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LE COMBATTANT

 

LE COMBATTANT
Vo. The fighting lady

 

Année : 1944
Pays : Etats-Unis
Genre : documentaire
Durée : 1 h.
Couleur

Réalisateur : Edward STEICHEN
Scénario : John S. MARTIN, Eugene LING

Acteurs principaux :
Joseph J. CLARK ("Jocko", le capitaine du porte-avions), Dixie KIEFER (Dixie), G.E. LOWE (lui-même), John S. McCAIN (lui-même), John MEEHAN (lui-même), E.T. STOVER (lui-même), Robert TAYLOR (le narrateur).

Musique : David BUTTOLPH
Producteur : Louis De ROCHEMONT
Compagnie productrice : United States Navy

Avions :

  • -Curtiss SB2C Helldiver
  • -Douglas SBD Dauntless
  • -Grumman F6F-3 Hellcat
  • -Grumman TBF Avenger
  • -Kawanishi H8K
  • -Mitsubishi Zéro
  • -Mitsubishi G4M

Notre avis :

Ce film en Technicolor sortit en salle, à Paris, le 15 août 1945. Son titre français, "Le combattant", est moins connu que le titre américain "The fighting lady" ou le titre alternatif "The big Y", qui font référence au porte-avions de la classe Essex, l' USS "Yorktown" (CV-10), deuxième du nom (rappelons que chez les Anglo-saxons, les bateaux comme les avions, sont du genre féminin). Le nom du porte-avions ne fut pas cité pour des raisons de secret militaire et il est présenté comme le représentant de tous les porte-avions sur le front Pacifique. Mais le capitaine du navire, le captain Joseph J. CLARK, surnommé "Jocko", était bien le vrai. Ce personnage haut en couleur (c'était un indien Cherokee) est filmé non seulement sur la passerelle, mais aussi sur le pont, lors des essais du nouveau porte-avions, dans le Golfe du Mexique. Il dirige lui-même le rangements des avions sur le pont, en houspillant ses matelots : "Get the lead out of your pants" (autrement dit : "Maniez vous le c.." !). Il leur rappelle qu'il sera trop tard pour faire des erreurs quand ils seront dans les eaux ennemies.

Lors de cette croisière d'essai et d'entraînement, Jocko accepta, à la demande du capitaine de corvette Frank "Spig" Wead (un ancien officier de la Navy devenu scénariste et qui avait repris du service), d'accueillir à son bord une équipe de cinéastes de la Fox pour tourner quelques bouts de films devant servir au tournage de "Porte-avions X" (1944), avec Dana Andrews et Don Ameche. Il sortit quinze jours avant "The fighting lady".

L'idée de ce film documentaire remonte à 1942 et le tournage fut confié au lieutenant commander Dwight Long, connu avant-guerre pour ses reportages filmés à travers le monde. Après son engagement dans la Navy, on lui assigna la tâche de suivre les activités du nouveau porte-avions "Yorktown", armé en avril 1943. Il fallut bientôt lui adjoindre une équipe de dix personnes. Le film inclut aussi de nombreux extraits des ciné-mitrailleuses montées sur les chasseurs, des caméras déclenchées par le tir des armes qui, jusqu'ici, ne servaient que pour l'entraînement et qui furent ainsi révélées au public. Le tournage dura une quinzaine de mois et retrace l'activité du porte avions entre juillet 1943 et juin 1944. Si les trois quarts du film furent bien tournés à bord du "Yorktown", certaines scènes furent tournées à bord du "Hornet", du "Ticonderoga" et du "Bunker Hill". En mai 1944, la Navy donna aux studios, de nombreuses bobines de films tournés à bord de divers porte-avions.

"The fighting lady" fut le premier film de propagande des forces armées US à être diffusé par un studio privé. Le narrateur du film était un des stars de la MGM, le lieutenant Robert Taylor, qui était alors instructeur dans l'aéronavale. Il fut projeté à bord du "Yorktown" en février 1945, alors que le navire était "quelque part" dans le Pacifique ouest.

Le film commence quand la "Fighting lady" quitte la côte est des Etats-Unis et que son groupe aérien rejoint son bord. Puis, le navire fait route vers le canal de Panama pour pénétrer dans le Pacifique (juillet 1943). On nous montre la vie quotidienne des nombreux membres de l'équipage (2400 hommes environ) et notamment des non combattants, comme les coiffeurs, les boulangers, le pharmacien, le cordonnier...Quand, ils ne s'entrainent pas, les hommes passent leur temps à jouer aux cartes ou à se bronzer sur le pont. La première mission de guerre est un attaque contre l'ile Marcus (31/08/1943). Après le traditionnel ordre diffusé par haut-parleur : "Pilots, man your planes !", on voit les chasseurs et les bombardiers décoller du porte-avions, à l'aube. Le commentateur déclare que dix neuf avions japonais ont été abattus lors de cette mission. Puis, vient l'assaut contre l'île de Kwajalein (30/01/1944), puis celle de Truk (16/02/1944). Après, le porte-avions rejoint le mouillage de Majuro, dans les îles Marshall (avril 19945), où il jette l'ancre, aux cotés des multiples bateaux de la Task Force 58 de l'amiral "Pete" Mitscher, montré au milieu de son staff. A coté du "Yorktown", on voit le porte-avions "Enterprise" (CV-6 ), le cuirassé "Indiana", un autre cuirassé de la classe "New Mexico", plus des croiseurs, des destroyers et des bâtiments d'appui. On remarque ainsi, peint tout en blanc, le vieux cargo "Bountiful" (AH-9) converti en navire hôpital. Puis le porte-avions repart au combat et c'est l'assaut contre Guam et Saipan, dans les Mariannes (13/06/1944). Lors de l'assaut contre les îles Mariannes, les Japonais lancèrent 373 avions à l'attaque de la flotte US. La Task Force intercepta les japonais et en abattit plus de 300, au point que la bataille devint connue sous l'appellation "du tir au pigeon" des Mariannes ! A la fin, le porte-avions est crédité de 757 avions descendus. Le documentaire se termine avec l'immersion des corps de ceux qui moururent au combat.

Le film ne retrace pas dans le détail les combats et les allers et venues du "Yorktown" dans le Pacifique. Après avoir quitté Pearl Harbor, le 7 septembre 1943, il y retourna le 19 du même mois, puis le 11 octobre, le 9 décembre, le 11 mai 1944, avant de rentrer temporairement aux USA, le 31 juillet. Au début de 1944, il se replia trois fois sur l'atoll de Majuro, le 4 février, le 6 avril et le 4 mai. Cela permettait aux hommes de souffler et au porte-avions de subir réparations et modifications, tout en complétant ses effectifs aériens.

Ce documentaire restitue assez bien les conditions de vie à bord du "Yorktown" et on pourra le comparer, à ce point de vue, au film japonais "Les volontaires de la mort" (1942), tourné sur le porte-avions "Akagi". Avant et après les combats, on a les scènes classiques des marins recevant du courrier, jouant aux dés, assistant aux services religieux ou se dorant au soleil. On y voit aussi le travail dangereux des équipes de pont (armuriers, ravitailleurs, mécaniciens, arrimeurs…), au milieu des hélices qui tournent. Lors des appontages, on voit également le LSO (Landing signal Officer) qui officie en pleine chaleur tropicale, vêtu parfois d'un simple short. Son travail est encore plus difficile quand le navire récupère les avions revenant des combats, les pilotes étant fatigués, voire grièvement blessés. On assiste ainsi à des appontages dramatiques où les avions se viandent littéralement sur le pont, quand ils ne sont pas en flammes, ce qui nécessite l'intervention du service incendie. Mais il n'y a aucun appontage de nuit, contrairement à ce qui se pratiquait sur les porte-avions japonais. On pénètre également dans le "Combat Information Center" qui réunit les informations recueillies par les radars. Lors de la bataille des Mariannes, quand le porte-avions est attaqué par des avions kamikazes, on a l'occasion d'apprécier la forte DCA du navire, constituée de tourelles doubles de 127 mm, d'Oerlikon de 20 mm, mais aussi de Bofors de 40 mm.

Le film ne nous montre, naturellement, qu'un seul coté des combats et l'ennemi japonais, honni, a droit à quelques remarques ironiques de la part du commentateur : "Encore un bateau qui n'apportera plus de riz et de saké aux soldats", ou "Quand nos avions partirent, l'ile de Kwajalein brûlait de façon très satisfaisante"… Ce film est à replacer dans le contexte de l'époque et reflète la haine qu'avait inspiré les Japonais, bien avant l'attaque de Pearl Harbor, dès leurs exactions commises sur les populations civiles en Chine (Shanghai, Nankin..). Malgré son ton victorieux, ce film de propagande, qui se termine sur des funérailles, semble préparer le spectateur à un conflit long et coûteux dans le Pacifique. Les combats dureront effectivement encore plus d'un an, quand le film sortit sur les écrans.

Quant au "Yorktown", il survivra à la guerre et après de nombreuses refontes et modifications, il participera au tournage du film "Tora ! Tora ! Tora !" en 1970. Il sera définitivement réformé en juin 1973 et transformé en mémorial de l'US Navy, ancré à Charleston, une belle retraite pour ce vétéran.

Les scènes de "The fighting lady" se retrouveront dans de nombreux films de fiction, sur la guerre du Pacifique.

 

Les avions du film :

Au début du film, on voit les avions du Air Group  rejoindre leur porte-avions. Il y a ainsi des bombardiers en piqué Douglas SBD Dauntless et Curtiss SB2C Helldiver, des chasseurs Grumman F6F-3 Hellcat, des avions torpilleurs Grumman TBF Avenger. Si ces avions constituèrent bien le matériel du Carrier Air Group 5 embarqué à bord du "Yorktown", entre juillet et mai 1944, on constate que les images ont été prises à des dates différentes. Les avions portent deux types de marque de nationalité, celles d'avant juin 1943 (étoiles sans "ailes", observées sur des Dauntless et des Avenger) et celles d'après (étoiles avec "ailes").  Lors de l'attaque contre l'île de Truk, on aperçoit même, furtivement, un Grumman F8F Bearcat, un appareil qui arriva trop tard pour participer aux combats…

Les avions du "Yorktown" se distinguent par un trait blanc en travers de la dérive (pas sur le gouvernail) et un cône d'hélice vert tendre.

Le porte-avions emmenait entre 36 ou 39 chasseurs appartenant à la VF-5 (ex VF-51). C'est avec cette flottille que le Hellcat fit sa première sortie opérationnelle, contre l'ile de Marcus (31/08/1943), comme montré dans le film. Le "Yorktown" devait aussi recevoir 4 ou 5 Grumman F6F-3N des VFN-76 et 77, des unités de chasse de nuit, en 1944. Ces appareils étaient équipés d'un radar APS-6 en pod sous l'aide droite, mais on ne les voit pas dans le film. On voit plusieurs Hellcat revenir des combats en piteux état (une jambe train, un morceau de stabilo, en moins…) ou avec le pilote blessé. A l'appontage, ils se plantent sur le nez, perdent une aile, la queue, voire la moitié du fuselage, mais leur pilote s'en sortent. Un avion vraiment très solide !

Sur le "Yorktown", les bombardiers en piqué étaient représentés par 36 Douglas SBD-4 Dauntless de la VB-5. Cette unité fut également équipé en 1943, lors de sa croisière d'essai de Curtiss SB2C Helldiver, un avion qui souffrit de nombreux défauts (problèmes de crosse d'appontage, rayon d'action trop court…) et qui fut rapidement retiré du service, pour ne réapparaitre sur le "Yorktown" qu'en juin 1944, avec la VB-1 (CAG 1) en remplacement des SBD. Or, on en voit beaucoup trop sur le film, le Dauntless étant le seul avion bombardier à voir les combats pendant la période du tournage.

Enfin, l'Air Group comprenait également 18 bombardiers torpilleurs Grumman TBF-1 Avenger de la VT-5. Ce type d'appareil servit à bord du "Yorktown" pendant toute la guerre. Les Avenger de la VT-5 sont les vedettes du film "Porte-avions X", qui comporte plusieurs scènes identiques à  "The fighting lady".

Les avions japonais vus par les ciné-mitrailleuses sont, au sol comme en l'air, difficiles à identifier, vus les secousses dues au tir des mitrailleuses. Cependant, on reconnaît, en l'air, des chasseurs Mitsubishi Zéro, un bombardier Mitsubishi G4M (Betty) et même un hydravion quadrimoteur Kawanishi H8K (Emily) aux prises avec plusieurs avions américains (quand il percute la mer, il est salué par le commentateur d'un "So long, Emily" …). Au sol, sur les bases mitraillées, on reconnait des hydravions Mitsubishi F1M, Aichi E13A, et des bombardiers Mitsubishi G3M. Vers la fin du film, lors de l'attaque de Saipan, un Nakajima B6N Tenzan (Jill) portant une torpille, a réussi a franchir le barrage de la DCA et rate de très peu le porte-avions.

 

Christian Santoir

*Film disponible sur amazon.fr

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