grauman’s Chinese Theater de Los Angeles, au milieu d’une foule immense. La partie dramatique du film fut jugée faible à cause de ses invraisemblances, mais les séquences aériennes remarquables. Quant à Jean Harlow, elle était devenue ce soir là, la toute nouvelle star d’Hollywood. Cette (fausse) blonde platinée, aux manières grossières, avait en revanche un incontestable sex-appeal.

Quand le film parut en Europe, le gouvernement allemand considéra le film comme une offense à sa nation et éleva de vives protestations par l’intermédiaire de ses ambassades. Il est vrai que les Allemands n’y ont pas le beau rôle : gros buveurs de bière et mangeurs de saucisses, hyper disciplinés, officiers arrogants faisant peu de cas de la vie des civils anglais, comme de celles de leurs hommes, ou bombardant avec jubilation Trafalgar Square! Le moins qu’on puisse dire, c’est qu’Hell's Angels exalte l’esprit de sacrifice et l’abnégation de l’homme placé dans des situations extrêmes ; on y voit, en effet, un équipage qui se jette dans le vide pour sauver son dirigeable; un pilote qui, à court de munitions, percute le Zeppelin pour l’empêcher de bombarder Londres; un homme qui abat son frère d’une balle dans le dos pour l’empêcher de parler et de compromettre l’offensive alliée ! Cela peut paraître quelque peu excessif. Soixante seize ans plus tard, ce film est néanmoins une référence dont tous les films d’aviation sur la première guerre se sont plus ou moins inspirés, comme le dernier en date « Flyboys ».

Beaucoup de scènes aériennes non utilisées par le film, apparurent les années suivantes, dans une dizaine de films sur la première guerre mondiale, dont « Hell in the heavens » (1934). Les scènes aériennes occupent le tiers de la durée du film et une cinquantaine d’avions ont participé au tournage. C’est, avec « Wings », LE film d’aviation par excellence et l’archétype des films sur la guerre aérienne.

 

Les avions du film :

Howard Hughes utilisa pour le tournage huit terrains en Californie. Le principal, situé près de Van Nuys dans la vallée de San Fernando, fut surnommé Caddo Field du nom de la compagnie de son père à Shreveport. Dans la même vallée, à Chatsworth, fut installé un terrain allemand où étaient stationnés un quinzaine d’avions. Il y eut aussi Inglewood où fut construit une réplique du quartier général du RFC, et les terrains secondaires de Riverside, Encino; Glendale, Santa Cruz et Oakland

Pendant le printemps et l’été de 1927, Hughes et son conseil d’experts aéronautiques, parmi lesquels Frank Tomick, Al Johnson et l’as de l’escadrille Lafayette, Ted Parsons, se mirent à la recherche, dans tout le pays, d’avions de combat de l’époque du film qui s’étend en fait sur toute la guerre . Vers la fin août 1927, Hughes aurait réussi à acquérir entre trente cinq et quarante avions anciens. Un rapport estime même le chiffre à quatre vingt sept ! D’autres avions furent loués pour les scènes se déroulant en Californie du Nord. Pas plus de quarante cinq avions, cependant, apparaissent à chaque fois. Harry Reynolds fut nommé à la tête d’une équipe de vingt à trente cinq hommes chargés de restaurer, de réparer et d’entretenir les avions abîmés lors des tournages.

Parmi les avions, il y avait au moins six ou sept Fokker D.VII, tous achetés auprès de propriétaires privés à San Francisco, San Antonio et Los Angeles. Ces avions étaient plutôt en bon état et provenaient des surplus de l’armée. Le 95 th Pursuit Squadron basé à Selfridge (Michigan) avait été la dernière unité à faire voler le type pour entraîner ses pilotes. Un des Fokker était un avion biplace. Les Fokker n’étant pas assez nombreux, on eut recours à un grand nombre de Travel Air 2000 et 4000, achetés ou loués. Ces appareils avec leurs ailerons et leurs gouvernails débordants ressemblaient vaguement aux Fokker. Repeints et modifiés, ils furent baptisés « Wichita Fokker » puisqu’il étaient fabriqués à Wichita (Kansas).

D’autres avions anciens de l’Air Service, comprenaient cinq Thomas Morse S4C Scout, modifiés pour ressembler à des Sopwith Camel en agrandissant l’empennage, et en réduisant l’envergure. Deux Sopwith Snipe ne volèrent pas, étant trop difficiles à piloter, et servirent en arrière plan. Au moins trois SE.5, dont deux construits par Eberhardt Steel Products Co. entre 1922 et 1923, furent également acquis. Ces appareils en condition de vol furent équipés de mitrailleuses Marlin, au lieu des Vickers. Deux Curtiss Jenny, furent modifiés pour représenter des avions d’entraînement Avro 504K. Un Jenny fut maquillé en Sikorsky avec deux faux moteurs, pour la scène de la vrille et du crash, mais fut brûlé dans un hangar à Caddo Field. Le Sikorsky S-29A était un exemplaire unique, acquis par Roscoe Turner en 1926, pour établir une ligne entre Atlanta et New York. C’était le premier avion construit aux Etats-Unis par le réfugié russe Igor Sikorsky. Sa construction fut financée en grande partie par son ami, le célèbre compositeur Sergei Rachmaninov. Mais le manque de financement obligea Turner à faire de la publicité et du transport à la demande. Il accepta de louer l’avion pour le tournage. Il fallut d’abord, changer les moteurs Liberty, arrivés en fin de potentiel. Puis il fallut changer la cabine en aménageant un poste de tir dans le nez, et un cockpit juste derrière, bien que le pilotage s’effectua comme avant, par le cockpit situé tout à l’arrière. Une maquette du bombardier de quatre mètres d’envergure, fut également construite. En plus de ces avions, Hughes loua divers types de biplans selon les besoins, pour étoffer les formations, ou les scènes de dogfight ou les alignements au sol. Il loua ainsi un American Eagle et un Thunderbird.

La décoration des avions correspond plus à des impératifs cinématographiques qu’à une recherche d’authenticité. Les avions allemands sont de couleurs sombres avec de larges croix de fer jamais portés par les Fokker. Les pilotes allemands n’inscrivaient jamais leur noms sous le cockpit, et utilisaient des marques personnelles. Enfin, von Richthofen ne pilota jamais le Fokker D VII et fut tué aux commandes d’un Fokker triplan. Les avions anglais sont de couleurs claires avec des cocardes qui ressemblent le plus souvent à des cocardes françaises.

Comme il n’y avait pas de Zeppelin à louer, il fut remplacé par une grande maquette de neuf mètres de long. Les prises de vues furent effectuées dans un hangar à dirigeable à Ross Field. Le Dr. K. Arnstein qui avait travaillé avec la compagnie Zeppelin pendant la guerre, fut embauché pour surveiller les dessins du studio. Dans le film, le Zeppelin est le L 32. C’était un dirigeable de la Marine impériale (n° de fabrication : LZ 74) qui fut abattu le 24/09/1916 près de Londres, par un BE 2c, un événement dont s’est peut être inspiré le film. En 1916, il y eut vingt raids sur la région londonienne qui reçut cent vingt cinq tonnes de bombes qui tuèrent 293 personnes et en blessèrent 691 autres. Ce furent les premiers bombardements aériens de la population civile, après ceux de Paris. La petite nacelle d’observation placée au bout d’un câble de 800 mètres de long, destinée à guider le largage des bombes, fut utilisée la première fois pour un bombardement sur Calais, mais ce dispositif ne fut pas généralisé et il est douteux que le L 32 en fut équipé. La Marine trouvait que c’était un poids mort (500 kg). Dans le film, le capitaine du Zeppelin semble penser la même chose en larguant le pauvre Karl ! Ce capitaine, avec sa barbiche, ressemble beaucoup au capitaine Peter Strasser, chef des Zeppelins de la Marine impériale. C’était un officier de valeur, dur (il était pour les châtiments corporels), mais « juste ».

Enfin, la plupart des prises de vues aériennes furent effectuées à bord d’un DH.4 et du Fokker D.VII piloté par Frank Clarke.

 

Christian Santoir

 *Film disponible sur amazon.fr

 

Enregistrer un commentaire

Copyright © Aeromovies. Designed by OddThemes