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ALEXIS GENTLEMAN CHAUFFEUR


ALEXIS GENTLEMAN CHAUFFEUR

 

Année : 1938
Pays : France
Genre : Comédie
Durée : 1 h 31 min.
Noir et blanc

Réalisateur : Max de VAUCORBEIL, René GUISSART
Scénario : André LUGUET & André LEGRAND

Acteurs principaux :
Suzy PRIM (Madame Tabasco, alias Margot Fontane), André LUGUET (Alexis de Saint-Grisols), Raymond CORDY (Émile Panard), Marcel SIMON (Tabasco), Michel DURAN (Dornach), Jean MARCONI (Silvio), Aimé SIMON-GIRARD (Henri IV).

Musique : Armand BERNARD
Photographie : Enzo RICCIONI
Producteur : Gilbert RENAULT-DECKER
Compagnie Productrice : Films Renault-Decker (FRD)

Avions :

-Caudron C-445 Goéland, F-AQCB

 

Notre avis :

 Le titre de ce film est a priori incomplet, il aurait dû être : « Alexis gentleman chauffeur ET PILOTE », son titre alternatif « Le grand raid-taxi 38 » fait, lui, référence à la fin du film qui est centrée sur un raid aérien Paris-Tokyo. Il faut attendre 49 minutes pour voir un avion…

 Margot Fontane est une actrice capricieuse et égocentrique mariée à un producteur de films. Alexis de Saint Grisols est un ancien pilote de chasse lors de la première guerre mondiale. Il est originaire d’une noble famille et porte le titre de comte. ll ne vole plus depuis l’échec d’un vol entre Paris et Tokyo et il est devenu un chauffeur de taxi, avec son associé Emile Panard. Un jour, Emile retrouve dans leur taxi un portefeuille rempli de billets appartenant à Margot. Alexis le lui rapporte et fait ainsi sa connaissance. Elle le regarde d’abord de haut, puis après plusieurs échanges, elle le trouve très intéressant. Elle l’invite à l’accompagner sur le plateau de tournage du film dont elle est l’actrice principale ; sous son influence, Alexis est engagé pour tenir un rôle de chauffeur. Après une modification du scénario, il se voit confier un rôle de pilote capitaine de l’Armée de l’Air. Alexis est tombé amoureux de Margot et leurs relations deviennent plus intimes. Margot commence à apprécier Alexis de Saint-Grisols, un homme élégant et distingué. Il n'a pas abandonné son rêve de voler à nouveau. Lors d’une scène sur un aérodrome, il lui avoue son amour pour elle et, au lieu de faire rouler l’avion dont il est le pilote, sur la piste de quelques mètres seulement, comme prévu, il décolle devant l’équipe de tournage effarée. Il annonce alors par radio qu’il se rend à Tokyo ! Il y parvient accompagné d’Emile, après avoir fait le plein d’essence lors d’une escale nocturne. De retour à Paris, il est accueilli en triomphe et Margot est totalement séduite par lui, après avoir suivi avec angoisse son vol à la radio.

 Le scenario fut écrit par André Luguet qui s’inspira de sa propre vie. Le 30 décembre 1914, il était passé de l’infanterie à l’aviation comme conducteur automobile. Le 31 juillet 1915, il obtint son brevet de pilote à l’école de Buc et en juillet 1916, il appartenait à l'escadrille C 61. Par contre, il ne participa à aucun raid après la guerre.

 Rappelons que le premier raid aérien Paris-Tokyo eut lieu entre le 24 avril 1924 et le 9 juin 1924, effectué par les aviateurs Pelletier d'Oisy et Besin, soit 20 146 km en 119 heures de vol, avec de nombreuses escales et deux avions.

 La première tentative de vol sans escale entre les deux capitales fut tentée le 12 juillet 1931 par Marcel Doret, Joseph le Brix et le mécanicien René Mesmin. Pour ce long voyage en ligne droite de 11 000 kilomètres, les trois hommes prirent place à bord du monoplan Dewoitine, D.33 baptisé « Trait d’Union ». Malheureusement, le voyage prendra fin plus tôt que prévu. A Nijneoudinsk, en Sibérie, Marcel Doret devra effectuer un atterrissage d’urgence, en raison du givrage de l’avion, Joseph le Brix et René Mesmin ayant sauté un peu plus tôt en parachute. Si le Dewoitine fut détruit, l’équipage fut sain et sauf. Mais dans une nouvelle tentative le 11 septembre, suivant, à cause d’un problème moteur, l’avion va s’écraser à Oufa dans l’Oural. Mesmin et Le Brix seront tués, Doret ayant réussi à sauter en parachute.

 Dans les années 30, seuls des Caudron Simoun monomoteur effectueront des tentatives de vols entre Paris et Tokyo et non des bimoteurs Goéland.

 Le 15 novembre 1936, c’est aux commandes d’un Simoun (F-ANXA) qu’André Japy comptait relier la France au Japon, pour relever le défi lancé par le ministère de l’Air de relier les deux capitales (10 000 km) en moins de 100 heures de vol. Le raid s’achèvera par un accident sur l’île de Kyushu, à moins de 900 km du but, pour des raisons météorologiques, après 14 000 km parcourus en 78 heures et 14 minutes de vol.

 Le 20 janvier 1937, Marcel Doret accompagné de Micheletti, son opérateur radio, décolla de Paris en direction de Tokyo à bord d’un Caudron Simoun (F-ANXM). Malheureusement, c’est aux environs d’Hanoï que leur randonnée aérienne s’arrêtera, après avoir parcouru 10 775 kilomètres en 71 heures et 15 minutes de vol ; il fallait  atterrir, car une violente tempête sévissait. Comble de malchance, ils vont endommager leur appareil…

 Bref, le vol aller et retour d’Alexis est un exploit incroyable et invraisemblable, mais au cinéma tout est possible…

 Le tournage se déroula en partie sur l‘aérodrome de Buc (Yvelines), ex Aéroparc de Blériot, reconnaissable par son grand bâtiment à deux étages ayant une tour aux quatre coins.

 

Les avions du film :

 Le seul avion utilisé par la production est un Caudron C.445 Goéland, filmé surtout au sol et en vol, à partir du sol. Des scènes ont été filmées dans le vrai cockpit. On voit Emile filmé de près à côté du moteur gauche, au capot ouvert, un Renault 6Q-01 de 6 cylindres équipé d’une hélice Ratier dont le logo est très visible (les deux moteurs avaient des hélices en pas inversé). Renault se fait donc ici un peu de publicité, comme avec le nouveau taxi d’Alexis et Emile, une Renault Vivaquatre blanche dont l’achat fait l’objet d’une courte scène…Renault avait racheté la société Caudron en 1933.

 Construit en 1936 (c/n 7346.01) c’était le premier C.445 produit, immatriculé « F-AOYO » au nom de la Société Caudron d’Issy-les-Moulineaux. Il fut gravement endommagé lors d’un accident en février 1937. Reconstruit en juillet, il revola immatriculé « F-AQCB », acquis par Roger Gérard de Paris, l’avion étant basé au Buc. Roger Gérard était donc son propriétaire au moment du tournage. Cet homme était un pilote de chasse ayant participé à la première guerre mondiale. Capitaine de réserve dans l'Armée de l'Air, ce pilote était un passionné d’aviation et vola sans cesse dans les années trente, à travers l'Europe et l'Afrique du Nord, participant à de nombreux rallyes aériens. Entre 1936 et 1939, il était employé par le 2e Bureau de l'Armée de l'Air pour remplir des missions photographiques. Réquisitionné en 1939, l’avion fut mis au nom de l’Etat Français avec le nouveau matricule « F-BAAB » et livré à Air France, le 26 septembre, basé à Marseille. Il fut accidenté trois fois : le 6 mars 1941 à Nice ; le 10 juin 1941 à St Etienne de St Geoirs (Isère) au cours d’un vol postal Lyon-Grenoble-Nîmes ; à Marseille le 1er juillet 1941. Début 1942, il fut employé en Afrique du Nord et aurait quitté Air France, le 8 mai 1942. Il sera récupéré par la Luftwaffe le 2 novembre 1943 à Toulouse et aurait été détruit le même mois, sans que l’on en connaisse les circonstances. Malgré tout, il ne sera radié des registres français que le 25 septembre 1951…

 Sur l’aérodrome de Buc, on entrevoit en arrière-plan plusieurs avions de tourisme d’époque, malheureusement non identifiables avec certitude, vu la mauvaise qualité des images. Devant la « maison » Blériot sont garés deux monoplans à aile haute (des Potez 58 ?). Quand le Caudron revient de Tokyo, on distingue sept monomoteurs, dont deux biplans (Caudron Luciole ?) et un monoplan Parasol (Potez 58 ?). En premier-plan, figure un avion mieux reconnaissable, un avion anglais, un Percival 10 Vega Gull.

 

 Christian Santoir

 *Film disponible sur YouTube

 

 

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