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Baboona




Année : 1935
Pays : Etats-Unis
Genre : documentaire
Durée : 1 h 18 min.
Noir et blanc

Réalisateur : Martin E. JOHNSON, Truman H. TALLEY

Acteurs principaux :
Martin E. JOHNSON (lui-même), Osa JOHNSON (elle-même), Lew LEHR (Narrateur)

Producteurs : Martin E. Johnson,Osa Johnson


Photographie : Martin E. Johnson, Osa Johnson
Compagnie productrice : Fox Movietone News

Avions :

-Sikorsky S-39CS c/n 914, N52V
-Sikorsky S-38-BS  c/n 414-20, NC29V


Notre avis :


Dans la première moitié du XX° siècle, un couple d'Américains, Osa et Martin Johnson captivèrent l'imagination du public par leurs films et leurs livres d'aventures ayant pour cadre des pays lointains. Cinéastes, explorateurs, naturalistes et auteurs, Martin et Osa étudièrent la faune sauvage et les peuplades des îles du Pacifique sud, du nord de Bornéo, mais aussi de l'Afrique centrale et orientale. A travers leurs films, leurs conférences et leur ouvrages, ils donnaient aux spectateurs américains et européens un aperçu de pays peu connus, de populations étranges. La première expédition des Johnson en Afrique eut lieu de 1921 à 1922. Les années suivantes, ils firent trois autres expéditions, pendant lesquelles ils parcoururent le nord du Kenya, les sources du Nil, le nord du Congo belge. Parmi les films produits, "Trailing Wild African Animals" (1923), "Martin's Safari" (1928), "Simba: King of the Beasts" (1928), "Wonders of the Congo" (1931). "Congorilla" (1932) fut le premier film à reproduire des sons enregistrés sur place, grâce à un des premiers magnétophones portatifs.

En 1932, les Johnson apprirent à piloter, puis acquirent, pour une bouchée de pain (20.000 $­­­­­, grâce à la crise financière), deux avions Sikorsky amphibies. Lors de leur cinquième voyage en Afrique, de 1933 à 1934, ils survolèrent ainsi l'Afrique de l'Est, en filmant, de leurs appareils, la faune sauvage des savanes africaines. Ils filmèrent aussi le Mont Kenya, le Kilimandjaro, déjà survolé en janvier1930, par le Suisse Walter Mittelhölzer. Ces vues furent réunies dans le film "Baboona". Le sous titre de ce film est d'ailleurs, "An aerial epic over Africa". Une version muette était déjà parue, sous le titre "Wings over Africa", que les Johnson utilisèrent lors de leurs conférences. Selon l'introduction, ils parcoururent 96.000 km en deux ans, pour rapporter ces images du continent noir. On précise aussi qu'ils utilisèrent des téléobjectifs et des objectifs de diverses focales, une camera Akeley, ainsi qu'un équipement de prise de son portatif. Mr. et Mme. Martin Johnson étaient sponsorisés par la compagnie Fox Movietone News, dont le département des actualités assura le montage des films.

"Baboona" n'a pas de scénario, pas d'histoire, et consiste en un assemblage de scènes montrant des animaux, des paysages, des indigènes, filmés à partir des avions, et au sol. Le film est découpé en six parties de longueur inégales, introduites par un titre :

  • Wings : On voit les deux avions des cinéastes se poser au pied du Mont Kenya, près d'un village Masaï, où on assiste à une danse d'hommes improvisée. Il y a de belles images du survol du Mt Kenya enneigé, par les deux amphibies en formation. Entre deux prises de vues, Osa pêche pour améliorer l'ordinaire…
  • Stampede : Les avions survolent à basse latitude, la plaine ou fuient des multitudes de gnous, des girafes, des lions. Des lionnes mangent un zèbre à quelques pas de l'avion d'Osa. Certaines s'approchent dangereusement.
  • Kilimandjaro : Survol du volcan, avec vues de l'intérieur du cratère de Kibo.
  • Rhino : Un gros rhinocéros s'approche de l'avion, dont il ne semble pas avoir peur. Des guerriers Masaï partent à la chasse. Ils s'amusent avec un blaireau combatif, puis avec un léopard qu'ils réussissent à maîtriser, et à attacher. Ils chassent ensuite un lion à la lance. L'attaque d'un rhinocéros s'avère tout aussi dangereuse. Pendant ce temps, les jeunes et les femmes conduisent les troupeaux de chèvres, de moutons et de dromadaires, au point d'eau. Au campement, Osa s'amuse avec un éléphanteau et des bébés léopards. Puis elle prépare une omelette avec un oeuf d'autruche….
  • Pygmées : Ces "petits sauvages", comme les appellent le narrateur, dansent autour de l'avion, alors qu'Osa, juchée sur le capot, les regarde.
  • Baboona : Martin filme une colonie de babouins qu'il juge bien "plus malins que les sauvages qu'il a rencontrés"…On voit les babouins repousser une hyène et combattre des léopards. Ayant traversé une rivière, les babouins doivent se battre de nouveau avec de petits singes dont ils ont envahi le territoire, et qui le défendent hardiment.


Le film se termine avec le narrateur donnant rendez vous aux spectateurs, l'année suivante.

La plupart des thèmes qui apparaissent dans "Baboona" étaient déjà présents dans "Congorilla", la scène finale sur les babouins remplaçant celle sur les gorilles. Il y avait aussi, une grande séquence sur les pygmées Mbuti de l'Ituri (nord Congo). Ce qui frappe dans ces films, vieux de plus de soixante dix ans, ce n'est pas tant la richesse de la faune, que sa densité. Les troupeaux d'éléphants, d'autruches, de rhinocéros sont énormes. Que dire aussi des populations de flamands roses qui apparaissent innombrables...On a vraiment l'impression d'être dans un jardin d'Eden où l'homme se fait discret. Mais, on constate que cette nature "sauvage" est sur le point de changer. Kikuyu, Masaï ou Pygmées, n'ont pas l'air d'avoir grand peur de l'avion, qu'ils semblent connaître déjà. Ils se prêtent complaisamment aux séances de tournage, comme une bande de figurants d'une production hollywoodienne.

"Baboona" est un film distrayant étudiant de façon quasi académique la faune africaine, en soulignant les phases amusantes du voyage; plusieurs scènes sont ainsi consacrées aux activités domestiques des Johnson. Derrière l'apparente simplicité du tournage, se cachait toute une organisation assez lourde, avec des centaines de porteurs, l'établissement de camps de base, l'aménagement de pistes sommaires, l'acheminement du carburant pour les avions, etc...Ce n'est que vers la fin du film, avec l'irruption d'une hyène, puis de léopards, dans une colonie de babouins, que le film comporte quelque action. "Baboona" n'aspire pas, visiblement, à être un condensé d'horreurs primitives, un recueil d'images chocs. C'est néanmoins un témoignage intéressant pour l'homme blanc (et noir) du XXI° siècle. Ce film reportage se distingue enfin, par l'utilisation de l'avion qui est encore aujourd'hui, en Afrique, un moyen de locomotion privilégié. C'est aussi un avion caméra qui donne une vue de la Terre inconnue jusqu'ici. Cette approche tridimensionnelle fait toujours recette…



Les avions du film :


Les avions de Martin et Osa Johnson sont deux amphibies Sikorsky. L'un est un monomoteur S-39CS, baptisé "Spirit of Africa" (c/n 914, N52V) et peint comme une girafe, l'autre un bimoteur S-38-BS (c/n 414-20, NC29V), baptisé "Osa's Ark" (par référence à l'Arche de Noé.) peint comme un zèbre... Ce dernier avion était équipé de deux couchettes, d'un cabinet de toilette, d'une kitchenette et d'un petit bureau. Ces avions étaient propulsés par des moteurs surcompressés pour pouvoir opérer à partir des hauts plateaux africains (2000-2200 m).

Le couple prit livraison des appareils en décembre 1932. Puis, les deux avions furent acheminés en Afrique du sud, par bateau, en janvier 1933. Ils rejoignirent ensuite le Kenya par la voie des airs. C'est à Nairobi qu'Osa fut lâchée sur le S-39. A la fin du tournage, les Johnson rallièrent l'Angleterre à bord de leurs avions, à partir de Nairobi, via l'Egypte et la France.

Le bimoteur, après avoir été stocké un temps, fut revendu à une compagnie cubaine, l'"Expreso Aero Inter-Americano SA". Il fut accidenté lors d'une tornade en 1945, à Cuba. Le monomoteur fut utilisé par les Johnson en 1935-36, lors de leur voyage à Bornéo. Il avait été rebaptisé pour l'occasion "The Spirit of Africa and Borneo". En 1941, il sera réquisitionné et confié à la Civil Air Patrol, pour effectuer des patrouilles maritimes. Il sera perdu dans le golfe du Mexique, lors d'une tentative de sauvetage, par grosse mer.


Christian Santoir

© Photos archives Sikorsky

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