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Le MUR DU SON

LE MUR DU SON

Vo. Breaking the Sound Barrier

(Aka : The Sound Barrier)

  

Année : 1952
Pays : Royaume-Uni
Durée : 1 h 58 min.
Noir et blanc

Réalisateur : David LEAN
Scénario : Terence RATTIGAN

Acteurs principaux :
Ralph RICHARDSON (John Ridgefield) , Ann TODD (Susan Garthwaite) , Nigel PATRICK (Tony Garthwaite), John JUSTIN (Philip Peel), Denholm ELLIOTT (Christopher Ridgefield), Joseph TOMELTY (Will Sparks), Dinah SHERIDAN (Jess Peel), Jack ALLEN (Windy Williams), Anthony SNELL (Peter Makepeace)

Musique : Malcolm ARNOLD
Photographie : Jack HILDYARD
Producteur : Norman SPENCER
Compagnie productrice : London Films

Avions :

  • -Avro Anson Mk 1 s/n N9949
  • -De Havilland DH. 82 Tiger Moth  c/n 3861, s/n N6548, G-AHRM 
  • -De Havilland DH.106 Comet 1 c/n 06004, G-ALYR
  • -De Havilland DH.106 Comet 1 c/n 06002, G-ALZK
  • -De Havilland DH.113 Vampire NF Mk.10  c/n 13005, WP232
  • -Supermarine 517 Swift VV119
  • -Supermarine Spitfire LF IX
  • -Vickers-Supermarine Attacker F.1, WA485

 Notre avis :

 Premier projet indépendant de David LEAN, ce film explore les problèmes des nouveaux jets face au franchissement du mur du son et à ses dangers. L'idée première du film vint à David LEAN lorsqu'il lut dans un journal, en 1946, le récit de la mort de Geoffrey de Havilland, au-dessus de l'estuaire de la Tamise, alors qu'il tentait de battre le record du monde de vitesse en palier sur un avion construit par son père. LEAN réussit à convaincre sans peine Alexander KORDA, un passionné d'aviation qui avait déjà produit en 1940 le documentaire "Conquest of the air" et, en 1942, "Un de nos avions n’est pas rentré", de produire le film.

 Le mur du son combine l’histoire des premiers avions à réaction avec celle d’un personnage fictif, John Ridgefield, le propriétaire d'une usine de construction aéronautique. Durant la guerre, sa fille Susan épouse le jeune pilote Tony Garthwaite. Susan a un jeune frère, Christopher, qui, pour ne pas déplaire à son père, et bien qu'il ne soit pas encore sûr de lui, consent à faire son premier vol en solo. Mais le jeune homme panique et se tue à l’atterrissage. Après la guerre, Tony est embauché par son beau-père comme pilote d'essai. Après que Susan lui a annoncé qu’elle est enceinte, ils partent en Égypte livrer un Vampire. Partageant entièrement les vues de Ridgefield, Tony accepte de tester un avion à réaction, le "Prometheus", conçu par l'ingénieur en chef Will Sparks et susceptible de franchir le mur du son. Mais il se tue après avoir engagé son avion dans un piqué dont il ne peut sortir. Susan tient son père pour responsable de la mort de Tony. Horrifiée par son apparente indifférence, Susan s'installe dans la demeure d'un pilote ami de Tony, Philip Peel, et de sa femme Jess, où elle donne naissance à un fils. Poursuivant son but, Ridgefield demande maintenant à Philip de prendre la relève de Tony et de tenter à son tour le franchissement de la barrière fatidique. Cette fois, après plusieurs essais, la réussite est totale et Susan, comprenant que son père, possédé par la conquête de l'inconnu, n'est pas l'être sans cœur qu'elle pensait, retourne vivre auprès de lui avec son enfant.

Ridgefield, dont le fils et le beau-fils se tuent en avion, et qui est passionné d’astronomie, rappelle inévitablement le constructeur Geoffrey Raoul de Havilland dont deux des trois fils se tuèrent en essayant ses prototypes. De Havilland était en outre un naturaliste distingué, un entomologiste et un photographe de la vie sauvage renommé. La mort de Geoffrey de Havilland Jr. est évoquée dans le film ; son DH.108 se désintégra en l’air lors d’un vol à grande vitesse au dessus d’Egypt Bay (Kent) en septembre 1946.

 Pendant la guerre, plusieurs pilotes furent confrontés aux effets de la compressibilité lors de piqués, comme on le voit au début du film. Il est probable qu’un avion fusée, le Messerschmitt Me 163, passa le mur du son, mais sans qu’on en ait la preuve formelle. Contrairement à la thèse du film, c'est un Américain, Chuck Yeager, qui franchit pour la première fois le mur du son, le 14 octobre 1947. Mais il est vrai que c’était sur un avion-fusée ; ici, il s’agit d’un avion à réaction. George Welch, un pilote d’essai de North American, est sans doute le premier à avoir franchi le mur du son en piqué, le 1er octobre 1947, sur un XP-86 Sabre. Mais son vol ne fut pas reconnu officiellement, malgré de nombreux témoignages. Welch était un civil et les autorités américaines préférèrent reconnaître la performance du militaire Yaeger, effectuée en palier quelques jours plus tard. Le F-86 fit donc son premier vol supersonique "officiel", six mois plus tard, le 26 avril 1948... En Angleterre, le pilote d’essais John Derry (dont le nom figure dans le générique) aux commandes du troisième De Havilland D.H.108 atteignit Mach 1, le 9 septembre 1948, en piquant d’une altitude de 12.190 m. Le DH. 108 Swallow était un avion très inspiré du Messerschmitt P.1111 (et aussi du Northrop X-4) ; il avait été dessiné par R.G. Bishop qui avait eu communication, en Allemagne, des plans des ingénieurs de Messerschmitt détenus à Oberammergau à la fin de la guerre. Le Swallow avait été construit pour étudier l’aile en flèche et fournir des données de base utilisables pour le DH. 106 Comet. À l’époque du film, le Comet était le premier avion au monde à faire accéder les voyageurs aériens à l’ère du jet.

 Méticuleux, David LEAN mit deux ans à réaliser le film qui eut un immense succès en Angleterre et aux États-Unis, où il se vit attribuer l'Oscar de la meilleure bande sonore (sic !) ; la critique new-yorkaise, quant à elle, sacra Ralph RICHARDSON meilleur acteur de l'année, distinction également décernée par la British Film Academy qui donna aussi le Prix du Meilleur Film à l'œuvre de David LEAN. Pour le lancer en France, KORDA, accompagné de quelques acteurs du film et de David LEAN, vint à Paris à bord d'un Comet. "LE MUR DU SON" est un grand classique du film d’aviation avec ses trente-deux minutes de scènes aériennes magnifiquement filmées par Jack HILYARD. Les Anglais sont sans conteste les meilleurs spécialistes du genre. D’un point de vue technique, c’est un des meilleurs films sur l’aviation. Il décrit bien les problèmes aérodynamiques posés par le franchissement du mur du son, à la fin des années 1940. Selon Chuck Yaeger, essayer de passer le mur du son comme dans le film, c’est à dire en piqué prononcé, aurait été suicidaire. Mais le "piqué de la mort" est une scène incontournable dans maints films d’aviation...

 

 Les avions du film :

 Le générique du film fait figurer, à côté des acteurs, les principaux avions vedettes du film : les De Havilland Comet et Vampire, les Vickers-Supermarine Attacker et Swift. Les séquences aériennes ont été filmées sur l'aérodrome de Chibolton, près de Nether Wallop (Hampshire) où Vickers Supermarine, essayait ses prototypes de jets (Attacker et Swift).

 On voit deux DH 106 Comet 1 dans le film : le G-ALYR (c/n 06004), et le G-ALZK (c/n 06002) sur l’aéroport Farouk du Caire. Le premier fut livré à BOAC le 16 octobre 1951 et retiré du service en 1954, pour subir des tests de fatigue à Farnborough. Le second fut prêté à BOAC par le Ministry of Supply le 2 avril 1951 et ferraillé en 1954. Le 24 avril 1950, un Comet 1 rallia en une seule traite Londres au Caire avec onze techniciens, avant de poursuivre son voyage vers Khartoum et Nairobi pour y faire des essais en milieu tropical.

 Tony et Susan vont en Egypte avec un DH. 113 Vampire NF Mk 10 (c/n 13005, WP232), équipant le 25 Squadron de West Malling en 1951; ce chasseur de nuit remplaçait les Mosquito. Initialement ce type d’appareil était destiné à l’exportation, et une douzaine furent commandés par l’Égypte en octobre 1949, mais quand l’embargo sur les exportations d’armes vers ce pays fut décrété, les Vampire furent pris en charge par la RAF, comme avions de transition. Cinq heures pour faire 3 645 km entre Londres et Le Caire (soit une moyenne de 725 km/h) aurait au moins nécessité une escale de ravitaillement et l’emport de bidons.

 Le prototype du Vickers-Supermarine Attacker est vu sous la forme d’une petite maquette. Un exemplaire de série appartenant à la Royal Navy (WA485) a été utilisé, sans ses canons, pour le tournage. Le Supermarine type 510 apparaît sur un plan. Le second prototype du Swift (VV119) tient le rôle du "Prometheus". L’avion du film est le type 535 avec un train tricycle, qui fit son premier vol le 27 mars 1950. Au moment du tournage, cet appareil était encore en essai, piloté entre autres, par le Squadron-leader Daniel W. Morgan de la RAF dont le nom figure dans le générique. Cet avion ne fit qu’approcher de la vitesse du son ; il fut retiré du service en 1955 et envoyé à la base d’Halton où il servit de cellule d’instruction pour les mécaniciens.

 Mais le film permet de voir d’autres avions, en seconds rôles. Au début du film, un Supermarine Spitfire (LF IX ?) fait de la voltige au dessus des falaises de Douvres. Le fils Ridgefield se tue dans un DH 82 Tiger Moth (c/n 3861, G-AHRM), un avion qui sera réellement détruit en 1958. Il n’est pas facile de se tuer dans un Tiger Moth, un avion très tolérant, sauf si on fait, comme dans le film, son arrondi à une dizaine de mètres du sol, moteur coupé, sans rendre la main ! Un Avro Anson Mk 1 (N9949) est aperçu au début du film, au sol et au décollage.

 En arrière-plan, on aperçoit au Caire, un Douglas DC-3, en Angleterre, un DH 89 Dragon Rapide, un Gloster Meteor III, un Handley Page Hermes, et dans un hangar, une rangée de Hawker Sea Fury F.11 (dont le VW560), qui, en 1952, était encore le principal chasseur-bombardier de la Fleet Air Arm. Le réacteur "top secret" vu au début, dans les usines Ridgefield est un De Havilland Goblin qui équipa les DH 108. On ne voit pas de DH 108 dans le film, les trois exemplaires ayant tous été détruits par accident, mais tout à la fin du film, une maquette pointée vers le ciel étoilé lui ressemble fort.

 

Christian Santoir

*Film disponible sur amazon.fr

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