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SAIGO NO TOKKOTAI

 SAIGO NO TOKKOTAI
Vo. 最後の特攻隊

(Le dernier kamikaze)

 

Année : 1970
Pays : Japon
Genre : guerre
Durée : 2 h 02 min
Noir et blanc.

Réalisateur : Jun'ya SATO
Scénario : Kinya NAOI

Acteurs principaux :
Kôji TSURUTA, Ken TAKAKURA, Shin'ichi CHIBA, Tatsuo UMEMIYA, Bunta SUGAWARA, Tomisaburô WAKAYAMA.

Musique : Toshiaki TSUSHIMA
Photographie : Masahiko IIMURA
Producteur : Hiroshi OKAWA
Compagnie productrice : Toei Tokyo

 Avions : 

  • -Grumman F6F Hellcat, maquettes
  • -Mitsubishi A6M5 Zero, maquettes éch. 1/1
  • -North American AT-6 Texan

Sur extraits de films :

  • -Boeing B-29
  • -Mitsubishi G4M
  • -Nakajima B6N Tenzan

  

Notre avis :

Il s'agit d'un des nombreux films traitant des "problèmes" des Kamikazes, lors de la seconde guerre mondiale. Des "kamikazes", il y en eut sur tous les fronts; des pilotes anglais, français, allemands, russes décidèrent de se jeter sur leurs adversaires pour mieux les abattre. Mais ce geste n'était pas prémédité, un pilote blessé ou à bord d'un appareil endommagé, sans espoir de retour, n'avait plus rien à perdre et voulait dans un geste ultime, infliger le plus de dégâts possibles à l'adversaire. Il s'agissait de cas isolés, plutôt rares, la hiérarchie militaire, même nazie, n'appréciant pas ce type de comportement. Vers la fin de la guerre, quand le sort de l'Allemagne était prévisible, des membres de la SS voulurent mettre sur pied une unité suicide basée sur le volontariat, un projet encouragé par des pilotes nazis, comme Anna Reistch, par exemple. Mais Hitler n'y était pas favorable ne voyant pas l'efficacité d'une telle tactique.

Au Japon, la situation fut différente. De tels exploits improvisés étaient réguliers, massifs, planifiés et ordonnés. Le 20 octobre 1944, le quartier général impérial, afin de freiner la poussée ennemie, décide de constituer des unités d'attaque spéciale "Tokkôtai" (abréviation de Tokubetsu kôgekitai), soit "forces d’attaque spéciale", qui, par leur sacrifice, devaient rappeler le Kamikaze, le "vent divin", qui sauva, en 1274, le Japon de l'invasion mongole. Cette tactique désespérée était basé sur le code du Bushido, selon lequel un soldat ne peut se rendre ou être fait prisonnier, il doit mourir s'il ne peut vaincre. C'était le cas du Japon à la fin de 1944. Les militaires voulaient transformer, non seulement les aviateurs, mais aussi tous les civils japonais, jeunes ou vieux, en "kamikaze", quand les Américains débarqueraient sur le territoire "sacré" du Japon. Les Américains le savaient et s'attendaient à de très lourdes pertes, c'est ce qui accéléra les travaux sur la bombe atomique et provoqua un désastre, d'un type nouveau, que les Japonais n'imaginaient pas Ils croyaient simplement que les attaques suicides permettraient, non pas de dominer l'armée américaine, mais de créer un tel choc pour les responsables américains que cela les mènerait directement à la table des négociations. Peine perdue ! Notons qu'une seule bombe atomique ne suffit pas à faire céder l'état major japonais et qu'il en fallut une deuxième, plus, l'intervention de l'empereur Hirohito, pour arrêter la boucherie…

Le film commence quand les Japonais ont déjà complètement perdu le contrôle du Pacifique occidental en raison de la défaite de la bataille au large des Mariannes et de l'écrasement de Saipan. Les Américains avaient débarqué dans le golfe de Leyte, aux Philippines. Sur une base japonaise, le colonel Henmi a ordonné au capitaine de la marine Sokata de sélectionner les membres de la première force d'attaque spéciale. Sokata s'est immédiatement porté volontaire et a recruté d'autres volontaires. Ce matin-là, les avions d'attaque spéciale ont décollé les uns après les autres. L'un d'eux était piloté par le major-général Yashiro. Il voulait finir la guerre en sacrifiant sa propre vie. Cependant, la formation rencontre de très nombreux chasseurs américains, sans parvenir à atteindre le flotte ennemie, et elle a été en grande partie abattue. Le capitaine Munakata a été blessé et a pu retourner à la base. Le 19 mars 1945, l'armée américaine a débarqué à Okinawa. Le taux de réussite des Kamikazes n'était que de 13% et 67% d'entre eux avaient été abattus par les chasseurs ennemis. Afin d'améliorer ces chiffres, il a été décidé de former un escadron pour escorter le corps d'attaque spécial, et Munakata est désigné comme son commandant. Quelques jours après le transfert de Munakata à Kanoya, dans l'île de Kyushu, le lieutenant Yashiro rejoint la Force d'attaque spéciale. Vingt-quatre avions d'attaque commandés par Yashiro et douze avions d'escorte commandés par Munakata, décollent eu peu plus tard. Quand les avions se heurtent aux chasseurs américains, Yoshiro est blessé et demande à Minakata de le guider jusqu'à sa cible, ce qu'il fait. De retour à la base, Munakata apprend avec incrédulité que la guerre est finie, le Japon ayant annoncé une capitulation complète et inconditionnelle. Ce soir là, Munakata décolle et va rejoindre ses camarades mort au combat…

Le film s'étend sur les problèmes des "volontaires" de la mort qui n'étaient pas si volontaires que cela. Beaucoup ne faisaient qu'obéir aux ordres, malgré eux. Le film développe les clichés traditionnels tels que l'héroïsme, la lâcheté, la loyauté envers l'empereur et le pays, On voit ainsi le capitaine Munakata, dont le père, un diplomate, est arrêté par la police politique pour opinion pacifiste, qui préfère combattre plutôt que de se sacrifier; mais, finalement, il le fera, plus touché par la mort de ses camarades que par le sort incertain de sa femme et de son jeune fils dans un Japon dévasté. Se tuer c'est relativement facile et rapide, vivre est souvent plus compliqué et plus long…Il y aussi le personnage de Yoshikawa qui abandonne par deux fois sa mission suicide, parce qu'il est trop préoccupé par le sort de sa mère, veuve et aveugle. Quand il va lui déclarer qu'il quitte la Marine, et lui demande de s'enfuir avec lui dans les montagnes, elle le rejette et le traite de lâche, mais quand, il va mourir, pour se racheter, elle s'effondre.

Comme Pierre Corneille l'a écrit, en 1640, dans sa pièce de théâtre "Horace" : "Mourir pour la patrie est un si digne sort / Qu'on briguerait en foule une si belle mort ". Cette citation aurait pu être écrite par l'amiral Takijiro Onishi, le concepteur des unités suicides. Ce concept est universel, c'est la façon de l'appliquer qui ne l'est pas.

Les Kamikazes ont laissé de nombreuses lettres, écrites la veille de leur mort. Ce qu'il en ressort, c'est que peu d'entre eux souhaitaient «longue vie à l’Empereur»; rares sont les pilotes affirmant être «pleins de bonheur» au seuil de la mort. Leurs lettres sont adressées à leur famille, souvent à leurs mères. Elles sont écrites par des jeunes qui avaient en moyenne 21 ans, généralement de simples soldats, mais aussi près d’un millier d’étudiants que le gouvernement avait vite diplômés pour les envoyer combattre, après les avoir été hâtivement formés. La pression psychologique était telle qu’ils pouvaient difficilement se soustraire au devoir qu’on exigeait d’eux. En cas de refus, ils auraient subi l’opprobre de l’armée et de leur entourage et, au Japon, le déshonneur est insupportable. "Les étudiants étaient souvent des esprits nourris par les classiques grecs et latins, le christianisme, le marxisme, le romantisme et il était difficile d'en faire de fanatiques ultra nationalistes... Quand l’opération Kamikaze fut instituée, pas un seul officier des écoles militaires ne se porta volontaires, ils n’étaient que trop convaincus de l’absurdité de cette mort" (OHNUKI-TIERNEY- 2013).

 

Les avions du film :

Le principal avion du film est le Mitsubishi A6M5 Zero. Au moment du tournage il n'y avait aucun Zero préservé sur le sol japonais, et encore moins en état de vol. La production fit donc construire au moins cinq maquettes grandeur réelle qui ne sont pas des répliques très exactes. Ainsi, la forme du capot moteur n'est pas assez profilée, les ailes n'ont pas d'ailerons, la roulette de queue est fixe et trop grosse, les pipes d'échappement sont cylindriques au lieu d'être plates, les pales l'hélice sont trop étroites, le viseur est surdimensionné…En vol, ils sont représentés par des maquettes de plus petite échelle.

Sur des images en noir et blanc, leur décoration est difficile à examiner. Elle est a priori de type S : vert foncé sur les surfaces supérieures, gris clair sur les surfaces inférieures. Ils portent sur la dérive les codes de leurs unités. La plupart des avions portent le code "203" (203-119, 142, 213, 221, 246, 249,349..), mais on remarque les codes "206-32", "-402", "105-98"…

Le kokutai 203 (groupe aérien 203), marqué aussi "3" ou "03", fut constitué en avril 1943 à Atsugi. Le 12 octobre 1944, le groupe fut envoyé aux Philippines, basé le 22 octobre à Bamban, Luçon. Le kokutai 203 fut bien choisi pour effectuer des attaques suicides (Tokko) sur la flotte américaine. Le groupe n'était pas uniquement équipé de Zero, mais aussi de chasseurs de nuit Nakajima J1N1-S Gekko. En décembre, le 203 n'avait plus d'avions ! Rapatrié au Japon, il fut rééquipé de Zero, sur les bases de Kagoshima, Izumi et Kasnabara. Le 21 mars 1945, ses Zero escortèrent des Mitsubishi 3GM Rikko emportant des Yokosuka MXY-7 Ohka, des bombes pilotées équipées de fusées. Aucun ne parvint près de sa cible, après avoir été interceptés par des chasseurs américains…En avril 1945, le groupe rejoignit le 5eme Flotte aérienne pour prendre part à la bataille d'Okinawa. Fin juillet 1945, le 203 kokutai reçut l'ordre de préserver ses appareils en vue de l'invasion américaine du territoire national, peu avant la reddition du Japon, le 15 août 1945.

Les codes "206" et "105" sont inconnus et vraisemblablement faux, quant au "-402", il s'agissait du Genzan kokutai, renommé kokutai 252 en septembre 1942. En février 1944, cette unité de chasseurs était basée au Japon, comme unité de défense du territoire national.

Les Zero kamikazes portent sous le fuselage une bombe de 250 kg, qui affectait gravement leur manœuvrabilité.

Quand Yoshikawa décolle avec un Zero en feu et qu'il veut larguer la bombe en altitude, on le voit tirer en arrière les deux petits leviers situés sur le panneau gauche du cockpit; en réalité, seul le levier de gauche larguait l'unique bombe ventrale, l'autre levier, à droite, était celui du verrouillage de la roulette de queue, qu'il n'était donc pas nécessaire d'actionner alors qu'elle était rentrée…

D'autres "Zero" sont de vrais avions, des North American T-6F, non modifiés; on en voit au moins trois, dont un qui décolle. Ils se repèrent facilement par leur train d'atterrissage plus court et plus étroit, par leur longue verrière recouvrant deux cockpits, leur capot moteur plus court, l'absence de cône d'hélice... Ils ont reçu le même camouflage que les maquettes. Ces avions devaient appartenir à la Force aérienne d'autodéfense. En 1970, ils étaient sur le point d'être réformés, en service depuis 1955.

Face au Zéro, on ne voit que des Grumman F6F Hellcat, ou plutôt leurs maquettes. Curieusement, ils portent des étoiles postérieures à janvier 1947, certains ayant le code de dérive "RF", également inscrit sur l'aide droite, et une grande bande à l'arrière du fuselage, un type de marquage postérieur à juillet 1945, qui remplaçait les codes graphiques. Le code "RF" appartint à une unité de réserve de l'US Navy basée à New-York. En 1947, "RF" sera transformé en "R".

Tous les autres avions sont vus sur des extraits de documentaires. Au début du film, on assiste au décollage de torpilleurs Nakajima B6N2 Tenzan, dont les "653-46"  et "653-12"qui passent en accélérant devant l'îlot du porte-avions "Zuikaku", on voit également une formation de bombardiers Mitsubishi G4M. D'autres avions japonais sont vus en train d'attaquer les porte-avions américains, sur des documentaires très connus. Apparaissent également, rapidement, des Boeing B-29 Superfortress en train de larguer leurs bombes.

 

Christian Santoir

* Film disponible sur www.ok.ru

Pour mieux comprendre le phénomène Kamikaze, lire : Emiko OHNUKI-TIERNEY-2013. "KAMIKAZES. Fleurs de cerisier et nationalismes"- 2013. Ed. Hermann, Paris, 580 p.

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