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RIKUGUN HAYABUSA SENTOTAI

RIKUGUN HAYABUSA SENTOTAI

Vo. あゝ陸軍隼戦闘
(L'escadrille des Faucons de l'Armée)

 

Année : 1969
Pays : Japon
Durée : 1 h 40 min.
Genre : guerre
Couleur

Réalisateur : Mitsuo MURAYAMA
Scénario : Katsuya SUSAKI

Acteurs principaux :
MA koto SATO (Lieutenant Tatéo Kato), Shino FUJIMURA (le femme de Kato), Sein HIRAIZUMI (Lieutenant Vihara), Koji HONGO (Lieutenant Ando), Jun FUJIMAKI (Cho Meishan), Yoko NAMIKAWA (Keizo).

Musique : Sitar OMORI
Photographie :  Kimiko WATANABE
Compagnie productrice : Daiei Motion Picture Company

Avions :

  • Brewster Buffalo, maquettes
  • Bristol Blenheim Mk.IV, maquette
  • Kawasaki Ki-56
  • Mitsubishi type Ki-1
  • Nakajima Ki-27b
  • Nakajima Ki-43 Hayabusa, répliques 
  • Polikarpov I-16, maquettes 

 

Notre avis :

Ce film patriotique est la deuxième biographie filmée du grand as japonais et héros, Tatéo Kato, mort au-dessus du golfe du Bengale, à 39 ans..

Né en 1903 à Hokkaido, ce fils de sergent, tué lors de la première guerre sino-japonaise, fréquenta l'académie militaire de l'Armée, en 1925. Il rejoignit bientôt la force aérienne naissante et fut admis à l'école de Tokorozawa. Elève doué et plein de talent, il obtint rapidement son brevet et devint même instructeur; il était, en 1932, le responsable du centre de formation d'Akeno. En 1937, avec l'éclatement du second conflit sino-japonais, il participa aux combats à la tête du 2° Dataï et obtint neuf victoires. En 1939, il retourna au Japon et après avoir fréquenté l'académie militaire supérieure, il fut affecté, avec le grade de commandant, au grand quartier général et accompagna le général Hisaichi Terauchi en Allemagne, pour visiter la Luftwaffe. Lors du déclenchement de la guerre du Pacifique, il fut nommé à la tête du 64° Sentai, basé à Guangzhou en Chine. Plus tard, Kato combattit sur les fronts de Malaisie et de Birmanie, où il affronta, en décembre 1941, les Tigres volants américains. Kato fut tué au dessus du golfe du Bengale, le 22 mai 1942, alors qu'il attaquait un bombardier britannique; il avait alors 16 victoires à son actif. Il fut promu, à tire posthume, au rang de général et décoré de l'ordre du Milan d'or, en septembre 1942. Il fut célébré comme "dieu de la guerre" lors d'une cérémonie spéciale, au temple de Yasukuni, à Tokyo, en octobre 1942. Sa vie fera l'objet d'un film, "Kato Hayabusa Sentaï", de Kajiro Yamamoto, sorti le 9 mars 1944.

Le film commence quelque temps avant la seconde guerre sino-japonaise de 1937. Le chef instructeur, Tatéo Kato de l'aviation de l'armée, entraîne de jeunes cadets issus de l'infanterie; il entraine aussi bien des Japonais que des Chinois, ses futurs ennemis. Lorsque que le conflit éclate, Kato doit mener au combat des pilotes fraîchement brevetés. Il doit affronter et abattre le lieutenant Cho, un pilote chinois qu'il avait formé et avec lequel il s'était lié d'amitié. Peu à peu, les Japonais acquièrent la supériorité aérienne au-dessus de la Chine, mais au prix de lourdes pertes qui affectent particulièrement Kato. Quand la seconde guerre mondiale est déclarée, le commandant Kato doit combattre un nouvel adversaire équipé de chasseurs modernes. Il est révolté par le sacrifice inutile d'hommes bien entraînés qui ont pour morale que "servir c'est mourir". Alors qu'il gravit les échelons du commandement, il s'oppose à une hiérarchie militaire sclérosée, notamment en promouvant la mise en service d'un nouveau chasseur, le Nakajima Ki-43 Hayabusa, l'homologue du Mitsubishi Zéro équipant la Marine. Cet avion doit donner à ses hommes une meilleure chance d'affronter victorieusement l'ennemi. Puis, on suit Kato et son groupe, lors de la campagne de Malaisie, en Thaïlande et en Birmanie, jusqu'au jour fatidique où il rencontre, au dessus de la mer, un bombardier anglais isolé qui se défend particulièrement bien. Alors que deux de ses ailiers sont touchés, il passe à l'attaque, mais son avion est atteint et prend feu. Kato, sachant qu'il ne pourra atteindre la côte, décide alors de se précipiter dans l'océan, au grand désespoir de ses coéquipiers, impuissants.

Contrairement au film "officiel" de 1944, ce film accorde une place plus large aux femmes, notamment à celles des pilotes, dont certaines attendent à la maison, en jouant du koto, pour calmer leur angoisse... Il semblerait (car nous n'avons que la version originale du film, en japonais) que Kato ait été marié et père d'un jeune fils. Le film s'étend, par ailleurs, assez longuement sur l'amitié entre Kato et un officier chinois qui a été son élève. Ceci est un peu étonnant quand on sait que la guerre sino-japonaise fut absolument sans merci et que la Chine et le Japon se regardent toujours en chiens de faïence, 77 ans plus tard.

Il y a aussi un petit problème avec la moustache de Kato…Dans le film, il ne porte la moustache qu'à la fin, alors que sur ses vraies photos, il ne la portait que quand il était en Chine. Il la rasa après la mort de son ami Kawahara, abattu le 23 mars 1938.

On peut être étonné, qu'au Japon, on ait consacré deux films à un seul pilote de l'Armée. Il faudra attendre 1976, pour qu'un film soit tourné au Japon, "Ôzora no samurai", sur Saburo Sakaï (64 victoires au moins), un pilote de la Marine. Tatéo Kato est loin d'avoir été un top scorer de l'aviation japonaise, et des pilotes comme Hiroyoshi Nishizawa, Tetsuzo Iwamoto, Shigeo Fukumoto de la Marine, ou Hiromichi Shinohara, Satoshi Anabuki, Yasuhiko Kuroe de l'Armée, pour ne citer que ceux-là, avaient beaucoup plus de victoires à leur actif, en ayant parfois combattu plus longtemps que Kato. Ils sont néanmoins restés inconnus du grand public japonais et occidental. Kato combattit pendant la dernière guerre essentiellement sur le front de Malaisie et de Birmanie, où l'activité aérienne était plus faible que dans les îles du Pacifique, comme le révèle le calendrier de ses victoires. Si l'état-major choisit de faire du lieutenant-colonel Kato, un de ses anciens membres, un héros national, cela est plus dû à sa carrière passée et à son aura auprès de ses hommes, qu'à ses victoires (16 victoires, dont 9 en Chine, en 1938). Sa glorification comme "dieu de la guerre" était une opération de propagande, rééditée deux ans plus tard, par la décision de l'armée de tourner un film sur sa carrière militaire, à un moment où la guerre était à un tournant. Comme l'avait fait Kajiro Yamamoto en 1944, contre l'avis des militaires, ce film insiste plus sur le groupe, très soudé, que Kato avait constitué autour de lui, que sur sa personnalité propre et ses exploits guerriers personnels (en demi teinte…). En 1944, il s'agissait de renforcer l'union nationale et de rapprocher le peuple de son armée, alors que les troupes japonaises commençaient à lâcher prise dans le Pacifique et que les B-29 n'allaient pas tarder à pilonner le territoire sacré du Nippon.

Fait avec la technologie des années 60, ce film contrairement à l'original, tourné en 1944, ne montre aucun véritable avion japonais dont, à l'époque, il n'y avait même pas d'exemplaires dans les musées. Mais les scènes aériennes, reconstituées avec des maquettes, complétées par des répliques grandeur réelle, pour les prises de vues au sol, sont d'un bon niveau, même si les avions volent "comme des maquettes", virant d'un bloc, dans un mouchoir de poche, et ignorant certaines lois élémentaires de l'aérodynamique.

 

Les avions du film :

On ne voit pas tous les avions pilotés par Kato. Pour sa période de formation, on nous montre un biplan d'entraînement Mitsubishi type Ki-1, en fait, un Hanriot HD.14 français, fabriqué sous licence.

Kato commença la guerre en Chine, sur un biplan Kawasaki type 95 Ki-10, mais dans le film il pilote un Nakajima type 97 Ki-27b, plus récent, que l'unité de Kato, le 2° Hiko Dataï, ne toucha qu'à partir du début d'avril 1938. A cette date, il comptait effectivement neuf victoires, comme on peut le voir sur l'avion. Les marques de victoires étaient des ailes d'oiseau (et cela jusqu'en 1940), inscrites sous sa marque personnelle (un faucon ?) qui deviendra, plus tard, celle du 64° Sentaï.

Les Chinois sont uniquement équipés de Polikarpov I-16, dont le n° 71, arborant un tigre peint sur son fuselage. Mais Tatéo n'affronta, en réalité, que des biplans Polikarpov I-15bis.

Quand il est nommé le 10 avril 1941, à la tête du 61° Sentaï, cette unité est équipée de Ki-27, mais elle entame sa transformation sur le nouveau Nakajima Ki-43 Hayabusa. La production a utilisé apparemment aux moins deux maquettes grandeur réelle, de Ki-43, arborant sur leur dérive la flèche blanche du 1° Chutai, du 64 Sentai de Kato. Ils ont un camouflage (tout neuf)  deux tons de type "S", vert foncé dessous, gris clair dessous. Il s'agit de Ki-43 Ia/b, munis de deux mitrailleuses de capot, d'un viseur télescopique (reproduit de façon très sommaire), et d'une hélice bipale à vitesse constante. L'avion est, dans son ensemble, bien reproduit, avec cependant, une canopée un peu trop grande et aux montants fragiles, trop "carrés". Les roues du train d'atterrissage sont également un peu "légères". On notera qu'à l'atterrissage, les pilotes sortent le train en très courte finale, quelques secondes avant le toucher des roues, ce qui, même chez les Japonais, n'était pas conforme au manuel de vol. Au décollage, la roulette de queue reste au sol jusqu'à la rotation, ce qui n'est pas normal, l'avion décollant alors qu'il est en ligne de vol.

On voit les Hayabusa mitrailler et bombarder des terrains d'aviation; bien que ce ne soit pas leur rôle principal, le Ki-42-Ia pouvait effectivement emporter deux bombes de 15 ou de 30 kg.

Les Hayabusa affrontent des (maquettes de) Brewster Buffalo anglais portant le code "WP" du 243 squadron affecté à la défense de Singapour. Mais Kato combattit aussi les Buffalo du 453 squadron, basés à Kuala Lumpur et ceux du 53 squadron, basés à Rangoon, ainsi que quelques Buffalo hollandais, au dessus de Java. Les autres avions ennemis sont des Hawker Hurricane (dont l'un portant le code "JS" d'une unité d'entrainement opérationnel qui ne quitta jamais le sol britannique..); Kato affronta ceux des 232 squadron (Palembang), 258 squadron (Seletar) et du 17 squadron (Loiwing). On voit également des Curtiss P-40 arborant, comme il se doit, la gueule de requin des Tigres volants, mais avec des étoiles américaines ! Notons que les pilotes américains de l'AVG prirent systématiquement le Hayabusa pour un Zéro, auquel il ressemblait et dont il avait l'agilité.

La mission aéroportée sur Palembang utilise des Kawasaki Ki-56, la version japonaise du Lockheed 14, un appareil qui fut également produit au Japon et utilisé par l'armée, sous la dénomination "Type LO". Les Ki-56 étaient, avec les Mitsubishi Ki-57 et G3M1, les avions standards des troupes aéroportées. Mais l'intérieur de la cabine correspond à un avion beaucoup plus grand, le Ki-56 ou le type LO ne pouvant emporter que 12 hommes, au lieu des 26 aperçus…Il s'agit en réalité d'une vraie séquence de parachutage, effectuée avec trois Curtiss C-46 Commando qui équipèrent la force d'auto-défense japonaise entre 1955 et 1978 et qui pouvaient emporter jusqu' à 50 hommes.

La scène montrant la mort de Kato ne semble pas correspondre exactement aux faits réels. D'abord le Bristol Blenheim Mk.IV solitaire, du 60 squadron, ne fut pas abattu, contrairement à ce que prétendirent les ailiers de Kato, ce qui permit de recueillir le témoignage de son équipage et notamment du mitrailleur de la tourelle supérieure, une fine gâchette, le Flight Sergeant Jack McLuckie. Il toucha deux Ki-43, les forçant à rompre le combat, avant de descendre Kato d'un rafale bien ajustée, dans le ventre de son appareil ou dans le capot moteur et dans le cockpit. Quoiqu'il en soit, son avion était en flamme et on pense que Kato préféra se précipiter dans la mer, pour en finir. Il est vrai que les secours en mer japonais étaient quasi-inexistants et se parachuter dans ces conditions n'était pas un moyen de s'en sortir. Rappelons que les Blenheim effectuaient leurs incursions à très basse altitude, pour améliorer l'efficacité de leur bombardement, mais aussi pour éviter d'être attaqués par en-dessous et d'être repérés par les radars. Tatéo Kato fut donc victime de la fragilité du Hayabusa, une machine brillante, mais faiblement armée et dépourvue de blindage et de réservoirs auto-obturant, des équipements qui n'apparaîtront que sur les modèles ultérieurs. C'était, comme le Zéro, "un avion de tourisme équipé d'un moteur de 1000 chevaux", selon l'appréciation d'un officier américain !

 

Christian Santoir

 * Film disponible sur YouTube


NB : Lire la biographie de Tatéo Kato dans la revue "Avions" n° 122, de mai 2003.

Sur les combats en Birmanie, lire : "Tigres volants" dans la revue "Ciel de Guerre" n°3, 2005.



 

 

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