KAMPFGESCHWADER LÜTZOW
(Escadrille de bombardement Lützow)
Année : 1941
Pays : Allemagne
Durée : 1 h 37 min.
Genre : guerre
Noir et blanc
Réalisateur : Hans BERTRAM
Scénario : Hans BERTRAM, Wolf NEUMEISTER, Heinz ORLOVIUS, Hans STEINKOPF
Principaux acteurs :
Christian KAYßLER (colonel Mithoff), Hermann BRAUN (sergent Eckhard), Heinz WELZEL (sergent Paulsen), Hannes KEPPLER (sergent Guggemos), Marietheres ANGERPOINTNER (Grethe Kubath), Carsta LÖCK (Lina Zeistler), Adolf FISCHER (sergent Zeistler), Horst BIRR (Caporal Hasinger), Helmut vom HOFE (soldat Hellwig), Peter VOSS (Major Hagen)
Producteur : Hans BERTRAM
Musique : Norbert SCHULTZE
Photo : Georg KRAUSE
Prise de vues aériennes : Heinz von JAWORSKY, Walter ROSKOPF
Compagnie productrice : Tobis-Filmkunst GmbH. (Berlin)
Avions :
- - Avia B-534
- - Curtiss H-75A
- - Heinkel He.111H
- - Messerschmitt Bf 109D
Notre avis :
Hans BERTRAM avait produit en 1940 « Feuertaufe» (Baptême du feu.), un documentaire sur la campagne de Pologne glorifiant le rôle de la Luftwaffe et de ses « jeunes aigles ». Le film précisait, sans ironie aucune, que la «Luftwaffe était déterminée à combattre et à exterminer ceux qui essaieraient de détruire la paix en Europe » ! Le succès de ce documentaire (en Allemagne) conduisit Goebbels à demander à BERTRAM de réaliser un film basé sur des anecdotes de la campagne de Pologne, et d’y insérer certains passages du documentaire. « Kampfgeschwader Lützow » était en fait la suite de « DIII. 88 » dont il employait les mêmes acteurs, mais avec un directeur différent. A part l’inévitable histoire de camaraderie et d’héroïsme, ce film passe auprès de certains, pour le film de propagande le mieux filmé, le mieux dirigé, et par conséquent, le plus efficace. La musique de Norbert SCHULTZE est particulièrement remarquable.
Nous retrouvons les deux amis Eckhart et Paulsen affectés dans l’escadre de bombardement « Lützow » commandé par leur ancien chef, le colonel Mithoff, alors que la Luftwaffe est en ordre de bataille. Après une inspection des troupes par un général, les ordres arrivent ; les bombardiers doivent attaquer la Pologne. Interceptés par des chasseurs polonais, Eckhart et Paulsen sont sauvés par l‘intervention d’un Messerschmitt Bf.109. Au retour de leur mission, il mitraille une colonne polonaise. Plus loin, ils aperçoivent des civils emmenés par des soldats ennemis. Les traînards sont exécutés. Révoltés par ce spectacle, ils atterrissent dans un champ et libèrent les civils qui s’avèrent être des Volksdeutsche. Eckhart et Paulsen les ravitaillent et les réconfortent. La guerre en Pologne fait rage. Les combats ont lieu en campagne où les Polonais chargent les colonnes motorisées allemandes avec leur cavalerie, mais aussi en ville, où les tanks doivent se frayer un passage au milieu de toutes sortes de pièges. Entre deux missions, les deux aviateurs peuvent s’occuper de ravitailler la population qui n’a plus à manger, mais aussi courtiser la même jeune fille... Quand un bombardier de l’escadre a été abattu, Eckhart et Paulsen partent à sa recherche. Ils sont déposés par un hydravion à proximité de l’épave où sont regroupés les membres de l’équipage qui ont survécu. Mais les alentours grouillent de soldats polonais qui tuent un des pilotes. Il va leur falloir regagner les lignes allemandes en ne comptant que sur eux-mêmes. Ils empruntent une draisine, mais alors qu’il vont s’engager sur un pont, celui-ci est détruit par un Stuka. C’est en charrette et déguisés en tsiganes, qu’ils parviendront à rejoindre les lignes amies. La campagne de Pologne terminée, l’escadre rejoint l’Allemagne. Mais les deux pilotes n’ont guère de temps à consacrer à leurs idylles ou à la vie civile. La campagne d’Angleterre commence. L’escadre a pour mission de bombarder le trafic maritime dans la Manche. Un jour, ils sont interceptés par la chasse anglaise. Paulsen est gravement touché; le navigateur prend sa place et malgré un moteur arrêté, et le mauvais temps, il parvient à proximité de la base grâce à un autre bombardier qui le guide. Au moment d’atterrir, Paulsen retrouve suffisamment de force pour poser l’appareil. Quand son ami Eckhart se précipite à bord, il a rendu l’âme. Mais la guerre continue, et Eckhart fait partie de la première vague de bombardiers qui va frapper la Grande-Bretagne sur fond de musique martiale « Wir fliegen gegen Engeland und mit uns fliegt der Tod » (Nous volons contre l’Angleterre, et avec nous, vole la mort ). Tout un programme !
Ce pur produit de la propagande nazie nous présente des soldats allemands sympathiques, bon vivants, bien propres, toujours prêts à rendre service aux populations (germaniques s’entend..). Le soldat allemand est toujours « korrekt », n’est ce pas ? En face, les Polonais sont des brutes, des assassins. Bref, l’Allemagne a attaqué la Pologne parce que les Polonais maltraitaient les citoyens d’origine allemande… Les scènes « humanitaires » de distribution de nourriture par les Allemands contrastent avec les images filmées sur le vif : villes en ruines, livrées aux flammes, combats de rues acharnés. On peut être étonné qu’après la campagne de Pologne qui ne dura que trois semaines, on passe directement à l’attaque de l’Angleterre. Et la campagne de France ? Serait ce à dire que la France, qui avait capitulé au moment du tournage du film, était considérée par le réalisateur comme un pays ami, collaborant avec le grand Reich pour le bonheur de l’Europe ?
Ce film de propagande fait à grands frais, et très apprécié de Goebbels, n’eut pas un grand succès auprès du public allemand et ne remplit pas les salles quand il parut le 1° mars 1941 à l’Ufa-Palast de Berlin. Les spectateurs lassés (déjà..) des exploits guerriers et des films patriotiques, leur préféraient des comédies, même médiocres.
Les avions du film :
L’avion principal du film est le Heinkel He.111H, la cheville ouvrière des escadres de bombardement, avec le Dornier Do.17. Il fut de tous les fronts, de 1939 à 1945. Cet avion est filmé sous tous les angles et on a quelques bonnes vues de l’intérieur, notamment du poste du mitrailleur supérieur. On constate également que le bombardier ouvre les trappes de la soute à bombes au moyen d’une manivelle ! On aperçoit furtivement une de ses premières versions un He.111B, qui n’avait pas le nez intégralement vitré. Un des avions des héros porte le code 25+L33 qui est totalement fictif, puisque le code des avions en opération était composé de trois lettres et d’un chiffres. Tout aussi fictif, le nom du KG « Lützow » fait sans doute référence à Ludwig Adolf Wilhelm Freiherr von Lützow, lieutenant général prussien et organisateur des corps francs pendant les guerres napoléoniennes. Son nom fut donné à plusieurs bâtiments de la Kriegsmarine. Il y avait aussi un Günther Lützow, un pilote de chasse, qui lors de la Bataille d’Angleterre, commandait le Jagdgeschwader 3 «Udet ».
Un Messerschmitt Bf 109D vient au secours des bombardiers attaqués par les Polonais. C’est un hydravion Heinkel He.115 qui part à la recherche du bombardier abattu. Il porte le code 8H du Aufklärungsgruppe 33, mais il se peut que ce code soit faux, puisque ce groupe ne fut pas équipé d’hydravion à notre connaissance. Un document d’actualité montre l’inévitable Junkers Ju.87 Stuka en train de bombarder en piqué.
Les autres avions sont encore plus intéressants. Les chasseurs polonais sont représentés par trois avions tchèques Avia B-534 qui remplacent les PZL-11c. Les Allemands en saisirent 350 quand ils envahirent la Tchécoslovaquie en 1939. Ces avions furent distribués aux écoles de la Luftwaffe et aux pays amis. Quant aux chasseurs britanniques, ce sont des Curtiss H-75A portant des cocardes anglaises approximatives et des codes fictifs (G-K, G-E). Ils sont dépourvus de tout camouflage. Les Curtiss capturés par les Allemands venaient de France (45 en tout) et de Norvège. Des avions neufs avaient été saisis à l’usine de Bourges et furent testés par la Luftwaffe, notamment à Rechlin. Trois de ces avions pilotés par des membres du III/JG 77, participèrent au tournage du film. Enfin, lors du bombardement des terrains polonais, on aperçoit un PZL P-37B en train de brûler.
Christian Santoir
*Film rare
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