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AIKI MINAMI E TOBU

 

AIKI MINAMI E TOBU 

Vo. 愛機南へ飛ぶ

(Nos avions volent vers le sud)
 
 
 
 
Année : 1943
Pays : Japon
Genre ; guerre
Durée : 1 h 51 min.
Noir et blanc

 

Réalisateur :Yasushi SASAKI
Scenario : Shohei TAKEI, Takao YANAI

Acteurs principaux :br/> Emiko AKIYAMA (Takeshi), Kôichirô ASHIDA, Keiko CHIGAURA, Mao FUJITA, Yasumi HARA, Masao HAYAMA, Mitsuko ICHIMURA

Photographie : Kiyoshi TERAO, Kenzi WATANABE, Yoshio TAKETOMI, Suketaro IKAI, Toshio UBUKATA, Takeshi SAITO
Musique : Tadashi MANJOME
Producteur : Yasushi SASAKI
Compagnie productrice : Shochiku

Avions :

  • -Brewster F2A Buffalo
  • -DFS Olympia Meise
  • -Hikari 2.2
  • -Kawasaki Ki-48-II Type 99  
  • -Mitsubishi K-15 II 
  • -Monbusho Hikari Type 1.3
  • -Nakajima Ki-43 Hayabusa
  • -Tachikawa Ki-9, Type 95

 

Notre avis :

Le réalisateur, Yasushi SASAKI, avait tourné, en 1936, "Shonen Kokuhei", un film de propagande sur les élèves pilotes de la Marine, un film totalement oublié. A la fin de la guerre, il réalisera une autre œuvre commandée par l'Armée, "Otome no iru kichi" (1945), sur des lycéennes travaillant comme mécaniciennes sur une base aérienne. "Aiki minami e tobu" met en scène un cadet de l'Armée et il est à comparer à "Kessen no ozora e" (1943), des studios Toho, paru la même année mais traitant de la formation des pilotes de la Marine..

 Le scenario, est centré sur une mère, une veuve, qui malgré tout l'amour qu'elle porte à son fils unique, finira par accepter sa décision de s'engager dans l'armée, alors que le Japon entre en guerre contre les Anglais et les Etats Unis. Ce thème fit l'objet de plusieurs films japonais tournés pendant la guerre. A travers eux, l'Armée s'adressait aux mères qui supportaient de plus en plus mal de voir une jeunesse, embrigadée dès son plus jeune âge, partir au front vers une mort certaine. Dans une scène, des mères sont docilement assises devant un professeur qui  leur explique comment elle doivent éduquer leurs fils. Il les exhorte à ne pas les dorloter par excès d'amour maternel, car cela diminuerait leur valeur potentiel pour la patrie ! "Rappelez vous, dit-il, que le fait d'être mère est une lourde charge qui implique un sens élevé des responsabilités envers le pays".

Le film ouvre sur  un père et une mère regardant leur jeune fils, Takeshi, dormir et discutant de son avenir. "Comme il n'a pas l'air très robuste, je préférerais qu'il devienne un médecin" confie la mère. Peu après, le père, un marin, meurt en mer, et sa femme doit assurer seule l'éducation de leur fils. Sa première intention est de laisser son fils chez des parents, et de partir à la ville pour gagner de l'argent, afin de payer ses études. L'instituteur local lui conseille d'abandonner ce plan et lui indique que son vrai devoir est de rester aux côtés de son fils. La mère continue de s'alarmer de sa constitution fragile et veut toujours qu'il devienne un médecin. Mais Takeshi a ses propres idées. Un jour, il annonce qu'il veut entrer à l'académie militaire pour devenir un pilote de l'Armée. Sa mère est horrifiée et lui conseille de choisir un autre métier, moins dur. Elle passe la nuit à réfléchir. Elle ouvre l'agenda de son mari à la date de la naissance de Takeshi, et découvre qu'il y avait écrit : "Peu m'importe ce qu'il deviendra, du moment que c'est au service de la nation". Elle considère alors que son mari aurait été favorable au désir de son fils. Mettant de côté ses propres craintes, elle lui dit de continuer sur sa voie. Le film s'étend alors sur la formation l'école préparatoire de l'aviation de l'Armée. Plusieurs mois plus tard, Takeshi reçoit son brevet lors d'une cérémonie pendant laquelle, les yeux de sa mère brillent de fierté et d'admiration pour le beau jeune homme qu'il est devenu. Puis, le film se déplace vers le front du sud-est asiatique, où Takeshi pilote un avion de reconnaissance. Lors de sa première mission, son avion est attaqué par des chasseurs américains et le moteur est touché. L'avion descend lentement vers la forêt. Takeshi regarde l'amulette que sa mère lui a donné et comme inspiré par elle, parvient à faire un atterrissage risqué sur une plage, apparue au tout dernier moment. Un journal relate cet exploit, notant que le pilote avait entendu sa mère lui indiquer où diriger son avion... De façon très inhabituelle dans ce genre de film, Takeshi retrouvera sa mère et partagera avec elle un instant de bonheur.

Ce film de propagande est empreint de l'esprit de Yasukuni, un temple rendant hommage aux Japonais ayant donné leur vie au nom de l'empereur. La mère et le fils s'inclinent à plusieurs reprises devant le cénotaphe de l'école, ou vers le palais impérial. Le film se termine sur la mère de Takeshi hissant les couleurs japonaises au-dessus de sa maison. Mais dans ce film on peut dire qu'au niveau de la propagande, Yasushi Sasaki a assuré le service minimal, la mère de Takeshi ne se montrant pas très "militariste" et son visage étant le plus souvent triste. Takeshi a frôlé la mort et elle sait que tout cela va mal finir. 1943 est un tournant dans la guerre; les alliés sont passés à l'offensive et les Japonais, en guerre depuis douze ans, commencent à céder en Chine et dans les îles du sud.

 Alors que le fils est au front, la mère travaille en usine, ce qui nous permet d'avoir de rares images d'une usine de construction aéronautique japonaise, pendant la guerre. Il pourrait s'agir de l'usine Nakajima d'Ota (préfecture de Gumma), où on voit des ouvriers travailler sur des bombardiers Ki-49 Donryu. Dans cette usine où travaillent de nombreuses femmes, on fabrique également des moteurs. On constate, au passage, que les conditions de sécurité (pas de port de gants, de lunettes;  manipulation risquée des presses hydrauliques, des massicots…) sont nulles !

 En dehors de tout son habillage propagandiste, typique de l'époque, le film est intéressant, car il met en scène un avion japonais, rare sur les écrans et qui n'a pas survécu à la guerre, ainsi que des avions américains capturés, la production ayant largement bénéficié de la coopération de l'armée.

 

 Les avions du film :

 On remarque que Takeshi a fabriqué un modèle réduit, avec une hélice actionnée par un élastique. Les écoliers japonais pratiquaient le modélisme à l'école, le ministère de l'Education (Monbusho) encourageant cette pratique, afin de faire mieux comprendre aux jeunes l'importance de l'aviation dans la défense nationale. Cela permettait également de développer leur sens du travail en équipe, ainsi que leur goût pour le travail de précision. Les Japonais suivaient en cela le système allemand qui encourageait les jeunes gens à pratiquer, non seulement le modélisme, mais aussi le vol à voile. Le Japon construisit de nombreux modèles de planeurs, parfois copiés sur, ou inspirés par, des appareils allemands.

 On voit ainsi Takeshi et sa mère admirer les évolutions d'un DFS Olympia Meise allemand, construit au Japon. Un peu plus tard, ils regardent une section féminine paramilitaire d'une université manœuvrer des planeurs d'entraînement du type allemand "Zögling". On assiste ainsi au lancement à l'élastique d'un Hikari 2.2 (immatriculé B-2656), muni d'un embryon de fuselage. C'était un planeur d'entrainement intermédiaire ou secondaire (sekondari), alors que les autres appareils observés sont destinés à la formation initiale ou primaire (puraimarī). Une jeune fille se fait lâcher sur un Monbusho Hikari Type 1.3 (une copie de Grunau 9). Au sol, on aperçoit un Asahi 5. Ces trois modèles disposant d'un fuselage poutre, de construction simple, furent copiés par d'autres constructeurs japonais et même, par des universités (comme l'université impériale de Kyushu) et des écoles, avec des modifications mineures et des appellations différentes.

 Les avions remorqueurs sont des Tachikawa Ki-9, Type 95 de l'Armée. On en voit quatre autres un peu plus tard. Ils portent sur leur gouvernail l'insigne de l'école des officiers (Shikan Gakko) dépendant de l'Académie de l'Air, de la base de Toyooka (sur l'île d'Honshu), une unité spéciale qui se consacrait à l'entraînement des officiers d'active. Ces avions étaient orange avec un avant noir, l'anneau du moteur portant les chiffres "3", "8"…On en voit d'autres, mais ayant une livrée plus sombre.

 Le principal avion du film est le Mitsubishi K-15 II (code allié "Babs") un avion de reconnaissance que pilote Takeshi. Cet avion est gris clair (schéma de peinture de type "O", avec des bandes obliques, à l'arrière du fuselage, sans marque d'unité. Il est filmé sous tous les angles au sol comme en vol. On note les verrières des deux cockpits qui s'ouvrent sur le coté droit, comme sur le Mitsusbishi Ki-46. Le coté gauche est équipé de deux marche-pieds et d'une poignée rétractables, pour monter à bord. L'observateur qui occupe la place arrière, dispose d'une caméra fixe (type Mk.1) située à proximité du poste de radio, et d'une caméra mobile (type 96), qu'il peut tenir à la main, et avec laquelle il prend des clichés à travers les hublots du fuselage. C'est également lui qui tient lieu d'opérateur radio. Son poste émetteur/récepteur est du type 96-HI MK2, un modèle encore en service, mais déjà obsolète. En cas d'attaque, il enlève le panneau supérieur de son habitacle, pour manœuvrer une mitrailleuse de 7.7 mm type 89. On constate que son champ de tir est plutôt réduit. Pilote et observateur communiquent par un tuyau acoustique, même quand ils volent à haute latitude (le Ki-15 plafonnait à 11400 m) et qu'ils ont leur masque à oxygène. Ce dernier est d'un modèle employé par l'Armée, dans les années 30. Il dispose d'un petit volet à glissière, pour la communication vocale…

 Le Ki-15 est attaqué par deux vrais Brewster Buffalo. De très nombreux Buffalo de la RAAF et de la RAF furent capturés en Malaisie, auxquels il faut ajouter ceux de la KNIL (Armée royale des Indes néerlandaises), à Java. Réparés à Singapour, au moins une dizaine furent expédiés au Japon où ils furent essayés par le Koku Gijutsu Kenkyujo (Laboratoire de recherches en Aéronautique) de Tachikawa. Ils apparaissent peint de couleur sombres (vert ou kaki) et portent les étoiles américaines à rond rouge, sur les ailes et le fuselage, avec des raies rouges et blanches horizontales sur le gouvernail, comme les avions de l'US Navy entre janvier et mai 1942. Mais, le Brewster F2A américain, qui était certes un avion embarqué, ne combattit pas dans le sud-est asiatique…

 Une des meilleures scènes du film est quand des Nakajima Ki-43 Hayabusa s'en prennent à des Boeing B-17C, qui ne sont que des maquettes. Mais les chasseurs qui viennent à leur rescousse, sont deux vrais Curtiss P-40E. Ils sont peints de couleur sombre (verts) uniformes. Ils ont exactement la même décoration que les Buffalo, ce qui est une erreur. En 1942, les P-40E de l'USAAF aux Philippines ne portaient pas de raies rouges sur le gouvernail, juste un rond rouge au milieu de l'étoile. Plusieurs P-40E furent capturés aux Philippines et à Java. Une dizaine furent remis en état de vol, notamment à Singapour. Quelques uns furent expédiés au Japon, pour subir des tests à Tachikawa. Ce sont sans doute ces avions qui ont participé au tournage. Le dogfight au-dessus de la couche, entre ces deux P-40 et les Hayabusa est particulièrement réaliste et très bien filmé. Poursuivants et poursuivis s'en donnent à cœur joie, visiblement. Une caméra fut montée sur l'aile d'un Hayabusa; l'objectif étant dirigé vers l'arrière, on voit ainsi, à un  moment, un P-40 se positionner dangereusement dans le sillage de l'avion japonais. Quand le pilote d'un Hayabusa est filmé de prêt, il est filmé en studio dans un autre avion, vraisemblablement, un Nakajima Ki-27, dont la canopée était proche de celle du Ki-43 (mais on remarque la manivelle, située au-dessus du tableau de bord, qui était destinée à manœuvrer les volets du capot moteur du Ki-27).

 Les Hayabusa Ki-43 I aperçus au sol, ont deux types de camouflages, bicolore (vert et gris, type "S") et tacheté de vert sur métal nu (type "B"). Malheureusement on constate que les marques d'unités sur la dérive ont été soigneusement camouflées, y compris les numéros figurant sur les trappes du train, censure oblige.

 Les bombardiers qui doivent aller pilonner la base repérée par Takeshi sont des Kawasaki Ki-48-II Type 99 (code Lily). Comme pour les Hayabusa, on peut penser que ces appareils appartenaient à une unité d'entraînement, formant les équipages des bombardiers légers. Mais leur camouflage et leur décoration conduiraient à penser le contraire…

 Quand la base ennemie est bombardée, la scène est reconstituée avec des maquettes de Boeing B-17C et de Brewster Buffalo.

 

 Christian Santoir

 *Film disponible sur amazon.com

 

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