Année : 2006
Pays : Canada
Durée : 2 h 59 min.
Genre : guerre
Couleur
Réalisateur : Sturla GUNNARSSON
Scénario : John W. DOYLE, Lisa PORTER
Acteurs principaux :
Liane BALABAN (Shelagh Emberly), Richard E. GRANT (Don Bennett), Jonathan SCARFE (Bill Jacobson), Allan HAWCO (Nathan Burgess), Peter MacNEILL (Général Anderson), Robert WISDEN (Pritchard), Joss ACKLAND (Winston Churchill).
Musique : Jonathan GOLDSMITH
Photographie : Rene OHASHI
Producteur: Paul POPE
Compagnie productrice : Pope Productions, Shaftesbury Films
Les avions :
- Lockheed A29 Hudson c/n 414-6448, s/n 41-23631
- Basler BT-67 c/n 16305 / 33053, C-GEAI
- Beech Expeditor Mk.3NM c/n A-911, C-GSWS
- Beech D18S c/n A-156, C-GZCE (en arrière-plan)
- North American NA-64 Yale c/n 64-2206, CF-CWZ (en arrière-plan)
- De Havilland Canada DHC-1B-2-S5 Chipmunk c/n 179-217, C-FBXK (en arrière-plan)
- De Havilland Canada DH-82C Tiger Moth c/n 1724, C-GCWT (en arrière-plan)
- Stinson HW-75 Voyager (en arrière-plan)
Notre avis :
Le titre de cette mini série télévisée (deux épisodes ou deux "nuits") a été souvent utilisée au cinéma. Les amateurs de films d'aviation se rappelleront le "Above and beyond" (titre français :" Le grand secret") de 1953, sur les préparatifs de la première bombe atomique. Ici, le sujet est tout autre, le téléfilm veut saluer les pilotes qui, pendant la guerre, étaient chargés de convoyer en vol les avions à travers l'Atlantique, de Terre Neuve en Irlande, tâche obscure et ingrate, mais ô combien vitale, pour l'Angleterre.
Rappelons que la traversée de l'Atlantique nord était encore une aventure en 1940 et que seuls de rares hydravions s'y attaquaient. En 1938, les Anglais en étaient encore aux essais et une ligne postale fut inaugurée juste un mois avant la guerre, avec des Short S.30. Les Américains étaient guère plus en avance et les Boeing 314 de la PAA ne transportèrent des passagers, qu'à partir du 28 juin 1939. Donc, faire traverser l'océan à des avions terrestres, bimoteurs pour la plupart, même si c'était dans le sens ouest-est, n'était pas gagné d'avance. C'est pourtant ce que réussit à faire le "Ferry command" de la RAF à la fin de 1940. Deux commandants chevronnés de la BOAC, D.C.T. Bennett et A.S Wilcockson, furent nommés super-intendants de l'ATFERO (Atlantic Ferry Organization). Le film salue Bennett et son organisation qui permit à 9 027 avions (et non 25 000, comme indiqué à la fin du film) de tout genre, d'être expédiés à partir de Terre Neuve, au prix de près de 500 morts, hommes et femmes. En 1945, la traversée de l'Atlantique en avion, dans les deux sens, était devenue une routine. Donald C.T. Bennett servit en juillet 1942 dans le Bomber Command, et s'illustra en tant que chef de la "Pathfinders Force", chargée de marquer avec précision les objectifs pour les bombardiers qui suivaient.
D'autre films font référence aux "ferry pilots" pendant la guerre, comme "Escadrille internationale" (1941), "Un Yank dans la RAF" (1941), "Flying Fortress" (1942), le meilleur étant "Les chevaliers du ciel" (1942), avec James Cagney.
L'histoire commence en juin 1940, alors que la France a été vaincue et que les sous-marins allemands coulent les cargos emmenant par le fond un précieux matériel, dont des avions, attendus par les Anglais, restés seuls face à l'Allemagne; la recherche d'un meilleur moyen d'acheminement des avions commandés aux USA devient urgente. En Angleterre, le magnat de la presse, lord Beaverbrook, canadien d'origine et ministre de la Production Aéronautique, conçoit a lors un plan hardi, visant à convoyer les avions par la voie des airs. A la demande de Beaverbrook, un commandant de la BOAC, Don Bennett, accepte la responsabilité d'organiser des vols transatlantiques dont il a une certaine expérience. Il est envoyé sur le petit terrain de St Hubert pour recruter et entraîner de nombreux pilotes civils, en leur fournissant notamment une qualification au vol IFR. Cela ne va pas toujours sans accident. Une premier route est créée conduisant de St Hubert (Montréal) à Gander (Terre Neuve), puis à Prestwick (Irlande du nord). L'assistante de Bennett, Shelagh, est courtisée par un pilote américain. Elle est envoyée à Gander pour superviser les préparatifs préalables à ces dangereuses missions. Cela ne l'enchante guère car quatre ans auparavant, elle avait quitté Gander et son amoureux, Nathan Burgess, qui est maintenant le directeur du petit aéroport. A la fin de leur formation, sept équipages sont prêts à convoyer des Lockheed Hudson en Irlande; le soir du 10 novembre 1940 (la veille de l'Armistice de 1918), ils décollent derrière Bennett. Le second épisode de la série montre la traversée, avec les avions volant en formation, car seul l'avion de tête dispose d'un navigateur
Malheureusement, les conditions météo se dégradent vers la fin du voyage et un avion se perd, celui du petit ami de Shelagh, Bill. Peu après, on apprend qu'il a atterri sur un autre terrain. Le pari est gagné, mais le voyage est périlleux. En Février 1941, un avion transportant le prix Nobel de médecine, sir Banting, le découvreur de l'insuline, se crashe la nuit. Le terrain de Gander est agrandi avec plus de pistes, de hangars et la construction de deux hôtels. Mais les avions continuent à s'y empiler, ce qui cause des frictions avec l'Armée américaine. Churchill décide que la RAF prenne le contrôle du terrain. Le commandant Bennett l'accepte mal et fait ses adieux, avant de s'engager dans la RAF. Shelagh se sépare de Bill qui veut l'emmener aux Etats-Unis, et retrouve Nathan
Tous les deux resteront à Gander, mais sous l'uniforme de la RCAF.
Le premier vol des Hudson se fit directement de Gander à Aldergrove (Belfast), plus de 3200 kilomètres couverts en près de onze heures, ce qui était l'autonomie maximale du Hudson III équipés de réservoirs supplémentaires. C'était très risqué. Une escale de ravitaillement fut donc envisagée dès 1941, en Islande, à Keflavik. D'autres escales techniques furent aménagées un peu plus tard, au Labrador, au Groenland (comme le montre la carte vue derrière Bennett, dans une salle de briefing) pour permettre aux avions aux "jambes courtes" d'être acheminés à leur tour.
La deuxième partie du film, encombrée par les amours de Shelagh, qui hésite entre Bill et Nathan, est moins bonne que la première. Ce téléfilm est bien sympathique et il est évident qu'il a été réalisé avec les moyens que l'équipe de réalisation avait sous la main. Il n'est pas exempts d'erreurs, d'anachronismes. Ainsi, dans un pub canadien, on voit la photo d'un B-29, en 1941.
Le matériel utilisé date souvent de l'après guerre. Les pilotes n'étaient pas ramenés au Canada dans des Hudson, comme on le voit, mais dans des bombardiers quadrimoteurs (Avro Lancaster ou B-24/Consolidated C-87) transformés en transports. Les avions du film sont vus au sol et les séquences aériennes ont été entièrement reconstituées en images de synthèse, auxquelles on a fait aussi appel pour multiplier le seul Hudson dont disposait la production
.
Les avions du film :
La vedette du film est un Lockheed A29 Hudson (c/n 414-6448, s/n 41-23631, BW769) avec le vrai faux serial "T9422" d'un Hudson IIIA qui fut le premier avion à être livré par-dessus l'Atlantique. Revenu à la vie civile et immatriculé CF-CRJ, le BW769 fut exploité comme transport par Kenting Aviation dans les années 60. En 1967, un groupe de volontaires décida d'ériger à Gander un monument en l'honneur des équipages du Ferry Command de la RAF. L'avion, basé alors à Field Aviation, à Toronto, leur fut donné. A Gander, il fut monté sur un piédestal, et exposé en plein air, près de l'aéroport. En 1990, il fut repeint avec le serial T9422. Il est actuellement préservé dans un hangar du North Atlantic Air Museum de Gander.
Cet avion est vu tout au long du film et on remarque que les vitres latérales et supérieures du cockpit ont été occultées, comme sa maquette utilisée en studio, sans doute pour faciliter le tournage. Il est douteux que les équipages ne disposent pas de masques à oxygène et doivent tenir dans la bouche un tuyau qui, de toutes façons, auraient dû se terminer par un embout qu'on tenait entre les dents. Ce système rudimentaire équipait les avions civils au milieu des années trente et ne permettait pas d'utiliser la radio.
Le commandant Bennett descend, au début du film, d'un Basler BT-67 (C-GEAI), un Douglas C-47 remotorisé par Basler Turbo Conversions, avec deux turbines Garrett, qui ne ressemble guère à un DC-3 de la British Overseas Airways Corporation, en 1940. Il possède la livrée blanche de Triumph Airways, une compagnie basée à Oshawa (ON). Ce C-47B (c/n 16305/33053, s/n 44-76721) fut d'abord livré à la RAF en avril 1945, comme Dakota IV (serial KN515). En 1953, il fut transféré au Military Assistance Advisory Group, puis à l'Armé de l'Air française (numéro"721"). Il passa ensuite à l'Aéronavale, dans les années 1970. Réformé, la vente à Air Périgord ne se réalisa pas et il fut finalement exporté aux USA (N177DM) où il fut le premier DC-3 transformé par Basler en 1985. Exploité un temps par Air Colombia (HK3575X), il fut saisi aux USA en 1995 (Air Colombia était suspecté de blanchiment d'argent de la drogue
). Reimmatriculé en août 1999 (N200AN), il est alors exploité par Adventure Network Intern., travaillant dans la zone polaire, et par la compagnie de fret World Air Logistics, en 2000. En 2001, il fut vendu au Canada à Enterprise Air Inc. qui devint en 2005, Triumph Airways. L'avion est basé en Antarctique pendant l'été. Puis, il passa en 2008, chez Ken Borek Air de Calgary. Il vole, depuis 2009, pour ALCI Aviation (Antarctic Logistics Center International). Une carrière bien remplie.
Au début du film, un Beechcraft 18 de la Royal Canadian Air Force évite de justesse la camionnette des soldats traversant la piste pour intercepter une jeune fille qui prenait des photos (avec un Kodak Brownie Hawkeye de 1951). Normalement, la tour de contrôle lui ayant donné l'ordre d'interrompre son atterrissage, le pilote aurait dû remettre les gaz, puis rejoindre le circuit pour une nouvelle approche, alors que dans le film, il atterrit ! Ce Beechcraft, tout alu, sans aucun code ni serial, avec seulement "Royal Canadian Air Force" marqué au dessus des hublots, a une décoration plus conforme aux années d'après guerre. Cet appareil est le C-GSWS (c/n A-911) un Beech Expeditor Mk.3NM (c/n A-911/CA-261), construit en 1953 pour la RCAF (c/n 2382), destiné à l'entraînement des radio-navigateurs. Réformé en 1968, il fut vendu à un particulier qui le stocka à l'extérieur. Trouvé à l'état d'épave, l'avion fut acheté en 1994 par Sunwest Aviation de Calgary. Magnifiquement restauré après 9500 heures de travail, il fut remis en état de vol et immatriculé "C-GSWS", en 1997. Vendu en mars 2006 à une société de Calgary, il est, depuis 2008, la propriété d'un pilote privé de la même ville. Il est décoré avec sa livrée d'origine de la RCAF (tout alu avec des fuseaux moteurs noirs) avec le serial "2382" sur les dérives.
On voit un autre Beech D18S (c/n A-156, C-GZCE) qui fait de la figuration, décoré comme un Expeditor de la RAF avec le code "BAE" et le vrai faux serial "HB143". Construit en 1946, cet avion vola d'abord aux Etats Unis (NC44596) avant d'être vendu au Canada en 1952 à une compagnie charter, puis à une compagnie minière. Stocké en 1957, il fut équipé en 1963 de flotteurs, puis expédié au Guatemala (TJ-JIQ) en 1974, sans flotteurs. En mai 1976, il retourne au Canada pour finir chez Interflite Air Services à Hamilton (ON). C'est là qu'un membre du Canada Warplane Heritage le trouva en 1981. Restauré et immatriculé C-GZCE, en 1982, il vola de nouveau en 1986.
Rappelons qu'en 1940-1941, la RCAF n'avait pas beaucoup de Beech 18 sur ses listes d'effectifs, six avions civils réquisitionnés, cinq avions d'occasion achetés aux USA, plus vingt huit obtenus dans le cadre du programme Lend Lease. Cinquante cinq autres avec des serials anglais arriveront plus tard. Entre mars 1944 et 1953, la RCAF acquerra 327 autres Beech Expeditor Mk.III.
D'autres avions du Canadian Warplane Heritage Museum font de la figuration dans les hangars ou sur le tarmac de l'aéroport d'Hamilton :
On aperçoit ainsi un North American NA-64 Yale (c/n 64-2206, RCAF 3350, CF-CWZ) qui servit en 1940 à la No. 1 Service Flying Training School de Camp Borden (ON), avant de finir la guerre à Aylmer (ON). Rayé des effectifs en 1946, il fut vendu à un ferrailleur chez lequel il resta stocké jusqu'au début des années 70. Il fut alors acquis par un membre du Canadian Warplanes Heritage Museum et donné au musée, en 1975. Il fut complètement restauré et remis en état de vol entre 1982 et 1992, avec le matricule C-GCWY, puis CF-CWZ. Il est exposé au musée depuis 2005. A ses cotés, dans un hangar, on entraperçoit un Harvard IV, sans doute le CF-UUU (c/n CCF4-4).
Il y aussi dans le hangar, un De Havilland Canada DHC-1B-2-S5 CT-120 Chipmunk (c/n 179-217, C-FBXK) avec le numéro "041" sur le nez (serial 18042/12041), qui est depuis 2003 au musée. Il n'y avait bien sûr aucun Chipmunk en 1940 dans la RCAF, le premier vol de cet avion ayant eu lieu en 1946.
Par contre, le De Havilland Canada DH-82C Tiger Moth (c/n 1724, RCAF 8922, C-GCWT) vu devant un hangar, fut construit en 1942 au Canada, à Donsview, pour la RCAF. Il fut restauré en 1979.
Enfin, derrière les pilotes engagés par Bennett, on voit un petit Stinson HW-75 Voyager, tout jaune, sans autres marques que ses cocardes. Ce n'est pas celui du CWH, puisqu'il avait brûlé lors de l'incendie du musée en 1993. Bien que cet avion soit d'époque, il y en eu très peu dans la RCAF où il est un avion marginal.
Le général en chef américain (à cinq étoiles, un grade uniquement attribué en temps de guerre, or, en 1941, les USA ne sont pas en guerre...) atterrit dans un Avro Lancaster ! Faut-il préciser que l'USAAF ne possédait pas un tel avion, ayant suffisamment de B-17 et de C-47 pour transporter ses VIP, en 1940. Ce Lancaster a été reconstitué en images de synthèse et n'est pas le "VR-A", maintenu en état de vol par le Canadian Warplane Heritage Museum.
Christian Santoir
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