Vo. OZORA NO SAMURAÏ
Année : 1976
Pays : Japon
Genre : guerre
Durée : 1 h 42 min.
Couleur
Réalisateur : Seiji MARUYAMA
Scénario : Katsuya SUSAKI, d’après le livre de Saburo SAKAI « Samurai » (1957)
Acteurs principaux :
Hiroshi Fujioka (Saburo Sakai),
Taro Shigaki (Lieutenant Sasai), Tetsuro Tamba (Capitaine Saito), Akihiko
HIRATA, Takeo CHII, Ren YAMAMOTO
Musique : Toshiaki TSUSHIMA
Photographie : Rokuro NISHIGAKI
Effets spéciaux : Koichi KAWAKITA
Production ; Takahide MORISHI
Compagnie productrice : Toho Motion Picture Inc.
Avions :
- Cessna
Skywagon 207
- Mitsubishi Zéro A6M2, maquettes éch. 1/1
Notre avis :
Pendant longtemps, l’as japonais aux soixante quatre victoires, Saburo SAKAÏ, résista aux producteurs de films de crainte qu‘ils utilisent ses mémoires pour tourner un film de guerre à petit budget qui aurait été une sorte d’insulte à ses camarades morts au combat. Finissant par donner son consentement, Sakai posa néanmoins certaines conditions. Il surveilla les scénaristes, leur indiquant comment les pilotes de l’époque agissaient et s’exprimaient, contrôla les décors pour qu’une baraque, une salle de briefing ou une piste, ressemble à ce qu’elle était à Rabaul, en 1942. Le film est très proche du livre de Sakai et le réalisateur Seiji MARUYAMA s’en inspira directement pour certaines scènes.
L’histoire débute après la guerre, quand Saburo Sakai décolle par mauvais temps avec un avion de la croix rouge pour livrer des médicaments sur une île. En vol, il se rappelle l’époque où, au lieu de sauver des vies, son avion lui servait à en détruire le plus possible ! En Nouvelle Guinée, en 1942, Saburo Sakai est déjà un excellent pilote qui s’impose une grande discipline. Il ne boit pas, et entre les missions, il s’efforce de se relaxer, contrairement à certains de ses camarades qui préfèrent des dérivatifs plus puissants. En l’air, il se montre un chef de section très attentif à ses coéquipiers mais aussi très critique. Son groupe de chasse côtoie des équipages de bombardiers que l’on envoient attaquer l’ennemi sans escorte. Beaucoup disparaissent avant d’avoir atteint leurs objectifs, abattus par la chasse adverse. Sakai décide d’accompagner ces bombardiers alors qu’il est censé faire des essais. Mais son chef lui interdit de recommencer, ces hommes étant des volontaires qui ont choisi leur sort. ! Quand les Américains débarquent à Guadalcanal, les missions se font plus nombreuses. Les bombardiers B-17 posent des problèmes nouveaux aux pilotes dont la solution est l’attaque frontale ou à plusieurs. Les Wildcats inaugurent une nouvelle tactique (la «Thatch wave ») qui déconcerte les Japonais au début. Une idylle se noue entre Sakai et une infirmière qui était la soeur d’un de ses pilotes abattu. Un jour, Sakai s’emporte contre à un officier d’Etat-Major qui semble faire peu de cas de la vie des jeunes pilotes. Lors d’une attaque sur Guadalcanal (le 8 août 1942), il est touché par le mitrailleur d’un Dauntless, et grièvement blessé à l’œil droit. A moitié aveugle, à la limite de l’évanouissement, il réussit à atterrir à Rabaul après un vol de plus de quatre heures au dessus de l’océan ! Le film se termine en revenant sur Saburo Sakai dans son avion de la croix rouge, pensant à tous les jeunes hommes morts en vain pendant cette guerre.
Le film porte la marque indéniable de l’auteur qui fut un héros national, mais aussi un homme très critique sur le rôle de son pays et même de l’empereur, pendant la seconde guerre mondiale, un comportement plutôt rare chez les anciens combattants japonais; il est vrai qu’aujourd’hui, beaucoup de gens au Japon, ne se rappellent plus ce qui s’est passé avant Midway... Sakai combattit jusqu’au bout, avec un oeil en moins, et mena même une mission kamikaze, mais n’ayant pu trouver l’objectif, il préféra ramener les pilotes à leur base, en encourant sans doute les foudres de ses supérieurs ! Après la guerre, Sakai se rapprocha de la foi bouddhiste et jura de ne plus tuer, ne fut-ce qu’un moucheron !
Ce film permet de voir la très grande discipline régnant dans la marine impériale et les rapports hiérarchiques très stricts, et parfois tendus, entre officiers et sous-officiers. On y remarque aussi la fierté des « pilotes de Zéro » se croyant supérieurs aux autres. Le mythe de l’invincibilité du Zéro fut entretenu par la propagande nippone, et l’Etat-Major finit par s’endormir sur ses lauriers, et par sous estimer l’adversaire. Une erreur qui fut fatale. La supériorité du Reisen, sans doute justifiée au début de la guerre, ne l’était plus du tout vers la fin. Sakai, selon ses propres dires, ne craignait pas le Wildcat ou le P-40, mais redoutait de se trouver face à un Hellcat, un Corsair ou un P-38.
Le film comporte certaines maladresses comme l’emploi de camions modernes, sans parler des coupes de cheveux ! Nous sommes dans les années soixante dix, et à Tokyo, comme à Londres, ou Los Angeles, les acteurs ont un système capillaire généreux qui dépasse largement des casquettes, calots et autre bonnets de police. Mais on note certains détails véridiques, comme les pilotes communiquant par signes. En effet, vu les distances à parcourir pour des chasseurs de la Marine basés à terre, (Rabaul-Guadalcanal : 1100 km à vol d’oiseau), les Zéros avaient été allégés au maximum pour allonger le rayon d’action, et les radios avaient été déposées. Au début du film, un pilote se tue suite à une erreur de pilotage, car il n’était pas en pleine possession de ses moyens ; il avait le paludisme. Il est exact que beaucoup de pilotes japonais étaient victimes de la malaria, les services médicaux de la marine impériale étant des plus sommaires. On remarquera aussi que les pilotes portent pratiquement en permanence leur serre tête en cuir fourré sur la tête, même au mess !
Le film a un rythme assez lent et n’a rien à voir avec les productions américaines comme « Les diables de Guadalcanal ». On comparera d’ailleurs ces deux films, sur la même époque, avec intérêt. L’un nous montre la guerre du Pacifique vu par un samouraï, l’autre par des cow-boys (dont John Wayne..). Bref, ZERO PILOT c’est une sorte de « Lettres d’Iwo Jima » avant ...la lettre.
Les avions du film :
A l’époque, au Japon, aucun avion du scénario n’existait, à part un seul Zéro conservé pieusement dans le National Science Museum de Tokyo. Il revint au directeur des effets spéciaux de recréer une guerre aérienne crédible en n’utilisant que des maquettes. Il fallut d’abord obtenir les plans des appareils à reproduire ; la revue Koku Fan parue juste après la guerre, fut d‘un grand secours car elle fournissait les dimensions de tous les appareils japonais et alliés ayant participé au conflit. Vingt cinq charpentiers et peintres travaillèrent pendant plus de deux mois pour fabriquer les maquettes. Saburo Sakai assista sans mot dire au tournage de toutes le séquences aériennes, amenant parfois sur le plateau des anciens camarades de combat.
Pour les dogfights, on utilisa non seulement des maquettes suspendues au plafond par des fils invisibles, mais aussi des modèles radio commandés filmés en l’air à partir d’un Cessna. C’était avant « Star war » et l’irruption de l’ordinateur dans les laboratoires de montage, et Koichi KAWAKITA produisit là le nec plus ultra des effets spéciaux en matière d’avions. Les studios utilisèrent ainsi au moins cinq maquettes grandeur réelle de Zéro A6M2 (avec une verrière pas très bien reproduite), mais aussi des modèles des Mitsubishi G4M1 Betty. Coté allié, on trouve des Bell P-39 Airacobra, Grumman F4F Wildcat, Martin B-26, Boeing B-17 et un Spitfire, avec un code factice (CR). Le film compte cependant un vrai avion, un Cessna Skywagon 207 frappé de la croix rouge, apparaissant au tout début du film.
Christian Santoir
* Film disponible sur YouTube
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