DER STERN VON AFRICA
Année :1957
Pays : Allemagne de l’ouest
Durée : 1 h 39 min
Genre : guerre
Noir et blanc
Réalisateur : Alfred Weidenmann
Scénario : Herbert Reinecker
Histoire originale :Udo Wolter
Acteurs principaux :
Joachim Hansen (Hans-Joachim Marseille), Marianne Koch (Brigitte), Hansjörg Felmy(Robert Franke), Horst Frank (Albin Droste), Peer Schmidt (Answald Sommer), Carl Lange (Capitaine Krusenberg), Werner Bruhns (Werner Haydenreich), Alexander Kerst (Major Niemeyer)
Musique : Hans-Martin Majewski
Photo : Helmut ASHLEY, Francisco Sempere
Producteur : Erwin GITT
Compagnie productrice: Neue Emelka, Producciones Cinematográficas Ariel
Avions :
- Focke Wulf Fw.44 Stieglitz
- Fieseler Fi.156C Storch
- Hispano Aviacion HA1112K.1L
- Junkers Ju.87 Stuka, document.
- Supermarine Spitfire, document.
Notre avis :
DER STERN VON AFRIKA, ou l’ « Etoile d’Afrique », était le surnom de Hans-Joachim Marseille, le grand as allemand aux cent cinquante huit victoires, décoré de la croix de chevalier avec feuilles de chênes, glaives et diamants ! Douze ans après la fin du conflit, le cinéma allemand ose faire l’apologie d’un héros du III° Reich encensé par la propagande nazie et donné en modèle à la jeunesse allemande. Le réalisateur Weidenman passait aux yeux de Goebbels comme un des metteurs en scène les plus talentueux. Avant 1945, il s’était spécialisé dans les films de jeunesse prêchant l’obéissance au parti nazi et le dévouement sans limite au Vaterland. Il avait ainsi tourné, entre autres, deux films d’aviation : « Junge Adler » en 1941, sur les jeunes travailleurs de usines Heinkel, et « Himmelhunde » en 1944, sur une section de vol à voile des jeunesses hitlériennes. Weidenman réussit néanmoins à traverser l’épuration sans trop d’ennuis. En 1955, il reçut la médaille d’or du film allemand pour son film sur l’amiral Canaris. Dans les années 1970 et 1980, il réalisera des dizaines d’épisodes des séries TV « Derrick » et « Der Alte ».
Le jeune Marseille mort en pleine gloire à l’âge de vingt trois ans, était un personnage éminemment dramatique. Certains, dont le général Adolf Galland, n’hésitèrent pas à faire de lui, non seulement le plus grand as allemand, mais le plus grand pilote de chasse de la seconde guerre mondiale..
Le film commence en 1939 à Berlin, où Marseille est à la Luftwaffe Kriegschule (en fait la Luftkriegschule, à Fürstenfelbruck). C’est un élève doué, un pilote né, mais dont les problèmes de discipline freinent la carrière. Un jour, il atterrit sur une autoroute pour demander son chemin ! Marseille avec sa tenue décontractée, ses airs de play-boy, est très apprécié des jeunes femmes. Quand la guerre est déclarée, ce n’est que grâce à ses aptitudes professionnelles, que le Fähnrich (aspirant) Marseille est affecté dans le nord de la France. Les combats alternent avec les permissions à Paris. Quand l’Allemagne intervient en Libye, son escadrille y est transférée. Dans le désert, tout est différent ; les conditions de vie sont spartiates et les hommes sont livrés à eux mêmes, loin de tout. Cette ambiance n’est pas pour déplaire à Jochen, d’autant que son chef d’escadrille se montre compréhensif à son égard. En l’air, on affronte un ennemi supérieur en nombre. Un jour, il est abattu mais réussit à se poser sur le ventre et est rapidement secouru. Les jeunes recrues ne font pas de vieux os. Entre les missions, Marseille se relaxe en écoutant de la musique de jazz du moins quand les bombardements de l’aviation alliée lui en fournissent le loisir. Marseille accumule les victoires et après sa cinquantième, il reçoit la croix de chevalier. Le 6 juin, s’y ajoutent les feuilles de chêne, alors qu’il compte soixante quinze victoires. Il obtient une permission à Berlin après qu’il ait abattu cent un adversaires ! Cette permission est d’abord consacrée aux tournées de propagande, notamment dans le lycée où il avait fait ses études. Il y rencontre un professeur, une jeune femme dont il tombe amoureux. Mais les obligations continuent. Il doit se rendre à Rome où Mussolini doit lui remettre la Médaille d’Or de la Bravoure, la plus haute décoration italienne. Il s’arrange pour emmener son amie Brigitte dans son périple italien. De retour en Libye, il reprend le combat et son palmarès s’allonge. Mais lors d’une sortie, son moteur prend feu et il doit sauter; son parachute ne s’ouvre pas.
Le film suit d’assez près l’histoire de la courte vie de Marseille, bien qu’il s’étende un peu trop sur sa liaison amoureuse. S’il est vrai que Marseille était, au moment de sa mort, fiancée à Hanneliese Küppers, il comptait de nombreuses conquêtes quand il était en France et ses nuits étaient fort agitées, au point que son supérieur, Johannes Steinhoff, le fit muter au JG27 à cause de son insubordination. Le fait d’être un fils de général lui rendit sans doute service plus d’une fois. L’épisode où il se pose sur l’autoroute est vrai, mais ce n’était pas parce qu’il s’était perdu ; il avait tout simplement envie de satisfaire un besoin pressant ! Encensé par le régime nazi, c’était en fait un marginal et un solitaire, supportant mal la discipline militaire, aimant les tenues négligées, la musique de jazz jugée décadente par les nazis. Le leitmotiv du film est fortement inspiré de « Rhumba azul », un morceau du King Cole Trio qui était l’air favori de Marseille en Libye. Le noir Mathias ne fut le serviteur de Marseille qu‘après son retour d’Italie, en août 1942. C’était un caporal de l’armée sud-africaine, Mathew Letulu, fait prisonnier à Tobrouk. Il servait aussi au mess et remplissait parfois la fonction de chauffeur. A la mort de Marseille, il suivit le groupe de chasse en Tunisie, en Sicile et en Grèce !
Si lors des combats, Marseille était un chasseur exceptionnel, abattant le 1° septembre 1942, dix sept avions dans la journée, dont huit en dix minutes, il n’était en rien un chef de groupe et n’était pas fait pour le travail d’équipe. Il fut victime d’une panne moteur sur un nouvel appareil. Son moteur en feu, Marseille décida d’abandonner l’appareil, mais il heurta la dérive; inconscient, il ne put ouvrir son parachute.
En dehors de la vie de Marseille, le film ne s’attache pas à un reconstitution très précise de l’époque. Les costumes (à part les uniformes), les coiffures sont typiques des années cinquante. Il en est de même pour la musique, plutôt « jazzy » avec guitare électrique et bongo qui conviendrait mieux aux aventures d’un Lemmy Caution qu’aux exploits d’un Siegfried. Malgré un traitement politiquement correct (on ne voit pas Marseille reçu par Hitler et Göring, à Berlin) le film fut un moment interdit en Allemagne.
En 1995, Denys de la Patellière tournera un film pour la télévision, intitulé « Les épées de diamant » qui présentera Marseille (appelé Avignon !) sous un jour nouveau : il serait d’origine juive et tombe amoureux d’une résistante suédoise juive ! Nous sommes là en plein délire !
Les avions du film :
Cette coproduction germano-hispanique a été tournée en Allemagne (Berlin, Munich), en Espagne (Séville) et aux Canaries. Si la reconstitution de la base de la JG27 en Libye peut paraître crédible, le Nord de la France, avec pins maritimes et route bordée d’Eucalyptus, l’est beaucoup moins. La coopération espagnole a surtout permis de fournir les avions. DER STERN VON AFRIKA est le seul film montrant l’Hispano Aviacion HA1112K.1L. Cet avion était une cellule de Messerschmitt Bf 109G avec un moteur Hispano Suiza HS-12Z-89 fabriqué en France. Il n’a pas de canon dans l’axe de l’hélice, mais deux canons dans les ailes qui comportent chacune une petite cloison de décrochage. Dans le film, les canons ont été enlevés. Le HA1112K.1L fut remplacé par le « Buchon », bien connu des aérocinéphiles. Au moins cinq avions furent convoyés de l’Ecole de chasse de Moron, à Gando dans l’île de Gran Canaria. La plage de Maspalomas déserte à l’époque du tournage, servit à simuler les paysages libyens. Mais les premières scènes furent filmées à Moron et à Séville-Tablada. Ces avions portent l’insigne du premier groupe du JG27 qui n’a rien à voir avec le théâtre d’opération libyen ; il fut créé en 1940 par le capitaine Riegel né dans le Sud Ouest africain (Namibie). Marseille volait en Libye sur Messerschmitt Bf 109 F-4 Trop, le seul modèle de 109 avec une roulette de queue rétractable. Il en eut quatre, tous marqués du numéro 14 jaune (W. Nr. : 8693, 10056, 10137, et le 8673 avec sur le gouvernail, le chiffre 100 entouré d’une couronne et surmontant 51 barres).
Au début du film, Marseille atterrit sur une autoroute avec un Focke Wulf Fw.44 Stieglitz. Dans le désert, il est récupéré par un Fieseler Fi.156C Storch qui était encore en service dans la Force aérienne espagnole.
La production fit appel à plusieurs documents d’actualité montrant des Junkers Ju.87 Stuka et des Spitfire (code SD du squadron 501 basé en Angleterre), ainsi que des B-17G. Pour les combats, on eut recours à des maquettes d’HA.1112K et d’Hurricanes, alors que Marseille descendit une majorité de Curtiss P-40 Kittyhawk. Notons que les effets spéciaux sont de piètre qualité.
Christian Santoir
*Film disponible sur amazon.fr
Enregistrer un commentaire